Mars, 2020

La Fabrique du Temps

sam07mar(mar 7)14 h 00 minsam27jui(jui 27)19 h 00 minLa Fabrique du TempsExposition CollectiveGalerie Dix9 Hélène Lacharmoise, 19, rue des Filles du Calvaire 75003 Paris

Détail de l'événement

Artistes : Leyla Cardenas, Karine Hoffman, Katia Kameri, Vincent Lemaire, Anila Rubiku, Paula de Solminihac, Yang Yi

Vaste sujet physique et métaphysique, la définition du temps, son origine et sa nature et de là, les multiples approches pour l’appréhender, n’ont cessé de nourrir les préoccupations humaines depuis des millénaires: qu’il s’agisse de fabriquer un temps objectif nécessaire à l’organisation sociale (pour établir calendrier, datations, horaires), mais aussi de mesurer un temps subjectif, dimension intérieure de notre conscience.
L’écoulement du temps le plus répandu dans les sociétés monothéistes procède d’une lecture horizontale, en datant les évènements historiques avant et après une année zéro qui serait la naissance de Jésus Christ. Les archéologues quant à eux raisonnent par stratification, adoptant une lecture verticale proche notamment de la conception chinoise.

C’est en se référant à cette approche, étudiée lors d’une résidence avec des archéologues à l’Académie Jan van Eyck à Maastricht, que Leyla
Cardenas a créé « Interpretation of Deep Time », une installation centrée sur une vidéo filmée dans les alentours de Bogota. La caméra progresse verticalement le long d’un mur de pierre en ruine, enseveli dans la montagne érodée. Cette lecture verticale des strates horizontales vers le haut et vers le bas se traduit dans un continuum d’un présent absolu, sans début ni fin. Les images deviennent objet de méditations complexes sur le temps et les cycles de transformation/destruction. Elles se fondent dans le sol de l’espace de projection mais s’écrasent soudainement dans une nappe réflexive fixée sur ce sol, subvertissant ainsi le récit même.

Parallèllement à cette recherche, l’artiste développe ses investigations sur le textile, résultat d’un tissage entre des fils de chaine (vertical) et des fils de trame(horizontal). Dans un même souci de matérialiser le temps, Leyla Cardenas fait imprimer sur textile ses photographies de ruines urbaines. Détissant le tissu en enlevant les fils de trame (espace), elle souligne la disparition progressive de la ruine tout en laissant apparaitre le temps.

S’inspirant du rayonnement fossile, nom donné à la plus ancienne image obtenue de l’univers, Vincent Lemaire réalise des photogrammes de tubes fluorescents brisés. Partant de portraits d’ancêtres familiaux sur négatif, il réalise des tirages sur papier argentique en y superposant ces photogrammes. Dans l’installation «Rayonnement familial» qui en résulte, le motif rectiligne et aléatoire superposé à ces portraits confronte le temps humain à celui de l’univers. La dualité entre la verticalité des portraits et l’horizontalité du motif réoriente le regard à chaque instant et nous rappelle la relativité du temps à l’échelle de l’univers.

Initié lors d’une résidence au Hammer Museum de Los Angeles, le projet «Effacing memory» d’Anila Rubiku revient sur la mémoire toujours présente, de dictateurs aujourd’hui disparus: Hitler, Staline, Mao…Une mémoire difficile à effacer, comme le traduit l’artiste albanaise dans ces portraits gravés sur papier dont elle tente patiemment, des jours durant, d’effacer les traits à la gomme. L’art peut-il servir à son tour à détruire l’image de dictateurs qui ont utilisé l’art pour asseoir leur pouvoir et leur gloire. L’art peut il gommer le temps?

Dans sa série sur la région des Trois Gorges, inondée par un gigantesque barrage,Yang Yi traduit trois temps dans la même image. Ses photographies prises au moyen format nous montrent un village fantomatique submergé par l’eau. Les habitants, équipés de masques et de tubas, posent pour la postérité, rejouant leur vie de tous les jours. Grâce à la retouche numérique, l’artiste chinois crée un monde irréel et drôle à la fois, en même temps qu’il « date » ses images en leur donnant les tons sépia des vieilles cartes postale: témoignage d’un temps subjectif aujourd’hui disparu.

L’oeuvre de Karine Hoffman est un archipel regroupant des îles autonomes caractérisées par un travail sur l’intrication de strates temporelles. Ses images s’inscrivent dans des espaces temps intermédiaires incertains. L’atmosphère crépusculaire et le chaos formel de ses peintures produit un sentiment de temps suspendu, de moment primordial où les strates de souvenirs peuvent venir se déposer. Des détails peuvent laisser entendre que le lieu a été occupé, qu’une histoire s’y est déroulée, mais aucun indice n’est suffisamment précis pour se raccrocher à un véritable fil narratif.

Dans une démarche relevant de l’archéologie contemporaine, Paula de Solmnihac imbrique temps présent et temps passé. Avec pour principal objet la terre, l’artiste chilienne expérimente diverses techniques et observe les cycles de production et la
métamorphose des éléments. Ses livres en terre cuite sont une re-présentation d’un objet du passé symbole de culture, toujours présent comme tel dans les sociétés actuelles, un objet qui aurait traversé le temps.

C’est aussi au livre que s’intéresse Katia Kameli, plus précisément aux sources multiples et croisées qui ont pu nourrir les Fables de La Fontaine. Au cours du temps, chaque déplacement et traduction de
manuscrits anciens a enrichi les histoires que traduit l’artiste par des collages. Ce faisant, elle combine les iconographies issues de différentes versions, nées à différentes époques, dont elle souligne l’intertextualité par des interventions de dorure à la feuille.
A quel temps avons-nous là affaire?

Dates

Mars 7 (Samedi) 14 h 00 min - Juin 27 (Samedi) 19 h 00 min(GMT+00:00)

Galerie Dix9 Hélène Lacharmoise19, rue des Filles du Calvaire 75003 ParisMardi-vendredi: 14h-19h, samedi 11h-19h et sur rendez-vous