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Contracepté. À la rencontre de ceux qui ont choisi l’Andro-switch par Anouck Everaere

Temps de lecture estimé : 6mins

Cette semaine, dans notre rubrique consacrée aux photographes, nous avons choisi de vous présenter « Contracepté », un travail intime et documentaire sur la contraception masculine. La photographe Anouck Everaere est partie de son expérience personnelle pour partir à la rencontre de ceux qui ont choisi d’utiliser un anneau contraceptif, méthode naturelle est réversible. Un acte politique puisqu’en 2021, l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé interdit la vente de l’anneau thermique en raison de l’absence d’un marquage CE obtenu après une étude clinique sur 5 ans, mais les pouvoirs publics refusent de prendre en charge les coûts financiers de ces études.

Depuis deux ans, le compagnon de la photographe Anouck Everaere a pris en charge la contraception dans leur couple, il porte un anneau contraceptif. Cette méthode naturelle est réversible a mis fin à plusieurs années de souffrances gynécologiques. La photographe part alors à la rencontre de ceux qui ont fait le choix de la contraception, partout en France, Belgique et Suisse.

Cette méthode appelée « Andro-switch » consiste à placer un anneau en silicone souple sur la base de la verge entourant le pénis et le scrotum. Les testicules, n’ayant plus de place dans les bourses, vont naturellement remonter dans le corps. La température de ces derniers va augmenter et la spermatogenèse va chuter. Dès lors, toute personne portant l’anneau une quinzaine d’heures par jour sera contraceptée. Un anneau coûte 37€.

Très amoureuse, elle ne comprenait pourtant pas pourquoi lui, pourquoi fondamentalement l’avait il fait. Il lui répondait que c’était naturel, mais elle lui demandait encore et encore, insatisfaite de cette réponse. Ce geste est évidemment politique, il lui parle d’évidence et de simplicité alors que les faits montrent le contraire. Moins de
10 000 personnes sont contraceptés en France. Même le correcteur orthographique ne connaît pas ce mot au masculin.

Un jour, elle a reçu une lettre de sa part :

Anouck,
Je porte un anneau de contraception masculine parce que c’est facile. Ça ne me fait pas mal, ça ne me gène pas et ça me rend infertile, c’est réversible et ça ne coûte pas cher. Ma seule contrainte, ce sont les spermogrammes réguliers à faire. Quand je compare cette méthode aux galères de la contraception féminine je suis ébranlé, sans jeu de mot 🙂 D’entendre la violence de tes récits de ta pose de stérilet, des effets secondaires de la pilule, du temps passé chez la gynéco, je trouve ça injuste pour toi.
C’est normal en connaissance de tout ça de prendre en charge la contraception dans notre couple.
Je ne veux pas que tu aies mal pour quelque chose qui nous concerne tous les deux. Je ne veux pas qu’en plus des règles tu aies du cuivre à l’intérieur, des médocs, alors que je peux simplement porter 10 grammes de silicone sur ma bite.
Antoine

En France, la charge de la contraception restera féminine

«Ce petit objet est arrivé dans nos vies de manière naturelle et apaisée, rien à voir avec la pose d’un stérilet ou d’un implant. Au début, j’ai senti une gêne chez lui, un froncement de sourcil que je connais bien, une entrave dans son corps, un peu comme une adolescente trouve désagréable un premier soutien-gorge. Mais quelques jours plus tard la gêne avait disparu, il s’était habitué et la routine s’est mise en place.
La responsabilité de la contraception était devenue sienne et je devais lui accorder ma confiance.
J’ai tout de suite eu envie de nous photographier. J’ai photographié son corps, nos enlacements, son sommeil, la table de chevet où il posait l’anneau la nuit, ces instants du quotidien qui sont le quotidien de si peu. C’est devenu une ritournelle ; un corps, un visage, une caresse, une table de chevet..
Puis je suis partie chercher ceux qui avaient pris le même chemin…»
Le 17 décembre 2021, l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) interdit la vente de l’anneau thermique. La raison étant l’absence de marquage CE, label indispensable aux produits médicaux. Les conditions nécessaires à l’obtention du marquage est entre autre une étude clinique sur 5 ans, les coûts de ces études sont d’environ 100 000€. L’absence d’interêts des laboratoires et pouvoirs publics suspend donc la vente et le développement de cette nouvelle contraception, la charge de la contraception restera féminine en France.
Cette suspension à raviver la lutte et plusieurs collectifs se sont formés et militent pour une équité contraceptive :
https://slowcontraception.com
https://entrelac.coop

L’ouvrage

Corridor Eléphant propose une collection de livres papier en édition limitée, numérotée et signée. Le financement participatif du projet d’édition de Contracepté vient de se clôturé à 203%, le livre est toujours disponible à la vente sur le site pendant quelques mois.
Édition limitée, numérotée, signée par la photographe et certifiée par un cachet à froid. Format 21×15 cm (format cahier), 70 pages. 42 photographies.

> https://www.corridorelephant.com/anouck-everaere

Anouck Everaere est née en 1991 à Lille. Elle vit et travaille à Lussas. Habitée par la photographie dès son plus jeune âge, Anouck Everaere grandit dans une « ville nouvelle » et saisit la mélancolie d’un quotidien vécu au sein d’un lotissement, entre une zone industrielle, la prison et des HLM. L’année 2016 à l’École de photographie et de l’images Bloo lui apporte une approche documentaire sensible. Sa pratique découle d’une immersion sur le long terme, l’amenant régulièrement à aller à la rencontre de personnes considérées comme en marge ou sous-représentées dans nos sociétés. Elle vient de sortir un livre photo, Contracepté, aux éditions Corridor Elephant, sur l’équité contraceptive, elle expose à Paris, Zone mixte au consulat Voltaire (2022), O aux Rencontres de la jeune photographie internationale à Niort (2022), L’heure des comptes au Festival Resonnances, Studio City gate à Bruxelles (2019), Incarnées, dans le cadre du Festival International du Documentaire Émergent (2018). Depuis 2017, elle travaille à l’École Documentaire de Lussas. En 2022, Anouck Everaere est sélectionnée pour une résidence CLEA dans les Hauts-de-France, elle réalise en parallèle un film documentaire sur l’équipe de rugby féminine qu’elle photographie depuis deux ans.

http://www.anouckiling.fr 


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Pour soumettre votre travail à la rédaction, il vous suffit d’envoyer à info@9lives-magazine.com

• Une série composée de 10 à 20 images. Vos fichiers doivent être en 72DPI au format JPG avec une taille en pixels entre 1200 et 2000 pixels dans la plus grande partie de l’image ;
• Des légendes (si il y a) ;
• Un texte de présentation de votre série (pas de format maximum ou minimum) ;
• Une courte biographie avec les coordonnées que vous souhaitez rendre public (site web, email, réseaux sociaux…)

La Rédaction
9 Lives magazine vous accompagne au quotidien dans le monde de la photographie et de l'Image.