Mars, 2024

Sonia Sieff

ven08mar(mar 8)11 h 00 minsam30(mar 30)19 h 00 minSonia SieffRendez-vous !Galerie Baudoin Lebon, 21 rue chapon 75003 Paris

Détail de l'événement

Comment naissent les projets ? Il y a six ans, Sonia Sieff a publié Les Françaises, un premier livre qui aurait aussi pu avoir pour titre Mes amies. La photographe avait réussi à convaincre des femmes de son entourage de poser nues, chez elles, dans leur lit, dans leur jardin, sur le toit de l’Opéra Garnier ou sur une terrasse ensoleillée. Le livre que vous tenez entre vos mains s’appelle Rendez-vous ! et la logique voudrait que Sonia Sieff ait décidé de « faire les hommes » après les femmes, mais la vérité, c’est qu’elle voulait mettre les hommes à nu, il y a vingt ans déjà. Le monde de l’édition n’était pas prêt.
Une phrase de René Char revenait régulièrement hanter son esprit : La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil. « La mise à nu est pour moi une forme d’extra-lucidité. Il est possible de lire un être humain rien qu’en observant son corps. Je vois l’âme à travers le corps », précise-t-elle. L’extra-lucidité est un don qui peut se révéler épuisant, et il l’a été par moments, avec Les Françaises, car les femmes sont inquiètes.
De leur silhouette, de leur profil, du grain de leur peau. Elles souhaitent un droit de regard sur leur image, tout simplement parce qu’elles sont conscientes d’en avoir une, d’image, habituées à poser depuis des siècles et à répondre, mine de rien, à l’injonction à la beauté. Les hommes, moins, ou pas encore.
« Tu leur donnes un rendez-vous, ils viennent, tu les shootes, de temps en temps ils t’envoient un texto pour savoir où tu en es du projet, mais tu n’as pas besoin de boire des cafés après pour les rassurer. C’est plus instinctif, plus organique. »
Sonia Sieff prononce ces mots et ça sonne facile, une entreprise qui aurait coulé de source. Mais Rendez-vous !
s’est longtemps appelé autrement. Le titre de travail était Réconciliation. Réconciliation, parce que ce livre est L’aboutissement d’une démarche, celle d’une femme qui est partie avec sa caméra en bandoulière, à la rencontre des hommes de cette planète, pour voir s’il en restait des bons, et s’il était possible de les aimer, encore. De mieux les comprendre, aussi. Elle a sillonné l’Europe, d’Ibiza, à Lisbonne, en passant par Biarritz, Marseille, Paris, Belgrade, Copenhague, Kiev, Barcelone, Berlin jusqu’en Éthiopie.
La plupart des hommes que vous croiserez dans cet ouvrage ont d’abord été terrorisés à l’idée de poser. Les mains moites, les genoux qui tremblent. À de rares exceptions, ils ne savaient pas faire, au sens où ce n’est pas leur métier. Il y a toujours un round d’observation. « Je les invite tout de suite à se déshabiller pour ne pas rater un beau moment, mais je ne veux pas les déstabiliser. Il faut qu’ils oublient leur nudité. Je ne juge pas les corps, je ne suis pas dans le silence, je leur parle en les regardant dans les yeux, je les guide, un peu comme une première fois, finalement. Et ils y vont, rassurés ».
Derrière sa caméra, la photographe ose la matière. Le sexe. Attraper ce qu’il y a de plus intime chez un homme. Et c’est ici qu’on aborde un sujet universel : la taille. « Le nombre de fois où j’ai pu entendre « Non mais normalement, elle est plus grosse », « Attends mais là, il fait froid »… C’est fou, et en même temps cela ne surprend pas. L’époque est à la déconstruction, mais s’il existe des injonctions à la beauté féminine, il en existe encore un paquet pour ce qui est de la virilité masculine.
On pourrait en rire, vous et moi, si tous ces clichés ne continuaient pas d’être partagés et de produire en masse des handicapés des sentiments. Des hommes tristes, malheureux, en souffrance. Des hommes violents. Alors rendez-vous, messieurs. Rendez-vous !
Rendez les armes, déposez-les à vos pieds et levez la tête, ne cachez rien, soyez-vous mêmes, soyez des hommes. Se mettre à nu, c’est lâcher prise, abandonner ses complexes. Tout ne se joue pas à la taille de votre sexe, alléluia. Cessez de rouler des mécaniques, de pousser de la fonte, de vous prendre pour ce que vous n’êtes pas, en pensant que c’est ce que veulent les femmes. Lâchez les chevaux. Aimez-vous. Un homme, un vrai, c’est un corps avec du corps, du relief, des failles, une histoire. Pas un monolithe de certitudes. Mais Quelqu’un avec qui parler.

Note d’intention de Mathieu Palain

Nouveau livre de Sonia Sieff intitulé Rendez-vous ! aux éditions Rizzoli

Dates

8 (Vendredi) 11 h 00 min - 30 (Samedi) 19 h 00 min(GMT-11:00)

Galerie Baudoin Lebon21 rue chapon 75003 ParisDu mardi au samedi de 11h à 19h et sur rendez-vous