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Pour sa première carte blanche, notre invitée de la semaine, la fondatrice et directrice artistique du Champ des Impossibles, Christine Ollier a choisi de nous parler du photographe Guillaume Zuili. Ce n’est pas un hasard puisque dans son portrait chinois, elle nous confiait choisir un tirage unique de Guillaume comme photo accrochée sur un mur. À l’occasion d’une résidence effectuée dans le cadre de Territoire rêvé Bretagne, on découvre son livre publié aux éditions Contrejour et une exposition itinérante au sein des Rencontres photographiques de ViaSilva.

© Guillaume Zuili

Résidant depuis 20 ans à Los Angeles, Guillaume Zuili pratique une approche urbaine de la photographie. Pendant son séjour à Cesson-Sévigné, le photographe a porté son regard sur le parcours entre ViaSilva et le centre-ville de Rennes, en suivant la nouvelle ligne de métro. Il a poursuivi sa quête d’exploration des paysages urbains, en en révélant les atmosphères grâce à des tirages réalisés en laboratoire avec des techniques alternatives. L’artiste a ainsi mené un périple depuis les plus étroites venelles du Rennes historique jusqu’au nouveau quartier ViaSilva.
Walking the line (marcher le long de la ligne de métro), comme le dit l’artiste. Il en résulte une narration faite d’ombres et de lumières contrastées étonnamment empreintes du soleil de plomb de sa ville d’adoption, Los Angeles. À l’occasion de cette carte blanche, nous partageons son entretien avec Charlotte Marie chargée de médiation aux Ailes de Caïus, qui porte le projet de résidence

© Guillaume Zuili

Charlotte Marie : Pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?
Qu’est-ce qui vous a amené vers la photographie et comment définiriez-vous votre pratique artistique en quelques mots ?

Guillaume Zuili :
Je suis né en France et je vis à Los Angeles depuis vingt ans. Un voyage en Inde que j’ai effectué quand j’étais étudiant en droit a changé ma vie ; dès lors, je savais que j’allais être photographe et voyageur. Ma matrice est en noir et blanc et je fais de l’urban landscape, que je fabrique dans mon laboratoire.

C. M. : Quelles sont vos techniques de prédilection ? Les choisissez-vous selon les paysages qui s’offrent à vous, ou faites-vous les prises de vue en fonction des techniques que vous souhaitez utiliser ?

G. Z. : Je me demande parfois si je ne suis pas plus tireur que photographe.
Depuis mes débuts, j’ai toujours eu un labo qui me permet de contrôler toute la chaîne de fabrication de mes photographies.
Je pratique le lith (Cette technique consiste à tirer une épreuve sur papier noir et blanc à partir d’un négatif noir et blanc, en faisant appel à un certain procédé chimique. Cette pratique permet d’obtenir des teintes particulières, allant du bronze à l’orangé en passant par différentes nuances du spectre coloré. Elle donne également un aspect texturé à l’image) depuis une quinzaine d’années et, ce qui n’était à l’origine qu’un moyen pour résoudre un problème, est devenu mon outil exclusif.

C. M. : Vous avez parcouru de nombreuses villes à travers le monde. Comment avez-vous envisagé ce travail de résidence entre le centre ville de Rennes et le quartier ViaSilva en chantier ?

G. Z. : Pendant de longues années, je n’ai pour ainsi dire pas fait de photographie en France, même quand j’y vivais. Depuis peu, j’éprouve le besoin d’y revenir et d’y prendre des photos. J’ai cette distance qui me permet de regarder avec un oeil neuf, et je suis ravi de découvrir Rennes et Cesson-Sévigné que je ne connaissais pas. J’y vais à l’intuition, en me perdant dans les rues, comme toujours.

© Guillaume Zuili

« J’ai passé un mois à marcher en solitaire dans les rues de Rennes. Avec un regard vierge – c’était la première fois que j’y mettais les pieds.
Le hasard fait bien les choses, se perdre dans la ville, le provoque, et les images apparaissent à chaque coin de rue. Et, quand la lumière se fait complice, il n’y a plus qu’à les prendre, vite avant qu’elles ne s’en aillent. Car à Rennes si le soleil est si intense c’est que les nuages le poursuivent en permanence. Un jeu de cache-cache. Ombre… Lumière…
Pluie… Lumière… Ombre… Lumière… Intense. Violent. Avec des contrastes forts. Un instant magique naît ainsi, qu’il faut saisir avant qu’il ne s’échappe. À cette lumière propre à la Bretagne se rajoute cette pierre si particulière. Elle est là, partout où le regard se pose. L’unité de style en un même lieu frappe l’esprit. Impossible de ne pas sentir la mémoire, l’histoire, qui transpirent de ces pierres ou de ces pavés.
Alors tout est en place pour un narratif fait d’ombres et lumières.
Une série noire dont l’acteur principal, la ville, émerge. Ou peut-être son âme. »

L’ouvrage de Guillaume Zuili “Et bientôt l’obscurité” publié aux éditions Contrejour en avril dernier, est accompagné d’une nouvelle rédigée par Pascal Dessaint. Cet écrivain français est une voix essentielle dans le paysage du polar, il a su imposer une approche toute personnelle du roman noir, en délaissant les rebondissements et intrigues policières. Son texte courant dans le livre s’apparente à un roman-photo. Philippe Courtin vient de réaliser un film sur Pascal Dessaint à découvrir ici :

INFORMATIONS PRATIQUES
> Rencontres photographiques de ViaSilva #6
Du 25 mai au 27 août 2023
Gare SNCF | Galerie Net Plus | Métro ViaSilva
35200 Rennes
> “Et bientôt l’obscurité”, photos de Guillaume Zuili
aux éditions Contrejour, 27×21 cm, 72 pages, 30€.
http://www.guillaumezuili.com

La Rédaction
9 Lives magazine vous accompagne au quotidien dans le monde de la photographie et de l'Image.

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