Juillet, 2023

Les Rencontres d'Arles 2023

lun03jul(jul 3)10 h 00 mindim24sep(sep 24)19 h 00 minLes Rencontres d'Arles 2023Un état de conscienceLes Rencontres d'Arles, 32, rue du Docteur Fanton 13200 Arles

Détail de l'événement

Tel un relevé sismographique de notre temps, chaque année les Rencontre d’Arles se font l’écho de l’état de conscience de notre monde, aussi étrange qu’il puisse paraître. Les photographes, artistes et commissaires nous donnent à voir, à percevoir, avec une acuité aiguisée, les transformations que nous vivons. La prise en considération – a minima – du réchauffement climatique s’est imposée à nous, impactant directement nos habitudes.
Conscient de la nécessité et de son rôle de défricheur, le festival, en collaboration avec la Cité Anthropocène de Lyon, s’est lancé cette année dans l’exploration du territoire arlésien et de son écosystème. Scientifiques, chercheurs, penseurs et artistes sont partis à sa découverte afin d’en faire un état des lieux. Choisi comme QG de cette réflexion, Ground Control, ancienne halle industrielle de la SNCF, a été au coeur de toutes les discussions ; en résulte un dispositif de reformulation de l’espace.
L’exploration du territoire peut prendre de multiples formes. Ainsi, l’exposition Soleil Gris d’Eric Tabuchi et Nelly Monnier présente un corpus territorial issu du travail au long court Atlas des Régions Naturelles. Tandis que l’enquête sur la zone industrielle, autrefois fleuron de la modernité de Tarascon, menée par Mathieu Asselin au coeur de l’exposition Ici près nous en donne une tout autre vision. Entouré de Tanja Engelberts explorant le Rhône et de Sheng-Wen Lo en arpenteur camarguais ; chacun par son approche et sa sensibilité nous rappelle que cet espace entre terre et eau est à protéger, si l’on veut pouvoir continuer à en jouir dans un futur proche.
Car la Camargue c’est surtout le delta et son fleuve, Yohanne Lamoulère nous propose un voyage entre étrange et réalisme à la fois hors du temps et magique.
Non loin de là, aux Saintes-Maries-de-la-Mer, Lumières des Saintes explore l’histoire de ce pèlerinage sur plus d’un siècle avec ses moments joyeux mais aussi ses temps tragiques. Entre matériel vernaculaire issu d’archives et grands noms de la photographie, nombreux sont les artistes à avoir fait le voyage, de Chiki Weisz à Lucien Clergue, d’Erwin Blumenfeld à Martine Franck, pour nous faire rêver et revivre une partie de ce qui fait l’histoire de la Camargue.
Marseille, terre d’arrivée et de départ, halte avant une prochaine étape, ville de passage de femmes et d’hommes venus du Maghreb et de l’Afrique subsaharienne. C’est de cette histoire que témoignent les archives du Studio Rex du quartier de Belsunce que Jean-Marie Donat nous fait découvrir.
Souvenir lointain et exil.
Entre nos murs retrace une Histoire de l’Iran des années 1950 à nos jours tandis que la présence de la diaspora iranienne sur la côte ouest américaine est rendue visible avec Soleil of Persian Square d’Hannah Darabi.
Se promener à travers l’Histoire de notre monde et de l’actualité c’est ce que propose l’exposition célébrant les 50 ans du journal Libération à l’abbaye de Montmajour.
Photographie vernaculaire et archives, les supports sont multiples pour documenter une époque et scandent une partie de la programmation.
En 2004, deux antiquaires découvrent 340 photographies tirages et polaroïds des années 1950 et 1960 sur un marché aux puces de New York. Ces images content l’histoire d’une Amérique, celle de la Casa Susanna, celle dont on ne pouvait parler, d’une minorité qui risquait à tout moment sa place dans la société. D’une intimité secrète naissent toutes ces photographies qui ont la particularité de représenter des hommes travestis en femme d’intérieur – telles qu’elles furent vantées par cette Amérique victorieuse de l’après-guerre. Ces images sont là pour témoigner de l’essentialité de la photographie pour l’un des premiers réseaux de la communauté LGBTQIA+.
Une autre Amérique surgit, avec Gregory Crewdson, qui convie les techniques cinématographiques dans sa réalisation d’images d’un rêve en déliquescence, l’Amérique de la crise. C’est l’aboutissement de 10 ans de travail. C’est la version noire des images d’Edward Hopper, image à la Melville et représentation du polar qui tourne mal, tout comme dans l’Ami américain dont Wim Wenders nous révèle la genèse de son film dans ses polaroïds avec Dennis Hopper et Bruno Ganz.
Kaléidoscopique, la richesse de la rétrospective de Saul Leiter nous invite, entre noir, blanc, et couleur, à une déambulation dans les rues de New York ; comme Diane Arbus, née la même année que Saul Leiter, en 1923, à travers une exposition présentée par LUMA Arles. Tandis qu’à la même époque, à la fin des années 1940, Agnès Varda revient à Sète après y avoir passé la période de l’occupation. Elle photographie la vie locale du quartier populaire de la Pointe courte, prémisse quelques années plus tard de son premier long métrage La Pointe courte avec Philippe Noiret et Silvia Montfort.
Cette année encore, l’expérimentation traverse le champ des expositions et des thématiques. Avec le scrapbook dont l’origine de la pratique anglo-saxonne mêle la tradition de l’album photo au journal intime pour prendre une forme très cinématographique, mais également par la manipulation du médium photographique de Zofia Kulik qui vient construire une nouvelle identité féminine, pleine de symboles. Aux confins de l’expédition et de l’expérience des premiers inventeurs, Roberto Huarcaya convoque dans une pratique nocturne la technique du photogramme pour jouer de nos sens dans la représentation de la forêt tropicale péruvienne pendant que Juliette Agnel nous invite au mystère de nos origines dans les cryptoportiques, lieu antique et magique, investi pour la première fois cette année par le festival.
Et pour finir une exposition, non moins importante dans la poursuite de la représentation de la création féminine, qui convoque les pays nordiques et la découverte d’une scène méconnue, de l’après-guerre à l’époque contemporaine, où une réflexion sur la relation que l’État providence a entretenue avec une certaine idée de la sororité [Søsterskap] se déploie au travers des regards de 18 photographes. Cette année, c’est l’artiste finlandaise Emma Sarpaniemi, qui signe l’affiche du festival avec son autoportrait, à retrouver à l’église Sainte-Anne.
Les Rencontres d’Arles font cette année encore la part belle à l’émergence avec l’exposition Une attention particulière, réunissant l’oeuvre photographique de trois étudiants de l’École nationale supérieure de la photographie, et le Prix Découverte Fondation Louis Roederer à l’église des frères Prêcheurs, écrin du magnifique travail sur la scène du grand Sud proposé par la commissaire Tanvi Mishra, qui nous ouvre de nouveaux horizons de Kolkata au Caire, en passant par Dhaka.
Avec Aurélie de Lanlay, et toute l’équipe du festival, nous vous attendons pour vous faire découvrir l’ensemble de la programmation, dès le 3 juillet à Arles.

Christoph Wiesner

Dates

Juillet 3 (Lundi) 21 h 00 min - Septembre 24 (Dimanche) 6 h 00 min(GMT-11:00)