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Sortie du Previously on Hans Lucas #11

Temps de lecture estimé : 9mins

« Previously on Hans Lucas » est une publication mensuelle, vous y trouverez un assemblage hétéroclite de photographies et vidéos commentées par leur auteur. Nous vous présentons cette nouvelle et onzième édition.

Le carbone d’un instant définitif incise le monde dans le rectangle d’un matin. Ailleurs la nuit infuse sans joie dans le vert des réverbères bleus.
Les Endormis, beaux comme des inconnus arrachés à l’ivresse.
L’œil métallique aveugle les rides d’une phalange.
Au sourire rose de rideaux acidulés tempête la détresse toute puissante d’âmes désertes.
Immobiles nous songeons à cet autre sourire, fendu d’une cigarette. A ce torse qui halète.
Immobiles nous n’irons pas plus loin,
Plus loin que l’absolu dérangeant, heurté au brûlé d’un mur sans pareil
Si ostensiblement plein de cet infini défigurant en quelques lettres
Le soleil des dunes. Arrêtons-nous pour reprendre notre souffle
Et respirer ces anguilles magnifiques
Pareilles aux torsions radieuses d’une gorge reptilienne.
Nue elle dort
Toute ramassée dans sa chevelure d’adieu
Et cette peau grimaçante qui la contemple n’est que le reflet d’un masque qui rit
A l’envers.
Elle dort et nous dormons,
Inconscients sans insouciance,
Et nous songeons encore à cet autre qui s’effondre, dos affaissé dans l’éclat des paupières closes d’un autre. Il rayonne cependant, cet homme, au contact du taffetas mauve de l’émeraude et s’émeut d’un vivant petit rectangle bleu.
Soyeuse tout autant, l’ombre humaine doucement tapie.
Invisibles, nous songeons.

– Éléonore Antzenberger

Clara Chichin

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« Tous ces gens de dos, face à un mur un buisson un paysage rien – perspective bouchée – et la dernière danse, et puis des paysages et puis des animaux morts. Est-ce ainsi que je trame mon deuil ? 

Rien, de front, sur mon père, à mon père.
Cette photo est issue d’une série réalisée après la mort de mon père en 2009.
Comme une lettre posthume, une traversée de l’endeuillé. »

Matthieu Rosier

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Turquie, Aout 2015 « La ville est sous couvre-feu et encerclée par les forces spéciales turques. Ce soir là je suis dans ma chambre d’hôtel au dessus de l’artère centrale du centre ville là où commencent les affrontements entre les jeunes fighters kurdes et l’armée. Comme chaque soir sont tirés des feux d’artifice qui résonnent et éclairent les rues vides, comme pour annoncer les prochains affrontements. J’hésite à descendre mais ce soir là, je ne le sens pas, je décide alors d’observer la scène depuis mon balcon. »

Stéphane Burlot

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« C’était il y a 20 ans environ, je n’ai plus que de vagues souvenirs de cette scène. Tout est un peu confus, mélangé, comme sur la photo. Il était tôt le matin, un samedi je crois, à Gare du Nord, ça c’est certain. Ils devaient rentrer d’une boite ou d’une quelconque soirée sur Paris, épuisés. Ils s‘étaient endormis comme cela en attendant le départ du train. L’attente du premier train est souvent fatale pour les fêtards mais une aubaine pour ma série. »

Renaud Philippe

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« Rares sont les moments où les émotions prennent le dessus avec la communauté de réfugiés bhoutanais installée au Québec depuis maintenant 5 ans. Je les suis, des camps de réfugiés au Népal où ils ont attendu pendant 30 ans, jusqu’à leur intégration ici dans ma ville, Québec. C’est en évoquant des souvenirs du passé que hajura buvā, le grand-père, laisse les larmes s’échapper. »

Antoine Bruy

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Julien Hazemann

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Le dimanche à Ciqikou Beach, Chine – 2013
« Tous les printemps, le niveau du fleuve Jialing baisse pendant quelques semaines et laisse apparaître une plage en plein milieu de Chongqing, une mégalopole chinoise de dix millions d’habitants. Des familles en profitent pour faire un barbecue ou du cerf-volant le dimanche. Pendant chacun de mes voyages à Chongqing, je découvre des endroits spectaculaires et pleins d’histoires uniques, qui racontent en même temps tout de cette Chine d’aujourd’hui, chargée de béton et de pollution et de magie. »

Damien Mas

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« Bien qu’il avait 70 ans au moment de la prise de vue, les gens l’appelait ‘le jeune Michael’ pour le différencier d’un Michael plus agé. »

Romann Ramshorn

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« Chose rare, je n’ai jamais retrouvé le nom de ce village. Je refais toujours une deuxième fois mes voyages, avec une carte, une fois mes films développés, et je retrace mon cheminement. Là, je suis en angle mort. Mais je revois le moment, il est pris dans un entre las, un enchaînement épais d’autres moments, à la fois différents et similaires, il mêle l’hypnose et la terre, la lutte et le vent, la roche et le temps… Les jours se suivent, les séjours se succèdent, et je suis encore là, sur les routes, seul, sillonnant les grands espaces espagnols, à l’aventure, comme à ma propre conquête. »

Denis Meyer

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« Il y a des couleurs qui n’en sont plus
Des relents de terres corrompues
Des batailles de matières grises
Comme une plaie qui cicatrise
Il n’y a pas besoin de langage
Pour s’apercevoir du message
La liberté pure beauté
C’est aussi la bête qui s’y terre
Caresser l’erreur et la vérité
Et n’oublier que demain n’était qu’hier. »

Benjamin Girette

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« Figée
Un petit bifton et,
aucune plainte ne s’échappe,
elle ne dit pas un mot,
son expression est figée.
Sa parole est une arme,
qui s’achète un dollar. »

 

Elena Chernyshova

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« Norilsk, ville minière située à 400 km au nord du cercle polaire, en Sibérie. Ses mines et usines métallurgiques ont été construits par des prisonniers du Goulag. 60% de la population sont  impliqués dans le processus industriel. Norilsk est la 7ème ville la plus polluée au monde. La température moyenne est de -10°C, et peut atteindre au plus bas, -55°C en hiver. Pendant deux mois la ville est plongée dans la nuit polaire. Ces différents éléments font que les conditions de vie à Norilsk sont uniques. »

Clémence Losfeld

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« Ce cou me fait penser à un tronc d’arbre avec des racines…

‘Être vivant, c’est être prêt. Prêt à ce qui peut arriver, dans la jungle des villes et de la journée. D’une prévoyance incessamment et subconsciemment ajustée. L’état normal, bien loin d’être un repos, est une mise sous tension en vue d’efforts à fournir… Mise sous tension si habituelle et inaperçue qu’on ne sait comment la faire baisser. L’état normal est un état de préparation, de disposition vers les gouffres.’ » Connaissance par les gouffres de Henri Michaux

Plume Heters-Tannenbaum

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«  Cette photo c’est juste un moment. Rien à voir avec la série, avec le shooting, avec le lieu. Nous étions seulement tous très fatigués de la séance, et Marion s’est isolée quelques minutes sur ce matelas, en nous tournant le dos.  Elle était seule sur la scène du théâtre avec juste ce matelas. »

Hervé Lequeux

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« Un yakuza perdu à Clichy sous Bois? Une rencontre surtout, autant furtive, sur un parking du quartier du Chêne Pointu, qu’instructive sur les itinéraires parfois sinueux et singuliers de jeunes vivant dans les grands ensembles en France. Lui, Jérémy, avait quitté son quartier, le dit Chene Pointu, il y a 10 ans. Il avait alors une vingtaine d’années. Attiré très jeune par le Japon, il s’en alla un jour à sa rencontre. Une décennie plus tard, le revoici ici. Entre temps, il a plongé de tout son corps dans le cœur du pays du soleil levant. Au point de fréquenter quelques temps quelques membres de la fameuse mafia japonaise dit-il et de revenir, armé de ce large tatouage. » texte de Sébastien Deslandes

Matthieu Marre

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« Un soir d’été sur un toit à Tanger. J’y vois un dos puissant dont s’échappe une fragilité. »

14. Dorothée Smith

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« Image issue de la série « sub limis » : étymologie obscure ; peut-être de sub-limen, sublimen : « jusqu’au linteau, au-dessus du seuil. »

Alexandre Liebert

« Serê Salê. Deux mots qui, en kurde, signifient ‘Nouvelle Année’, mais qui en français sonnent comme un café au goût trop amer, imbuvable, que l’on cracherait au visage de notre ennemi. Et c’est ce que font ces Yézidis : cracher leur fierté à la face de leur ennemi, l’État Islamique, qui a massacré leur communauté en août 2014 dans la région de Sinjar. Cracher leur espoir enflammé, et prouver par la même une force rare : leur résilience. »

16. Olivier Seignette

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« Photo extraite de Ullånger Express, série narrative librement inspirée de Sugarland Express (1974) de Spielberg. Image réalisée à Ullånger, ville du nord de la Suède. »

Luc Manago

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Looking for Quebec, lost in a foggy day « Lors d’une expédition, le brouillard et la pluie verglaçante rendaient la progression de plus en plus difficile au fur et à mesure que le phénomène s’intensifiait. Quand peu à peu les repères s’estompent et que le doute s’installe, nous avons tendance à aller puiser dans nos ressources. On en découvre rapidement les limites et c’est pourquoi il faut aller au-delà. C’est ce que me rappelle à chaque fois cette photo. »

http://hanslucas.com/mag/previously11

Studio Hans Lucas
Hans Lucas est un studio de production dédié à la photographie et aux écritures numériques. Depuis 2006 son activité se décline dans la production photographique, vidéo et multimédia, la formation initiale et continue ainsi que la diffusion des œuvres de ses membres via une plateforme internationale joyeusement collaborative. http://hanslucas.com

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