Septembre, 2020

Miguel Rio Branco

mer16sep(sep 16)12 h 00 min2021dim14mar(mar 14)19 h 00 minMiguel Rio BrancoŒuvres photographiques 1968-1992LE BAL, 6, Impasse de la défense 75018 Paris

Détail de l'événement

« Seul un petit nombre d’entre nous, au milieu des grands agencements de cette société, se demande encore naïvement ce qu’ils font sur le globe et quelle farce leur est jouée. Ceux-là veulent déchiffrer le ciel ou les tableaux, passer derrière ces fonds d’étoiles et ces toiles peintes, et comme des mioches cherchant les fentes d’une palissade, tâchent de regarder par les failles de ce monde. »
— George Bataille

LE BAL présente le travail photographique de la première période (1968-1992) de l’artiste brésilien Miguel Rio Branco, figure majeure de l’art contemporain dans son pays, connu dans le monde entier pour ses installations et oeuvres multimédias.
De ses débuts en noir et blanc à New York en 1970, où son attention se porte sur les quartiers déshérités de la ville, à son travail couleur essentiel réalisé au Brésil notamment à Salvador de Bahia, jusqu’aux images du Mexique au milieu des années 1980, l’exposition restituera l’évolution de son regard photographique, intrinsèquement lié à sa pratique picturale.
« Je ne suis pas un coloriste comme Matisse, ma vision est plus sombre, à la manière de Goya » dira Miguel Rio Branco.
Dépassant une simple lecture formelle de son travail, le choix des oeuvres – pour la plupart tirages d’époque jamais exposés en France – mettra en avant les télescopages permanents de matières et de gestes opérés dans ses images. Auscultant les corps et leur inscription dans l’espace, rendant visibles les marques du temps et des structures sociales, ses images rendent compte d’une vision viscérale immergée dans la noirceur et la violence de son temps.

LE COUTEAU PAR TERRE
EXTRAITS DU TEXTE INÉDIT DE JEAN-PIERRE CRIQUI PUBLIÉ DANS LE LIVRE QUI ACCOMPAGNE L’EXPOSITION.

Dans la mesure où elle découpe à même le vivant, la photographie se laisse envisager comme étant d’ordre sacrificiel :
tel un papillon épinglé, ce qu’elle prélève est toujours simultanément exalté et immolé. Il y va du sauvetage, de la sauvegarde, mais aussi de la conjuration ou de la perdition. Cette tension extrême, en permanence au bord du déchirement, hante les images de Miguel Rio Branco. C’est leur basse continue.
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Les photographies de Miguel Rio Branco (qui est aussi peintre, et l’a été avant de devenir photographe) nous proposent un vaste catalogue de matières, assemblé avec un oeil sensible à la transmutation esthétique des motifs les plus humbles ou les plus vils. On pense ici à Baudelaire et son évocation du chiffonnier dans Les Paradis artificiels : « Tout ce que la grande cité a rejeté, tout ce qu’elle a perdu, tout ce qu’elle a dédaigné, tout ce qu’elle a brisé, il le catalogue, il le collectionne. Il compulse les archives de la débauche, le capharnaüm des rebuts. » L’excès est ce qui caractérise ici la matière – d’où cette « asphyxie » dont Miguel Rio Branco a parlé au sujet de la photographie : excès de la vie qui s’agite en tous sens, et de la mort au travail qui en forme l’inséparable envers.
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Apothéose des sols, les photographies de Miguel Rio Branco regardent plus volontiers vers le bas que vers le haut. Peu de ciels ou d’horizons dans ces vues où la terre attire tel un aimant, jusqu’à l’engloutir, tout ce qu’elle supporte. Royaume des traces et des ombres, plaque sensible où le temps laisse inlassablement son empreinte : deux hommes s’y étreignent, lutte ou jeu, aux pieds d’un troisième qui projette sur eux sa silhouette; les déchets les plus dérisoires, les plus mirifiques, y convergent; les imprimés viennent s’y disperser en masse, les animaux y mourir. Le sol célébré par Miguel Rio Branco exhale toujours un avant-goût du séjour des disparus. C’est le lieu par excellence de l’inquiétude, voire de l’affolement. C’est aussi le motif où se concentre un éventail de résonances esthétiques : Dirt Painting et Combines (par leur goût du rebut et de l’horizontalité) de Rauschenberg, Matériologies et Texturologies de Dubuffet, plastiques, bois et tôles brûlés par Alberto Burri, scatter pieces de Robert Morris.
Jean-Pierre Criqui est conservateur au service des collections contemporaines du Musée national d’art moderne.

Dates

Septembre 16 (Mercredi) 12 h 00 min - Mars 14 (Dimanche) 19 h 00 min(GMT+00:00)

LE BAL6, Impasse de la défense 75018 ParisLE BAL est une plateforme indépendante d’exposition, d’édition, de réflexion et de pédagogie, dédiée Mercredi 12h - 22h Nocturne. Jeudi 12H - 19H Soirées BAL LAB 20H-22H (Fermeture de l'exposition à 19H) et le Vendredi, samedi, dimanche 12H - 19H. Fermé le Lundi et Mardi