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Artcurial a fêté ses 20 ans en 2022 avec des résultats record : 216,5 millions d’euros de ventes. Le groupe, est composé outre de la Maison de vente située Hôtel Dassault au Rond-Point des Champs Elysées, de ses filiales : Arqana (chevaux de course) , John Taylor (groupe immobilier de luxe) et depuis peu de Next Yachting (yachts d’exception).  Stéphane Aubert, Responsable du Département Inventaires et Collections & Directeur associé, analyse les raisons de ce succès dans la durée, tout en regardant vers l’avenir autour du développement des NFT et des ventes dédiées à l’émergence selon l’évolution du goût des collectionneurs.

Portrait Stéphane Aubert

Alors que la Monaco Auction Week (Joaillerie, Horlogerie de Collection, et Hermès & Luxury Bags) a récemment totalisé près de 7,5M€, il souligne l’augmentation et le rôle de plus en plus décisif joué par les collections et l’histoire associée à chacune d’entre elles. Il a répondu à mes questions alors que la vente emblématique Rétromobile 2023, un temps fort  dans l’agenda d’Artcurial, a été un succès pour les amateurs de sportives légendaires.

Artcurial le bilan 2022 record : quelles raisons selon vous expliquent-elles un tel succès ?

Nous avons fêté notre meilleure année depuis la création avec en guise de cadeau d’anniversaire ce chiffre record. Ce résultat s’explique par notre savoir-faire et le modèle défendu par Artcurial. De nombreuses collections privées nous ont été confiées, 118 au total, un segment que j’ai beaucoup développé. Les amateurs et collectionneurs sont très friands de ces collections qui ont une histoire, une âme : de leur propriétaire ou des lieux. C’est aujourd’hui ce qui est le plus recherché.

Nous avons aussi eu 39 enchères record comme ‘‘le Panier de Fraise des bois’’ de Jean-Siméon Chardin pour 24 381 400 € ou Pierre Soulages, peinture de 1959 pour 2 718 100 €. Toutes les spécialités ont performé, ce qui reflète un marché de l’art très fort et résistant jusqu’à apparaitre comme une valeur refuge.

La Monaco Auction Week : des résultats exceptionnels

Les trois cessions et 5 ventes exceptionnelles ont été un grand succès avec de nombreux records pour les montres et les bijoux témoignant du grand intérêt des collectionneurs monégasques ou établis à Monaco pour ces secteurs, quel que soit le contexte mondial.

Quelle évolution remarquez-vous en ce qui concerne les goûts, les attentes des collectionneurs ?

Comme je viens de le souligner, les collectionneurs recherchent avant tout un pédigrée, une provenance. Face à une œuvre exceptionnelle des critères comme l’appartenance et la transmission  sont des facteurs devenus encore plus décisifs, si l’on compare avec le passé. Nous constatons que la provenance d’une oeuvre rassure les collectionneurs.

Et en ce qui concerne la part variable de chacun de vos pôles ?

En ce qui concerne la répartition des pôles ils sont assez stables, la partie Fine Arts et Automobiles de collection étant à parité à hauteur de 28%, les Arts du XX et XXième siècle dominant avec 31%.

Comment vous positionnez-vous vis à vis du phénomène Blue chips ?

Nous avons souhaité développer des premières ventes intitulées Génération 21 face à une demande d’une nouvelle génération de collectionneurs pour un art de leur temps. Nous souhaitons aussi à travers ce biais nous positionner vers l’avenir pour accompagner ces nouveaux acheteurs.

Les NFT : nouvel eldorado des ventes aux enchères ?

Nous avons fait notre première vente de NFT l’année dernière à Cannes avec un franc succès et nous allons poursuivre dans cette voie. C’est aussi un secteur qui intéresse de nouveaux acheteurs, de nouveaux collectionneurs même s’il s’est révélé très spéculatif sur certaines œuvres l’année dernière mesurant avec les crypto-monnaies à quel point ces nouveaux marchés peuvent être volatils. Nous allons bien entendu être très réactifs sur ce secteur dans les années en proposant un véritable accompagnement.

Responsable du département Inventaires & Collections, quel est votre rôle au quotidien ?

J’ai créé ce département chez Artcurial où j’ai fait l’ensemble de mon parcours avec l’idée d’être la première porte d’entrée quand on décide de vendre aux enchères. J’ai à la fois un rôle de conseil lors d’arbitrages, certaines successions se révélant complexes ou d’accompagnement dans le processus de vente aux enchères aux cotés de tous les spécialistes et experts chez Artcurial. Les biens ne vont pas toujours nécessairement à la vente. Je suis comme le premier œil dans un appartement, un château, une demeure. C’est assez excitant d’être à la fois en première position avec les collectionneurs et en tant qu’acteur au marteau lors des ventes aux enchères.

Quels défis vous attendent-ils à court et moyen terme ?

Nous sommes toujours à l’affut de futurs développements, les oreilles et les yeux grand ouvert pour développer notamment nos bureaux de représentation en Europe. Cela fait partie des défis de ces prochains mois, ces prochaines années. Nous cherchons aussi à développer toujours plus notre rôle de conseil auprès des collectionneurs, notre objectif étant de pouvoir orchestrer ces ventes avec le meilleur accompagnement et savoir-faire possible en amont de la vente. Montrer la collection dans son meilleur écrin possible chez Artcurial à l’hôtel Dassault nous permet de pouvoir recréer l’univers du collectionneur. C’est une autre facette de notre métier tout aussi passionnante lors des expositions qui précèdent la vente autour de ce qui ressemble à un véritable musée éphémère. Pour une dernière fois nous pouvons montrer une collection avant sa dispersion à travers le monde, ce qui est toujours assez émouvant.

Artcurial a élargi ses activités dans l’immobilier de prestige, les yearlings et les yachts de luxe : pourquoi comment ?

En effet et ce sont des métiers d’intermédiation qui sont assez proches avec des clients de même profil. Ces synergies que nous mettons en œuvre tous les jours aux côtés de nos confrères.

Question plus personnelle : quel a été le déclic pour décider de faire de l’art un métier ?

J’ai toujours beaucoup aimé l’histoire en lien aussi avec celle des objets. Le métier de commissaire-priseur est un métier chargé d’histoire.et c’est pourquoi j’aime aussi m’y consacrer. Je vous parlais précédemment des provenances, de la transmission des objets, des motivations qui animent un collectionneur, il est toujours question de cette même histoire que nous racontons. C’est pourquoi nous accordons beaucoup d’importance dans nos catalogues à cette dimension, au moins aussi décisive que l’objet lui-même. C’est dans doute l’une des raisons pour laquelle j’ai choisi d’exercer ce métier.

Marie-Elisabeth De La Fresnaye
Après une formation en littérature et histoire de l'art, Marie de la Fresnaye intègre le marché de l'art à Drouot et se lance dans l'événementiel. En parallèle à plusieurs années en entreprise dans le domaine de la communication éditoriale, elle créé son blog pour partager au plus grand nombre sa passion et expertise du monde de l'art contemporain et participe au lancement du magazine Artaïssime.

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