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Chaque semaine, dans notre édition du jeudi, nous partageons avec vous des appels à candidatures, ils sont d’ailleurs tous recensés dans notre page dédiée (accessible ici), qui est la rubrique la plus consultée de notre média. Nous passons beaucoup de temps à filtrer les appels abusifs et vous êtes nombreux à nous partager des situations de plus en plus graves. Nous avons décidé de rédiger un court article pour dénoncer les méthodes qui participent à paupériser le métier de photographe, pour que chacun·e puisse rester vigilant.

Le plus courant, ce sont les appels à candidatures qui demandent des frais de participations délirants, il existe de nombreux concours qui vous demandent de payer une somme pour chaque image soumise (et vous promettent le succès et la gloire). Évidemment, vous êtes des êtres intelligents et vous ne tombez pas dans le panneau, mais souvent, il faut lire le règlement en détail pour découvrir les aberrations qui sont exigées aux photographes : produire eux-mêmes leur exposition, se déplacer et se loger à leur frais, faire de la médiation gratuitement – en échange de visibilité ! … Bref, les situations sont toutes plus réjouissantes les unes que les autres. L’autre jour, je suis tombée sur un appel à candidatures (payant bien entendu) pour avoir la chance d’exposer dans les Pyrénées-Atlantiques et vendre ses tirages. Jusque-là, rien de trop grave. Mais en lisant le règlement, on s’aperçoit que le photographe ne touche que 25% du montant des œuvres vendues… Ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres croyez-moi…

On le sait aujourd’hui, les prix, bourses et résidences… permettent à un grand nombre de photographes de pouvoir financer des projets, se rembourser des travaux déjà réalisés ou pouvoir vivre tout simplement. Cela représente une source de rémunération non négligeable. Alors comme souvent et comme partout, naissent des organisations peu scrupuleuses. Une tout particulièrement celle des sociétés qui organisent un concours pour choisir le ou la lauréate qui aura la chance ultime de réaliser une commande photographique pour la marque. Bien évidemment le montant est bien inférieur à celui qu’aurait dû payer ladite société et se dispense de régler toutes cessions de droit pour l’utilisation de ces photos.

Ainsi, il y a quelques jours, nous avons reçu de la part d’une agence de communication parisienne payée par une entreprise internationale pour relayer un appel à candidatures dédié à la jeune création (censée être plus naïve on imagine). Pour répondre à cet appel il faut être diplômé·e d’une école d’art ou de photo (pour s’assurer d’un minimum de qualité on suppose). L’appel est gratuit, la commande est rémunérée et même les cessions de droit sont prévues (sur ce point, aucun montant n’est communiqué cependant). Alors quel est le problème me direz-vous ? C’est qu’aujourd’hui des grands groupes, des grandes marques internationales qui ont les moyens choisissent des photographes étudiants ou sortant d’écoles pour réaliser leurs visuels de communication à bas coût (jusqu’à 5 fois moins cher, parfois plus !). Ils profitent de leur manque d’expérience et de connaissance des prix pratiqués pour de telles prestations. Certains ont bien compris l’intérêt, en font même leur business et se rendent directement dans les écoles pour proposer aux étudiants des collaborations pour lesquelles ils·elles sont fier·es de participer et c’est bien normal.
Mais le plafond de verre semble s’abaisser de plus en plus sur la tête des photographes. L’étude du CLAP sur la rémunération des photographes publiée récemment révèle que la situation est critique et ce genre de phénomènes grandissants ne fera que porter plus vite le coup fatal…

À LIRE
Le CLAP vient de publier sa nouvelle étude sur la rémunération des photographes

 

Ericka Weidmann
Après des études d'Arts Appliqués et de photographie, elle rejoint un magazine en ligne consacré à la photo en tant que directeur artistique, poste qu'elle occupera pendant 10 ans. En 2010, elle s'installe comme DA en indépendant. En parallèle, elle devient responsable éditorial pour Le Journal de la Photographie et c'est en septembre 2013 qu'elle co-fonde le quotidien L’Oeil de la Photographie pour lequel elle est rédactrice en chef jusqu'en septembre 2016 avant de fonder 9 Lives magazine ! Ericka Weidmann est également journaliste pigiste pour d'autres médias.

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