Septembre, 2025

Arno Brignon

jeu25sep(sep 25)14 h 00 minsam20déc(déc 20)18 h 30 minArno BrignonUsThéâtre de la vignette - Université Paul Valery, Av. du Val de Montferrand, 34199 Montpellier

Détail de l'événement

Arno Brignon au Pays du Twin Peaks

Au terme de trois années d’allers-retours aux Etats-Unis, le photographe envoie promener le mythe et s’attache à pénétrer une Amérique profonde marquée par la disparition du lien social.

Ce qui est formidable chez Arno Brignon, photographe toulousain de 47 ans, c’est qu’il nous embarque dans un récit de voyage qui est aussi familial, introspectif, imprgrégné des réminiscences enfantines de l’absence du père. Et l’on est autant touché par sa photographie que par son journal de bord très, très bien écrit.

Il y a trois ans, Arno Brignon projette « un road-trip symbolique aux Etats-Unis pour parler de cette société aux parfums post-démocratiques, à ce moment où populisme et technocratie semblent s’affronter un peu partout en Occident. Regarder ce pays né des colons venus d’Europe qui en ont chassé les autochtones, c’est nous regarder aussi, écrit-il, tant nos liens sont forts et tant nos Etats sont unis pour le pire et le meilleur ».

Arno Brignon a choisi de faire étape dans 12 villes américaines éponymes des capitales historiques européennes : Amsterdam, Copenhagen, Berlin, Lisbon, London, Dublin, Brussels, Luxemburg, Rome, Athens, Paris, Madrid. Mais dans le pays le plus photographié au monde, ces villes de l’intérieur se révèlent in situ « banales, intimes, fragiles, menacées par le vide et la disparition ».

Là, des bâtisses victoriennes en bois effondrées sur elles-mêmes depuis la crise des subprimes. Des fruits sans goût vendus 8 dollars, des cartouches 38., 15 dollars. Ici, la grande surface Walmart et la boutique amich. Fox News qui tourne en boucle. Au pays des élans et des parcs naturels, un camping pour pauvres dans une station de ski abandonnée. Dans le Sud, du côté d’Athens, l’héritage confédéré. Partout, l’humain a disparu de l’espace public et, avec lui, le lien social. « Je n’arrive toujours pas à aimer ce pays », avoue le photographe.

Parce qu’entreprendre un road trip aux Etats-Unis, après le photographe Robert Franck, le cinéaste Wim Wenders, les écrivains Jack London et Jack Kerouac, n’a rien d’original, Arno Brignon se singularise : il utilise de vieux appareils photo, dont certains rendent l’âme, des pellicules périmées aux couleurs virées. Il envoie promener le mythe du photographe solitaire en partant avec femme et enfant adolescente, face au sentiment que son histoire d’amour « est comme happée par les trous noirs de ses absences »… Dans cette ambiance à la Twin Peaks, il nous fait partager sa peur de produire un mauvais plagiat, son sentiment d’imposture, écartelé qu’il est entre devoirs familiaux et injonctions photographiques.

La magie de l’argentique opère et fait harmonieusement cohabiter impressions de voyage et photos de famille. « US est devenue us », conclut Arno Brignon, qui estime finalement que « l’enchantement est à chercher en nous, le road trip n’étant en fait qu’un huis clos en mouvement, une introspection partagée où atteindre n’est pas le but ».

Magali Jauffret

Dates

25 Septembre 2025 14 h 00 min - 20 Décembre 2025 18 h 30 min(GMT-11:00)

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