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Nyima Marin : L’Adieu du Minotaure, sur les traces des origines

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La couverture est sobre. Seule une typographie en capitale bleue sur un fond jaune clair, laisse apparaître le titre mystérieux « L’Adieu du Minotaure ». Le photographe Nyima Marin signe ici son tout premier ouvrage, publié en auto-édition et dévoilé à la Fab. en décembre dernier. Ce travail s’inscrit dans une recherche introspective où se mêle procédé alternatif de tirage, mythologie et poésie. De sublimes images en cyanotype se succèdent au fil des pages à la recherche d’un monde des origines effacé par le temps.

Nyima Marin est né en Crète, en 1987. Il entame cette série à 30 ans avec le soutien du fonds de dotation agnès b., sur trois années, il se rend à trois reprises dans son pays natal pour partir dans une quête. Comme pour distancier son propos, il choisi un procédé ancien pour la réalisation de ses tirages : le cyanotype. Ce bleu qui n’est pas sans rappeler la mer Méditerranée et qui nous enveloppe subtilement dans une monotonie intrigante. Paysages, fragments de la faune et de la flore entrecoupés par des poésies, font planer l’ombre du Minotaure.

Ces dernières années, j’ai éprouvé une profonde nécessité de partir à la recherche du monde des origines. Je suis donc retourné en Crète, lieu de ma naissance, à la poursuite d’images primaires, de souvenirs communs. J’ai photographié comme on poserait les vitres d’une fenêtre vertigineuse suspendue au-dessus du temps, et à travers laquelle je me serais laissé tomber jusqu’au fond des âges, là où la pierre préserve notre mémoire. Au cours de ce plongeon extatique, je suis devenu cet enfant qu’on allait séparer de sa terre natale, je suis devenu l’un de ces minoens emportés par les eaux, je suis devenu Adam foulant le sol du Paradis perdu, et aussi ce monstre solitaire attendant son libérateur, au fond d’un couloir rocheux. Je me suis alors senti infiniment proche de cet être hybride, de cet être archaïque prisonnier de sa condition. Il devenait le symbole d’une jonction originelle entre hommes, bêtes et dieux, le symbole d’un retour à l’unique et mystérieuse vibration d’avant le langage, comme l’était cet enfant d’un an posé parmi les pierres. Progressivement, derrière le bleu pétrifié des cyanotypes, sont apparues les traces d’une errance intemporelle et pathétique, comme le dernier adieu du Minotaure à son labyrinthe déserté, celui de l’homme que je suis devenu à son berceau minéral, à cette île engloutie où sous la lumière des premiers matins du monde, dans un cri bestial, tout a commencé.

Photographe, Nyima Marin (1987), vit et travaille dans la région parisienne. C’est en 2009, suite à des études supérieures de physique, en Italie, qu’il entre à l’ENS Louis Lumière et s’installe à Paris. Parallèlement à un travail régulier de commande, il poursuit depuis une exploration des ambiguïtés et des possibilités narratives propres au médium photographique. En 2017, il est sélectionné pour la résidence Planche(s) Contact à Deauville, où il présente sa série « Le souvenir des marins », dont les tirages font maintenant partie de la collection du nouveau musée Les Franciscaines. En 2021, il expose successivement aux Beaux-Arts de Paris et au festival international de photographie InCadaqués, où il montre son dernier projet « L’Adieu du Minotaure », réalisé en Crète, sa terre natale, et premier volet d’une recherche mélangeant poésie, procédé alternatif de tirage, mythologie méditerranéenne et histoire familiale.

INFORMATIONS PRATIQUES
L’Adieu du Minotaure
Nyima Marin
20 x 28 cm, 112 pages (39 photographies couleur, 9 poèmes)
Couverture rigide avec marquage à chaud
Papier Arena Natural Rough 140g
ISBN : 978-2-9583825-0-6
38 euros
https://www.nyimarin.com/

Ericka Weidmann
Après des études d'Arts Appliqués et de photographie, elle rejoint un magazine en ligne consacré à la photo en tant que directeur artistique, poste qu'elle occupera pendant 10 ans. En 2010, elle s'installe comme DA en indépendant. En parallèle, elle devient responsable éditorial pour Le Journal de la Photographie et c'est en septembre 2013 qu'elle co-fonde le quotidien L’Oeil de la Photographie pour lequel elle est rédactrice en chef jusqu'en septembre 2016 avant de fonder 9 Lives magazine ! Ericka Weidmann est également journaliste pigiste pour d'autres médias.