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Le torchon brûle entre la direction et les enseignants & les étudiants de l’École nationale supérieure Louis-Lumière. Le 15 février, nous partagions la pétition pour dénoncer le démantèlement de l’établissement basé à la Cité du Cinéma à Saint-Denis (93), quelques jours plus tard, la direction avait tenue à s’expliquer dans nos colonnes pour faire un démenti des arguments de la dite pétition. Aujourd’hui, c’est au tout de l’intersyndicale de l’ENS-Louis-Lumière de répondre publiquement à ce droit de réponse… Espérons qu’une issue favorable puisse advenir pour sauver cet établissement public qui forme aux métiers de la photographie et du cinéma.

« Halte à la désinformation » est le slogan qu’a repris notre direction pour s’opposer à la pétition lancée par un groupe d’étudiante·s et d’enseignant·e·s.

Or, il s’agit bien de l’enjeu essentiel de la pétition : informer et alerter sur la réalité des faits et des projets en cours à partir d’éléments factuels. Les arguments avancés sont étayés (contrairement au qualificatif « fantaisiste ») :

Le bail signé par l’école indique que « la surface retenue pour la facturation des loyers des locaux est de 7 736 m2 de « surface utile » (p.5), chiffrage repris dans l’arrêt n°213-742 de la Cour de discipline budgétaire et financière de la Cour des comptes.

En octobre 2020, ils se sont transformés en « environ 7 128 m2 », dans une étude réalisée par une société de conseil. Quant à l’échéance du bail, parlons-en : annoncée pour 2021, puis pour 2024, elle est en réalité fixée à novembre 2027…

Du provisoire au définitif, le déménagement sur quatre sites

Un discours fluctuant au fil du temps :

• début septembre 2022 (il y a 6 mois), la direction évoquait un projet de lieu encore hypothétique ;

• puis en octobre 2022, l’ancien site d’Eicar s’est imposé pour une surface d’accueil de 2 500 m2 ;

• mi-novembre, une extension possible de quelques centaines de m2 dans les sous-sols de la MSH Paris Nord était envisagée, ainsi qu’une location de studios et de bureaux connexes ;

• 25 janvier : le déménagement est annoncé comme définitif…

• 6 février : mise en ligne de la pétition sur change.org, adressée à la Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ;

• 13 et 14 février : les deux AG organisées par les étudiant•e•s permettent enfin des visites des locaux.

• Vendredi 17 février, miracle : lors de la première visite organisée, est annoncé par le bailleur, un nouveau bâtiment viendrait s’ajouter aux autres, mais ne sera disponible qu’ultérieurement. Ce qui permettrait d’afficher dorénavant un peu plus de 5 500m2 (le montant de 1,9 million TTC comprend-il les charges ?).

• 21 février : le déménagement définitif redevient provisoire… nouvelle prise de décision du chef d’établissement et du Ministère de l’enseignement supérieur et la recherche : en 2033, l’école sera ré-installée sur un site unique et domanial sur le Campus de la Cité Descartes à Champs sur Marne.

Urgence et improvisation

L’urgence et le retard pris à ce stade posent réellement la question de la maîtrise d’un dossier aussi important et de son corollaire, la faisabilité et la qualité des installations techniques qui devront être reconstruites dans le(s) futur(s) lieu(x) d’accueil. D’ailleurs, que deviendront les installations actuelles financées par l’argent public (2 plateaux, post-production film, studios de mixage et enregistrement, studios de prise de vues photo, salle de cinéma, etc.) ? Et les nouvelles de 2024, en attendant celles, définitives, de 2033 ?

Devant une telle improvisation, comment ne pas s’inquiéter, d’autant que la direction communique sur une installation attractive sur le Campus Condorcet alors que les nouveaux lieux sont en majorité situés en dehors.

Côté formations, après les chiffres, il s’agit de jouer avec les mots. Sans concertation avec les enseignante·s, la direction de l’ENS Louis-Lumière a bien déposé un projet pour La Fabrique de l’image. France 2030, dans lequel le Master of Science and Technology figure expressément, en partenariat avec l’école Polytechnique, Telecom et Telecom Sud Paris, formation majoritairement en anglais, payante ou gratuite, ou bien encore à tarif préférentiel pour les étudiante·s des écoles partenaires publiques et privées. Ce master qui délivrerait un joint diploma, figurerait donc bien dans l’offre de formation de l’ENS Louis-Lumière. Il n’est pas destiné aux seule·s étudiante·s étrangere·s disposant de 16000 euros.

Notre démarche procède d’une vive inquiétude face aux informations contradictoires et improvisées. Le démenti de notre direction ne répond pas à notre besoin de réponses claires et adaptées. Il confirme à la fois nos craintes pour l’avenir de l’école, la volonté de stigmatiser le corps enseignant et d’infantiliser les étudiante·s.

La lectrice ou le lecteur avisé·e saura faire la différence.

Droit de réponse de l’intersyndicale de l’ENS-Louis-Lumière
CGT FERCSup – FOESR – SNESup – SUP Recherche – SUD Education – UNEF (ENS Louis-Lumière)

A LIRE
Pétition contre le démantèlement de l’École nationale supérieure Louis-Lumière
Droit de réponse de la direction de l’École nationale supérieure Louis-Lumière

Photo de couverture : École technique de photographie et de cinématographie (ETPC), 85 rue de Vaugirard (Paris), années 30 © ENS Louis-Lumière

Ericka Weidmann
Après des études d'Arts Appliqués et de photographie, elle rejoint un magazine en ligne consacré à la photo en tant que directeur artistique, poste qu'elle occupera pendant 10 ans. En 2010, elle s'installe comme DA en indépendant. En parallèle, elle devient responsable éditorial pour Le Journal de la Photographie et c'est en septembre 2013 qu'elle co-fonde le quotidien L’Oeil de la Photographie pour lequel elle est rédactrice en chef jusqu'en septembre 2016 avant de fonder 9 Lives magazine ! Ericka Weidmann est également journaliste pigiste pour d'autres médias.

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