Jordi Ruiz Cirera

Where the line blurs est une enquête photographique sur la frontière nord du Mexique réalisée entre 2017 et 2022. Au travers des images de paysages et des personnes qui y vivent de façon permanente ou transitoire, Jordi Ruiz Cirera a cherché à rendre compte des lieux et des moments de vie qui sont en arrière-plan des titres chocs des journaux.

Couvrant quelque 3 000 km de l’océan Pacifique au golfe du Mexique, la région est décrite à travers des histoires de violence des cartels, de disparitions, d’impacts des politiques frontalières des États-Unis et des différentes vagues de migrants et de réfugiés se dirigeant vers le Nord.

Bien qu’au commencement du projet, il a été attiré par les grands titres et les images associées, il a fini par se concentrer sur l’autre aspect de la question : comment se construit une normalité dans ce contexte de violence omniprésente et d’insécurité économique. Il tenait à dépeindre l’invisible, la tension palpable, les distances, la déconnexion et l’isolement. Au travers de ses déplacements dans différentes villes et villages et zones péri-urbaines et des rencontres avec les gens, il recensait les blessures infligées sur le paysage (extérieur et intérieur) par les luttes des cartels pour contrôler des territoires.

Travaillant de manière intuitive et essayant de ne pas être trop influencé par ce qu’il connaissait déjà de la région, il poursuivait une approche nuancée qui pourrait révéler les réalités complexes d’une région qui semble être en perpétuel changement.

Il a vu. Il a vu des célébrations, des départs et des moments d’attente. Il a trouvé des paysages qui révélaient les tensions sous-jacentes : des maisons abandonnées, des villages brûlés, des bouts de déserts clôturés. Et Le mur. Le mur comme division symbolique et littérale des Amériques : le monde anglophone et le monde hispanophone. Une frontière hyper-sécurisée tout en étant la frontière la plus traversée au monde. Le désir de ceux qui veulent passer aux États-Unis et les espoirs de ceux qui s’installent pour travailler dans une région qui s’est développée industriellement grâce aux accords de libre-échange. Le mélange culturel apportant des influences du nord et du sud.

L’œuvre contemple la vie quotidienne des habitants de la région, qu’ils soient temporaires ou permanents, et leur relation avec leur environnement. Elle nous invite à nous arrêter et à réfléchir à la myriade d’histoires qui se déroulent dans l’une des frontières les plus médiatisées au monde.