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Pour sa quatrième carte blanche, notre invitée de la semaine – l’historienne de la photographie, attachée de conservation au cabinet de la photographie du Centre Pompidou et curatrice – Damarice Amao, en charge de la programmation de l’Été photographique de Lectoure, qui ouvre ses portes le 12 juillet, propose un éclairage sur le déménagement de la collection de photographies du MNAM, en amont de la fermeture du Centre Pompidou pour travaux. Un chantier d’envergure. Avant cette coupure, d’une durée d’au moins 5 ans, le musée a donné carte blanche au photographe allemand Wolfgang Tillmans. Son installation est visible tout l’été, jusqu’au 22 septembre.

Le déménagement de la collection de photographies du MNAM

Le début du déménagement de notre collection et le vernissage d’une dernière exposition dédiée au travail du photographe allemand Wolfgang Tillmans : ce mois de juin 2025 est un moment important, et je dois le dire plein d’émotions pour le département des collections de photographies du Musée National d’art Moderne. J’y travaille depuis 2008 d’abord en tant que stagiaire, puis comme chercheuse associée en thèse, comme assistante de conservation et aujourd’hui comme attachée de conservation. Cela représente près de 17 ans passés auprès de mes collègues, encore en poste ou parti·es, à comprendre, à prendre soin, à valoriser, à enrichir une collection de près de 45 000 épreuves et 60 000 négatifs, couvrant l’histoire de la photographie du 20e et 21ème siècles.

Alors que le bâtiment emblématique du Centre Pompidou doit fermer ses portes pour travaux pendant au moins 5 ans, nous travaillons en ce moment au transfert historique de notre collection de photographies. Celle-ci va rejoindre des réserves temporaires avant de s’installer définitivement dans quelques années dans le pôle francilien de recherches et de conservation du Centre Pompidou, en cours de construction à Massy. En attendant, depuis des semaines et même des mois, on pointe, on revérifie, on range, on cale, on documente, on indexe, on s’abîme les yeux sur des listes Excel et notre base de données.

Chacune de ces tâches s’accompagne, notamment pour moi, d’une immense nostalgie inhérente j’imagine, à tout déménagement. Quitter la réserve, c’est revivre une grande partie de mon histoire avec la photographie : l’émerveillement partagée avec mes collègues devant des chef-d ’œuvres de notre collection, des périodes intenses de travail d’inventaire et de marquage des œuvres, la rencontre avec des artistes et des professionnel·les et chercheur·ses du monde entier, entre autres.

La carte blanche donnée à Wolfgang Tillmans à la Bibliothèque Publique d’information (BPI) du Centre Pompidou avec le concours de mes collègues et commissaires Florian Ebner, Olga Frydryszak-Rétat et Matthias Pfaller, s’accompagne d’un même sentiment de mélancolie. Là encore le temps défile. D’abord à travers cette rétrospective de l’artiste allemand qui invite sur près de 6000 m2 à une plongée inédite dans ses archives et dans son œuvre défiant toute catégorisation stricte de genre et de médium : du documentaire, au portrait en passant par l’abstraction mais également le film et la musique.
En épousant l’architecture originelle et en intégrant l’ancien mobilier (une pensée à notre scénographe Jasmin Oezcebi), l’exposition nous confronte à la mise en pause de cette utopie que fut la BPI, créée en 1977 en tant qu’espace de savoirs gratuit, libre et partagé au centre de Paris. Une page se tourne sur le lieu même où a commencé mon histoire avec le Centre Pompidou – à la fois en tant que lectrice et vacataire de rangement des étagères de livres aujourd’hui complètement vides. Tout nous y préparait, Rien ne nous y préparait…