Septembre, 2024

Nicolas Baghir

sam28sep(sep 28)14 h 30 min2025dim05jan(jan 5)18 h 00 minNicolas BaghirPerturbations photographiques - Images-mémoiresPalais du Roi de Rome, Pl. du Roi de Rome, 78120 Rambouillet

Détail de l'événement

Paysages calcines, formes emergentes, figures refletees, troublees, presque noyees : chez Nicolas Baghir, la realite semble s’absenter dans l’image pour mieux faire apparaitre ce qui la hante : spectres, destruction, esprits. Une brume tenace, une lumiere rasante ou un reflet tremblant saisissent un mouvement de luciole : apparition – disparition, apparition – disparition. L’artiste se situe deliberement loin du realisme auquel on reduit souvent la photographie. Il en fait un art de l’illusion pour mieux rejoindre des ecarts, une etrangete, des fissures : en entrant dans ces interstices entre deux mondes, on accede autrement au reel, a sa blessure, a sa beaute.
Nicolas Baghir invente des techniques pour transformer la matiere, des dispositifs optiques pour demultiplier les chambres, pour augmenter les possibilites de l’œil, agrandir la retine. Certains phenomenes visuels sont spectaculaires, d’autres tenus, presque secrets. Mais toujours ils mettent la photographie en exces, la font deborder du cote de la peinture, de l’abstraction, de la couleur pure, du theatre d’ombres. Ils emettent des signes, une pensee anterieure a l’image.
Le point commun entre les Perturbations numeriques (PN # et PNC #) et les Passeports (PP #) c’est que Baghir y place quelque chose – un modele, un paysage, une image – dans la glace. Pour les Perturbations, une photo est prise dans un bloc de glace, puis grattee, creusee, jusqu’a faire apparaitre une image en train de fondre, mais qu’il faut alors fixer par une seconde photographie, a l’instant meme ou elle pourrait disparaitre ou perdre sa forme. Pour les Passeports, une vitre en plexiglas est apposee sur une peinture – une toile sans cesse recyclee et repeinte – et le sujet vient y incruster son reflet. L’œil photographique cree l’image a partir des effets les plus troubles, ou les plus troublants, de la composition. Le sujet n’est jamais frontal meme lorsqu’il parait nous regarder ; il est toujours de cote ou derriere, ce qui supprime l’effet de « male gaze » tout en inscrivant le surgissement d’un etre de passage, dont on ne sait pas toujours a quelle epoque ou a quel monde il appartient.
Les images-memoires ainsi produites ne sont pas des images-miroirs. Elles disent quelque chose de la vitrification du souvenir, qui revient transforme par le temps qui passe, parfois sur le point de fondre, et que l’on voit passer en mouvement dans la composition. L’image-memoire est une image-temps : elle fixe un passage ou le sujet s’absente sans mourir pour autant.

Tiphaine Samoyault / Autrice et universitaire

Dates

Septembre 28 (Samedi) 14 h 30 min - Janvier 5 (Dimanche) 18 h 00 min(GMT+00:00)