Gaëtan Soerensen

IRIS ARLES a le plaisir d’annoncer l’exposition Waqf – un jardin palestinien de Gaëtan Soerensen (né en 1993, Strasbourg), photographe et diplômé de l’École Nationale Supérieure de la Photographie d’Arles.

Dans le monde islamique, le terme Waqf désigne la dotation religieuse d’une terre ou d’une propriété. Le transfert de propriété du terrain donné par le Waqf est « suspendu ». Il est donc pratiquement impossible de vendre le terrain ou de l’utiliser à d’autres buts que ceux stipulés par le Waqf.

Cette exposition présente des oeuvres photographiques et vidéo ainsi que des archives collectées par Soerensen, d’un jardin d’une famille palestinienne à Naplouse, protégé par Waqf. L’exposition commence par un diptyque du paysage de Naplouse. En bas on peut voir le jardin de la famille Fakhreddine, qui est le coeur de l’exposition, tandis qu’à l’arrière les constructions résidentielles se poursuivent vers les hauteurs quelque peu désolées.

L’absence de présence humaine donne à l’image l’impression d’une ruine, mais la continuation des images sur le deuxième mur montre que ce jardin, qui attend son propriétaire lointain (plusieurs membres de la famille sont en exil en Jordanie depuis plus de 50 ans), porte encore des fruits entre les mains de ses locataires et jardiniers.

Dans la vidéo qui suit, le Waqf, signé il y a plus de 300 ans sous l’Empire ottoman, est lu ligne par ligne par une femme de la famille Fakhreddin, celle qui maintient le jardin aujourd’hui. Énormément d’informations concernant le cadastre et la généalogie lues à voix pendant 15 minutes témoignent à quel point ce contrat est solide et légitime.

En revenant à nouveau aux images, nous pouvons remarquer qu’il y existe des contrastes et des rythmes qui sont créés par la lumière/les ombres, les couleurs et la composition. Le vêtements noir de la femme et les couleurs vives des fruits. Le papier blanc, tenu par les mains du jardinier, parmi les couleurs des plantes crée une vide dans la séquence. La lumière qui pénètre dans le jardin arboré conduit inévitablement nos regards vers l’obscurité au fond du jardin.

Le haut du corps de la femme est alors cadré et le visage du jardinier est caché. L’absence de leurs « visages » résonne avec l’imagerie du diptyque, évoquant pour nous la profondeur historique et émotionnelle du jardin, qui survit à l’absence de son propriétaire. C’est cette richesse de l’expression photographique de Soerensen qui renforce la vision narrative de l’exposition.