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Pour sa quatrième et dernière carte blanche, notre invitée de la semaine, la commissaire d’exposition indépendante, Béatrice Andrieux, nous dévoile la première exposition de Corinne Mercadier à la galerie Binôme, qui ouvrira ses portes à Paris le 13 mai prochain. On y découvrira sa dernière série réalisée en 2022 et qu’elle intitule « La nuit magnétique », ses tirages seront exposés aux côtés de pièces uniques et d’une sélection de polaroids de la fin des années 80…

Corinne Mercadier, Glasstype 171 (ou 170) , Polaroid SX70, 10,7×8,8 cm, 1987

Corinne Mercadier, Glasstype 171 (ou 170) , Polaroid SX70, 10,7×8,8 cm, 1987

Pour sa première exposition à la galerie Binôme, je souhaitais évoquer les travaux inédits de Corinne Mercadier que je connais depuis longtemps et avec qui j’ai déjà collaboré comme commissaire. Elle a une formidable capacité à retravailler sur d’anciennes photographies pour réintroduire des formes et des objets tout en continuant sa pratique du dessin et de la peinture. Elle a dû tout réapprendre lorsqu’elle n’a plus pu utiliser le polaroid SX70, en se plongeant dans le numérique sans jamais oublier le geste du dessin. J’aime particulièrement sa manière de jouer avec la main du hasard pour nouvelle série La nuit magnétique et aussi les titres qu’elles donnent à ses séries ou à ses photos comme le  une fois et pas plus emprunté au poète Rilke ou bien les promontoires des songes à Victor Hugo légèrement modifié en Promontoire du songe.

Depuis de nombreuses années, Corinne Mercadier marque de son empreinte le paysage photographique contemporain. Par son approche unique et inventive, elle est passée de l’argentique au numérique avec le même souci de la précision, approche dans laquelle la place du dessin fait sens – dessins préparatoires, peintures sur verre, séries indépendantes. Les trois séries inédites exposées témoignent de sa création prolifique et de son imagination toujours en éveil pour articuler son espace mental à l’espace public où objets et rêveries contribuent tour à tour à fabriquer des tensions historiques.

Par-delà les références et les icônes qui l’accompagnent depuis ses débuts d’Etienne-Jules Marey connu pour ses travaux sur la décomposition du mouvement, de l’air notamment, et sur l’invention de la chronophotographie, à Francesca Woodman pour sa capacité à s’échapper du cadre, à se dissoudre dans ses mises-en-scènes, aux expérimentations de Berenice Abbott avec ses rebonds multiples d’une balle de golf, Corinne Mercadier compose une autre réalité où la photographie donne une image du temps et où le dessin sur la photographie précisément dans la série « Eternel retour », donne une image d’un temps caché, invisible, absurde, impossible.

C’est ainsi qu’elle imagine à la fin des années 80 ses « Glasstypes », des peintures sur verre, avec un hommage à l’Annonciation à Sainte-Anne de Giotto, qu’elle photographie au Polaroid SX70 sous différents angles dévoilant une autre architecture, un autre point de vue. Ces polaroids uniques, par leur va-et-vient entre la peinture et la photographie, illustrent l’écriture de Corinne Mercadier.

Corinne Mercadier, Love at first sight, série Éternel retour, dessin sur photographie,12,5×9 cm, 2020

Corinne Mercadier, CIRQUE, série Éternel retour, dessin sur photographie, 12,5×9 cm, 2020

Dans ses dessins de la série « Eternel retour » de 2020, elle utilise la trame d’image comme trame d’histoire. À partir d’impressions photographiques de ses séries De Vive Mémoire et Espace second, elle redessine au crayon, à l’encre et à la gouache pour articuler autrement son récit. De nouveau l’unicité est au centre de sa pratique nous conviant à réinterpréter des images existantes dans lesquelles objets et formes apparaissent.

Pour sa dernière série « La nuit magnétique », elle intègre de nouvelles peintures sur verre dans ses prises de vues photographiques où voisinent architectures contemporaines et baroques, du nouveau Musée Narbo Via de Narbonne à la Chapelle de la Vieille Charité de Marseille. Imperceptiblement, l’air de rien, les compositions entre photographies et peintures deviennent des scènes fictionnelles où l’on devine un décor réel qui se dilue dans l’imaginaire. Corinne Mercadier travaille la lumière et le point de vue dans sa cohérence des règles du rêve et non de la réalité. Elle joue avec la transparence et l’immatérialité pour donner corps à ses rêves. Nous pouvons l’accompagner dans ce voyage intérieur et pénétrer dans sa pyramide fictive.

Corinne Mercadier, Souffle, série La nuit magnétique, 60×90 cm, 2022

Corinne Mercadier,Luna , série La nuit magnétique, 60×90 cm,,2022

Corinne Mercadier, Impromptu, série La nuit magnétique, 60×90 cm, 2022

Corinne Mercadier, Une étoile endormie, série La nuit magnétique, 60×90 cm, 2022


INFORMATIONS PRATIQUES

ven13mai(mai 13)13 h 00 minsam16jul(jul 16)19 h 00 minCorinne MercadierPhotographiesGalerie Binome, 19 rue Charlemagne 75004 Paris

La Rédaction
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