Mai, 2024

Paysages Monstrueux

jeu16mai(mai 16)15 h 00 minlun19aou(aou 19)19 h 00 minPaysages MonstrueuxExposition collectiveCentre Claude Cahun pour la photographie contemporaine (anciennement Galerie Confluence), 45 rue de Richebourg 44000 Nantes

Détail de l'événement

Dans le cadre du plan gouvernemental de soutien à la filière presse, le ministère de la Culture a confié à la Bibliothèque nationale de France la mise en oeuvre d’une grande commande photographique, Radioscopie de la France : regards sur un pays traversé par la crise sanitaire, destinée aux photojournalistes. Deux appels à projets, l’un lancé en 2021, l’autre en 2022, ont permis de sélectionner 200 lauréats sur leur parcours et leur proposition. Ce projet vient reconnaître et encourager la création contemporaine dans le champ du photojournalisme et de la photographie de presse.

L’équipe du Centre ClaudeCahun est heureuse de vous présenter une double exposition tirée des séries de quatre lauréats de cette grande commande :
– Au bord du monde au parc du Grand Blottereau avec William Daniels et Letizia Le Fur
– Au fond du temps au Centre Claude Cahun, avec Julien Magre et Grégoire Eloy

Au parc du grand Blottereau la partie de l’exposition intitulée Au bord du monde présente deux séries qui mettent en avant les paysages décrivant l’abîme qui se profile (est déjà là).

Avec la série « Un Climat français », William Daniels répertorie et documente les événements climatiques exceptionnels qui ont affecté la métropole française pendant la période de production des images. Il couvre ainsi les incendies majeurs, les inondations, les tempêtes et sécheresses, sous la forme de paysages en grand format et vides de tout humain.

Avec la série « Mines de rien », Letizia Le Fur s’intéresse à l’impact environnemental de l’énergie nucléaire, qualifiée récemment de verte, et propose un reportage sur d’anciennes mines d’uranium en France. Munie des relevés de la CRIIRAD et équipée d’un compteur Geiger, la photographe s’est rendue sur les lieux les plus radioactifs pour cartographier la beauté dangereuse de ces bouts de France contaminés.

Au Centre Claude Cahun la partie de l’exposition intitulée Au fond du temps regarde comment les paysages portent les récits de nos peurs ancestrales. Avec la série « La Mâle bête », Julien Magre reprend un article paru le 28 janvier 2022, dans le journal « La Montagne » qui affirme que des Corréziens ont vu des loups dans la commune de Tulle. Pour les éleveurs, il ne fait aucun doute que des loups ont colonisé les territoires de la Corrèze de façon pérenne. Julien Magre est ainsi aller à la quête de ces loups, pour documenter le rapport de l’homme et du loup et s’intéresser à ses mythes et à ses territoires.

Avec la série « le Beau geste », Grégoire Eloy accompagne les acteurs d’une génération engagée, soucieuse de l’environnement autant que du respect des droits humains, dans un corps à corps avec la nuit et la montagne, aux différents points de passage, pour venir en aide aux exilés. Cette série témoigne de ce geste simple et beau qu’ils accomplissent : celui de la main tendue vers une personne en difficulté.

Ces quatre séries et deux expositions cherchent à soulever quelques uns des voiles et quelques unes des nombreuses idées fixes qui recouvrent l’idée de paysage et de territoire. Le paysage est le pays, sage : le territoire assagit par l’homme. Le territoire c’est l’autre. Sans l’autre aurions nous besoin de le délimiter ? Le territoire est l’expression d’une relation qui s’émisse entre deux êtres, c’est l’expérience d’une rencontre. L’expérience du territoire, comme le propose Roncayolo à la suite de Deleuze c’est le mouvement de l’art, c’est l’art de se trouver de se montrer, montrer qu’on existe dans un flux constant, le territoire « c’est un rythme », marquer son rythme, son temps. Le monde n’est qu’une imbrication de territoires subjectifs, « combinaisons de territoires » selon Roncayolo. Alors oui, découlant du territoire, le paysage est un geste. Cette double exposition qui s’ouvre au Centre Claude Cahun et au Parc du Grand Blottereau s’intéresse à la manière de regarder le paysage. Aujourd’hui, où le moindre petit espace terrestre peut-être cartographié par google earth, où chaque fait et geste semble être rapporté et commenté partout, par tous, tout le temps pourquoi poser la non évidence d’un terme si commun qu’il semble naturel : paysages ? À travers des paysages ressentis les différents auteurs de l’exposition Paysages monstrueux posent à leur façon la perpétuelle définition de l’écriture documentaire : comment donner à voir un quotidien ? Comment transmettre un moment, une situation localisée, précaire et autonome ?

Comment et pourquoi dénoncer l’inquiétante étrangeté quotidienne qui nous saisit lorsque sont évoqués les grands faits d’actualité qui cisèlent nos paysages en des monstres tapis dans l’ombre ?

Une image c’est un espace, un temps, une respiration qui nous permet de nous raconter, à travers les yeux d’autres, le monde, de l’investir, de l’habiter, plus exactement de nous habiter le monde. Documenter un territoire c’est alors proposer une topographie d’un espace-temps pour inscrire un regard en mouvement sur un espace et un quotidien « autres ». Voir autrement, mais aussi réfléchir aujourd’hui aux outils que nous avons pour capter et partager les enjeux qui se cachent derrière le banal, le quotidien, c’est se donner les moyens d’investir les lieux qui nous entourent en interrogeant ce qui semble évident. En repensant notre représentation d’un paysage on met en lumière les multiples points de vue qui construisent un espace commun. Repenser les conditions de représentation de notre territoire quotidien, revient à poser notre responsabilité face à ce qui nous entoure, notre univers étrangement familier.

Photo : © William Daniels / Grande commande photojournalisme

Centre Claude Cahun pour la photographie contemporaine (anciennement Galerie Confluence)45 rue de Richebourg 44000 NantesOuvert du mercredi au samedi, de 15H à 19H et sur RDV