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Nicolas Boyer : Première traversée au Japon, de Tokyo à Nagasaki

Temps de lecture estimé : 3mins

Chaque vendredi, nous vous présentons le portfolio d’un photographe*. Cette semaine, nous avons choisi le travail de Nicolas Boyer, membre du collectif Hans Lucas. A l’heure où la France met à l’honneur le Japon pour célébrer le 160e anniversaire des relations diplomatiques entre les deux pays, le photographe partage avec nous une série issue de sa première traversée au pays du soleil levant. De Tokyo à Nagasaki.

J’ai très volontairement joué à flouter les frontières entre reportage & mise en scène car ce pays m’a semblé bien souvent une vaste fiction.
À commencer par celle des rapports sociaux où chacun semble respecter un texte pré-écrit et où le normativisme forme un code que chacun se doit de jouer au nom de l’harmonie. Comme une partition sociale, pour filer la métaphore mélodique.
Le Japon oscille en permanence entre le hiératisme et la retenue du théâtre Nô & les excès propres aux représentations de kabuki. Et ce grand écart a lieu à chaque instant sur la scène permanente qu’est l’espace public. La vie privée, elle, se joue dans les coulisses et est bien souvent très inaccessible à chacun.
Cela étant, d’autres points de vue peuvent co-exister face à une perception de rapports qui pourraient paraître ancrés dans le marbre. Une amie journaliste qui a vécu 3 ans au Japon me parlait, quant à elle, de sa fascination pour la capacité des Japonais à se réinventer individuellement ou collectivement : « Ils sont dans un « délire » ou une expérience perpétuelle pour repousser les limites de l’existence, tout en étant conscients du fait qu’il ne s’agit que d’une expérimentation, et cela dans pas mal de domaines. » (Vera Kolenissa)
En effet, la notion d’éphémère est très prégnante chez les Japonais pour qui rien n’est appelé à durer, qu’il s’agisse des temples que l’on reconstruit tous les 30-40 ans ou de la fameuse floraison des sakuras (cerisiers) qui dure à peine 15 jours. Aussi pourquoi ne pas prendre la vie du côté du burlesque & de l’expérimentation permanente. Ce qui donne un peuple qui, sans être fataliste, ose des choses que l’on ne considérerait pas dans d’autres contrées – et à commencer par une forte capacité à se moquer de lui-même.
Au final, okachi (bizarre) & kichigaï (fou) sont deux adjectifs que je retiendrai de ce pays à la fois très esthétique et très étrange.

Nicolas Boyer est né en 1972 mais aurait dû naître en 1928 car c’était mieux avant.
Il n’est pas malheureux d’avoir quitté la finance, la publicité et son ex chilienne pour revenir dans le photoreportage (qui ne lui rapporte pourtant rien) et devenir membre du collectif Hans Lucas après avoir réussi à saoûler son fondateur.
N’étant jamais sorti de sa zone de confort, en dehors du fait d’avoir pénétré par erreur un compartiment réservé aux femmes dans le métro du Caire, il parcourt surtout les paysages urbains en se demandant souvent « qu’est-ce que je fous là ».
D’importants journaux internationaux ont refusé ses travaux et il n’a jamais exposé aux côtés de grands noms tels Patrick Zachman, Max Pinckers, John Vinck et Salgado. Son dernier travail sur le Japon ne sera jamais publié par le NY Times et Tages Anzeiger, ni présenté à VISA Perpignan et Bozar Bruxelles.

http://www.nicolasboyer.top
http://hanslucas.com

* Si vous souhaitez soumettre une série en vue d’une publication dans notre rubrique hebdomadaire, merci d’envoyer une sélection de 12/16 images (72DPI, 1024 pixels en JPG) accompagnée d’un texte de présentation et d’une courte biographie à info@9lives-magazine.com.

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