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En juillet dernier, il venait de souffler ses 95 bougies. Le 29 novembre dernier, Elliott Erwitt tirait sa révérence. Cette année, le photographe de l’agence Magnum a été particulièrement mis à l’honneur en France et en Europe, avec notamment la plus grande rétrospective jamais organisée au Musée Maillol à Paris, avant de jouer les prolongations à Lyon. En octobre, il est honoré par le prix Leica Hall of Fame Award et quelques jours avant sa mort, le 74e album RSF de la collection 100 photos pour la liberté lui est intégralement consacré. Retour sur cet infatigable curieux…

Tropicana Hotel, Las Vegas, USA, 1957 © Elliott Erwitt / Magnum Photos. Elliott Erwitt vit et travaille à New York, tout en ayant développé une large expérience personnelle et professionnelle des Etats-Unis. Il réalise de nombreux reportages dans des milieux et des contextes variés au gré de ses commandes. Dans cet Hôtel du Nevada, en 1957, il photographie une série sur les showgirls des spectacles de Las Vegas. Il saisit ces femmes dans leurs loges, maquillées et habillées pour la scène. Il n’hésitera pas à les montrer aussi à la porte de leur chambre d’un hôtel de bien moins bonne catégorie.

« En réalité, dire qu’il y a de l’humanité dans mes pho tos est le plus beau compliment qu’on m’ait jamais adressé. Si mes photos permettent aux gens de voir le monde d’une certaine façon, c’est certainement d’y voir les choses sérieuses de manière non sérieuse. » Elliott Erwitt

Jusqu’au 17 mars 2024, la Sucrière accueille la grande rétrospective d’Elliott Erwitt. L’occasion de revenir sur l’ensemble de l’œuvre du photographe qui balaye plus de soixante ans de carrière. Pour cette exposition, ce sont 215 photographies réalisées entre 1948 et 2010 qui ont été choisies avec soin dans une scénographie construite et pensée en étroite collaboration avec le photographe. Ce n’est qu’une infime partie de son travail puisqu’il laisse derrière lui près de 600.000 négatifs, mais ce parcours nous permet d’aborder plusieurs facettes de son œuvre à travers huit grandes thématiques. Des thèmes qui ont été définis par Elliott Erwitt lui-même, avec les intitulés dans leur original anglais. Dans cette exposition on distingue deux parties, les clichés en noir et blanc et ceux en couleur, qui répartissent respectivement ces photos personnelles et ces travaux de commande.
Le photographe, peu bavard sur son oeuvre, a souhaité des cartels réduits au stricte minimum avec pour seules informations la date et le lieu de la prise de vue. Un audioguide est disponible pour venir commente une quarantaine d’images.

USA. New York, New York. 1974. © Elliott Erwitt / Magnum Photo
Cette photographie de commande, prise à New York en 1974, reprend une thématique chère à Erwitt : les chiens et les jambes. Sollicité par une marque de chaussures, il prend sa première photographie de ce genre en 1946, partant d’un principe simple : il faut se mettre au niveau du regard du chien pour apprécier les chaussures. Ce sera d’ailleurs sa première photographie publiée. Elliott Erwitt considère que les chiens sont de parfaits modèles : « Ils sont partout. Ils sont habituellement sympathiques. Ils ne se plaignent pas. Et ils ne demandent pas de tirage. » Sur cette photo, Elliott Erwitt ajoute : « C’est un chien professionnel, un modèle payé. »

BETWEEN THE SEXES
Fasciné par ce qu’il appelle « the man-woman thing », riche d’une abondante expérience personnelle et, selon ses propres dires, d’un naturel « romantique », Erwitt n’a cessé de photographier des couples tout au long de sa carrière.

KIDS
Fils unique d’un couple remuant, lui-même père heureux d’une nombreuse famille, il aime les enfants au point d’en faire l’un de ses thèmes de prédilection.

BEACHES
La plage est pour Erwitt un petit théâtre de vie. À l’image de la ville, elle est le reflet des sociétés humaines qui la fréquentent.
On y retrouve les mêmes acteurs, mais, étant le lieu de toutes les xagérations, les individus tendent à surjouer leur personnage.

ABSTRACTIONS
Lorsque la nature et/ou l’activité humaine offrent des réalités surprenantes, à la limite de l’abstraction.

CITIES
Erwitt est un formidable photographe d’architecture, qui traite sesœ» bâtiments comme des personnes. Et il est aussi un grand peintre de scènes de rue.

DOGS
Si la gent canine en avait les moyens, elle dresserait une statue tt Erwitt, le photographe des chiens par excellence. Il en a tiré des milliers de clichés et leur a consacré trois livres. « Le point de vue du chien », comme il dit, l’intéresse.

REGARDING WOMEN
Erwitt a fait des femmes un sujet récurrent de ses photographies, un thème en soi : les femmes de sa vie, des femmes célèbres, des inconnues de tous âges et de toutes conditions, saisies dans une grande variété de situations.

MUSEUM WATCHING
Elliott Erwitt est fasciné par les musées, et davantage encore par les visiteurs que par les objets exposés. Sensible à la personnalité de chaque musée, il évoque la prétention de certains lieux et «œl’intimité accueillante » d’autres.

KOLOR
« Kolor » est un clin d’oeil au fondateur de Kodak, George Eastman, qui pensait que les mots commençant par K se retiennent plus facilement. En effet, nous voici dans le domaine de la couleur, c’est-à-dire, pour Erwitt, le domaine de la commande commerciale.

La rétrospective parisienne a réunit plusieurs dizaines de milliers de visiteurs, si vous l’avez raté ou si vous souhaitez la revoir, rendez-vous à la Sucrière jusqu’au printemps prochain !

Durant plus de six décennies, Elliott Erwitt aura posé son regard sur le monde avec l’humour et l’humanité qui le caractérisent. Éternel curieux, le photographe n’aura eu de cesse de capturer les moments de la vie quotidienne.

INFORMATIONS PRATIQUES

sam21oct(oct 21)10 h 30 min2024dim17mar(mar 17)19 h 00 minElliott Erwitt Une rétrospectiveUne rétrospectiveLa Sucrière, 49-50 quai Rambaud 69002 Lyon

Ericka Weidmann
Après des études d'Arts Appliqués et de photographie, elle rejoint un magazine en ligne consacré à la photo en tant que directeur artistique, poste qu'elle occupera pendant 10 ans. En 2010, elle s'installe comme DA en indépendant. En parallèle, elle devient responsable éditorial pour Le Journal de la Photographie et c'est en septembre 2013 qu'elle co-fonde le quotidien L’Oeil de la Photographie pour lequel elle est rédactrice en chef jusqu'en septembre 2016 avant de fonder 9 Lives magazine ! Ericka Weidmann est également journaliste pigiste pour d'autres médias.

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