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De nouvelles participations avec une forte internationalisation (8 sur 15 artistes), le lancement d’une édition en ligne avec l’entrée des NFT (a ppr oc he extended), deux expositions satellites, la création d’une communauté d’intérêt et de mécénat participatif a ppr oc he monte en puissance ! Emilia Genuardi nous fait part des nouveautés de cette 8ème édition qui ne cesse d’élargir les champs d’exploration et de diffusion de l’image. Le concept a su trouver sa place parmi une offre évènementielle photo à Paris très dense et concurrentielle.

Marie-Elisabeth De La Fresnaye : Quel est le fil conducteur de cette nouvelle édition ?

Emilia Genuardi : Ce qui ressort de cette sélection sont les thèmes de la mémoire et de l’identité, pour devenir le fil conducteur de notre édition.
Dans le contexte politique durant lequel nous avons préparé cette 8e édition, j’ai souhaité m’ouvrir à l’international, y compris dans des régions où cela n’est pas forcément le plus simple, comme l’Iran, où la situation devient préoccupante avec notamment la fermeture de nombreuses galeries. La participation d’Ag Galerie basée à Téhéran envoie donc un signal fort.

MdF : Quelles sont les premières participations ?

EG : Parmi les nouvelles participations, citons la toute jeune Hangar Gallery de Bruxelles avec Antoine De Winter, ainsi que Lab1930 (Italie) avec Alessandra Calò, ou l’artist-run space MUCHO MAS! (Italie), qui défend l’artiste Hiền Hoàng. Mentionnons également Hopstreet Gallery (Belgique) avec Sara Imloul, Galeria Presença (Portugal) avec Inês d’Orey, et la galerie Nationale 8 (Belgique) avec Elles Walschaerts. Cette année, la PODA, Petite Œuvre d’Art, se présentera également son un format original.

MdF : Quelles pratiques se dégagent de ce panorama ?

EG. L’italienne Alessandra Calò (Lab 1930) utilise la technique ancienne de l’oléotypie pour nous confronter à une nouvelle perception de la réalité. Toujours sur ce thème de mémoire et identité, le français Alexandre Dupeyron (Galerie du Jour agnès b), cherche à capturer l’essence d’un monde en perpétuel mouvement. La vietnamienne installée en Allemagne Hiền Hoàng (MUCHO MAS!) lauréate du prix Foam explore divers médiums pour étudier les récits culturels et notamment asiatiques à travers la nourriture qu’elle détourne.

La française Sara Imloul, (Hopstreet Gallery) à travers sa photographie théâtrale autobiographique mêlée au dessin et au collage, propose une réflexion sur sa propre identité. Benoît Lefeuvre (Porte b) révèle les processus invisibles qui façonnent notre mémoire collective et individuelle, en utilisant des matériaux photosensibles dont les agents chimiques se décomposent naturellement ou par manipulation.

Susanne Wellm, A Puddle of Poetry, 2024 série Humble eyes Tirage pigmentaire, peinture acrylique, tissage, fil de coton et polyester116 x 83 cmPièce unique© Susanne Wellm / Courtesy Galerie XII

Sandrine Marc, lauréate 2024 de la résidence PICTO LAB, présente des œuvres abstraites conçues en dialogue avec des fragments de réel, offrant ainsi une archive du quotidien et de l’éphémère. La néerlandaise Jackie Mulder (Janknegt Gallery ) mêle photographie, broderie, travail textile et dessin, pour donner à voir de multiples strates.  De même avec Susanne Wellm (Galerie XII) qui s’intéresse, par le biais de photographies d’archives et de tissage, au temps, à la mémoire et à la construction de la narration de ses propres récits.

L’exploration des environnements urbains est au cœur des travaux de Daniel Bourgais (galerie Data) et d’Inês d’Orey (Galeria Presença). Daniel Bourgais utilise la photogrammétrie pour collecter les traces d’un monde en mutation, tandis qu’Inês d’Orey témoigne de la transformation du patrimoine dans les villes modernes, marquées par l’absence de présence humaine. 

Les œuvres d’Homayoun Sirizi (Ag galerie) explorent les faces sombres et parfois satiriques de l’histoire de son pays – l’Iran – à travers une relation métaphorique avec les fleurs, des œillets qu’il coud à même l’image en guise de résistance. Jesse Wallace (Écho 119), à travers son travail photographique et sculptural, recompose des paysages en suspens, écho des exploitations humaines au cœur de la nature.

Homayoun Sirizi, Allégorie de ses doigts saignants et des pétales cramoisis, 2024
Installation (détail), Appropriation de photos des œillets de la révolution iranienne de 1979
Photographie originale par Kaveh Golestan, 1978, Tehran, Iran
Impression jet d’encre sur toile Epson, fleurs brodées au fil de soie, cadre ancien – Pièce unique
© Homayoun Sirizi & Ag Galerie

Antoine De Winter (Hangar) explore la représentation de soi à l’ère des réseaux sociaux et de l’intelligence artificielle, en s’appuyant sur des techniques photographiques traditionnelles. A partir de portraits volés sur des faux profils d’utilisateurs instagram couplés à un logiciel d’intelligence artificielle, il va recréer une image synthétique proche de l’image originale d’une personne non réelle. Ces portraits sont ensuite transposés en cyanotypes sur des tissus modelés en relief à la cire pour donner naissance à des images reliques qui suscitent un sentiment assez ambigu.

Elles Walschaerts Shinrin Yoku #27, 2022 Cyanotype sur papier Arches Platine, teinté au café38 x 56 cm (ed.1/1)56 x 76 cm (ed.1/1) Deux formats uniques
© Elles Walschaerts / courtesy Nationale 8 gallery

Enfin, Isabelle Chapuis (Analix Forever) et Elles Walschaerts (Galerie Nationale 8) témoignent toutes deux de leur relation intime avec les éléments : lavis issus du paysage capturé et les cyanotypes.

MdF : Le lancement de a ppr oc he extended: quels enjeux ?

EG. Nous avons amorcé un premier partenariat l’année dernière avec le c-e-a lors d’unRepresented, et en parallèle je cherchais une offre numérique qui allait au-delà de la simple plateforme de monstration et de vente en ligne, pas toujours incitative et efficace. Ikigai Labs, co-fondé par Dimitri Daniloff, artiste et spécialiste de la blockchain, et un collectionneur de NFT m’ont proposé un concept qui m’a semblé le plus en phase avec l’esprit du salon. Ce projet aspire à établir un lien entre la présence physique du salon au Molière et une proposition artistique virtuelle dans la galerie Ikigai Labs, co-curatée par moi-même et Dominique Moulon, commissaire et membre de l’association c-e-a. Avec la collaboration de The5ource, qui propose d’ancrer les créations numériques dans des lieux physiques, des NFT vont être placés dans le salon, au Drawing Hotel et dans l’ancienne poste accueillant l’exposition du Réseau Lux, en guise de cadeau et d’invitation au salon virtuel. Nous présenterons 3 artistes et 2 duos français qui participent à cette nouvelle aventure inédite : Lionel Bayol-Thémines, Daniel Bourgais, Brodbeck & de Barbuat, Albertine Meunier , ainsi qu’ Edouard Taufenbach & Bastien Pourtout.
Chaque artiste ou duo aura deux salles de monstration au sein de l’espace immersif.

MdF : Pourquoi faire le choix des NFT ?

EG.
Je m’y lance plus tard que d’autres, ayant pris le temps d’analyser la situation et faute d’avoir trouvé une interface satisfaisante jusqu’à présent. Aujourd’hui, je pense qu’il est essentiel de se lancer et de s’adapter à ces nouvelles technologies, qui intéressent de très bons artistes et qui créent un lien direct avec des collectionneurs du monde entier. J’ai été surprise de découvrir que certains collectionneurs possédaient déjà un portefeuille NFT et étaient déjà bien au fait.

Hiền Hoàng
Pink pudding or be friendly, de la série « Asia Bistro – Made in Rice», 2023 Impression UV sur Plexiglas déformé et plié, bouteilles de sauce soja60 x 90 x 12 cmPièce unique
© Hiền Hoàng / Courtesy Mucho Mas

MdF : proche : quelle vocation ?

EG. C’est un cercle d’amis au sens large qui regroupe non seulement des collectionneurs mais aussi des critiques d’art, directeurs d’institutions et amateurs. Association reconnue d’intérêt général, elle propose des actions de mécénat participatif pour soutenir divers projets dans le spectre de la création contemporaine. Proche cette année, prend le relais et soutient le salon unRepresented.
L’association offre de plus différents avantages à ses membres (dont 2 visites mensuelles en petit comité et en avant-première d’expositions ou d’ateliers d’artistes). Elle compte près d’une cinquantaine de membres actuellement.

MdF : Les expositions satellites : pouvez-vous nous en dévoiler les contours et partenariats associés ?

EG. Pour enrichir cette proposition artistique axée sur l’expérimentation de l’image, deux expositions satellites complètent le programme.

a ppr oc he x Drawing Hôtel : Juliette Andrea-Élie
La première, à quelques pas du Molière est conçue en partenariat avec le Drawing Hôtel, ce qui fait sens dans cette hybridation des mediums. Serons montrées une sélection d’ œuvres de l’artiste française Juliette Andrea-Élie, qui explore un univers mêlant photographie, dessin et broderie, tout en questionnant la représentation complexe du paysage à l’ère de l’anthropocène.
a ppr oc he x Réseau Lux : Sylvie Bonnot

La deuxième exposition est initiée avec le Réseau LUX , qui regroupe des festivals et foires de photographie (22 membres). Nous investissons un vaste lieu dans une ancienne poste dans le 9ème. Le solo show sera dédié à Sylvie Bonnot, qui a participé au salon a ppr oc he en 2021. En collaboration avec le musée et Château de Tours et le Hangar à Bruxelles, elle dévoilera des œuvres créées en 2024, illustrant les impacts du dérèglement climatique sur les milieux naturels, inspirées par ses explorations en Bourgogne et en Guyane.

INFORMATIONS PRATIQUES
• a ppr oc he

jeu07nov(nov 7)10 h 00 mindim10(nov 10)19 h 00 min8ème édition a ppr oc heLe Molière, 14, rue de Richelieu 75001 Paris

• a ppr oc he extended
un salon virtuel inédit en collaboration avec Ikigai Labs
du 15 au 17 novembre 2024
En ligne : ikigailabs.art

• Expositions satellites

un ppr oc he x Drawing Hôtel : Juliette Andrea-Elie
Drawing Hôtel
17 rue de Richelieu – Paris 1
Exposition du 7 novembre 2024 au 5 janvier 2025
Ouverture tous les jours de 11h à 19h
Entrée libre

• a ppr oc he x Réseau Lux : Sylvie Bonnot

mer06nov(nov 6)11 h 00 mindim08déc(déc 8)19 h 00 minRéseau LUX #121 festivals et foires de photographie s ’exposentLa Poste Rodier, Ancien centre de distribution du courrier, 30-32, rue Louise-Emilie de la Tour d’Auvergne 75009 Paris

A LIRE
➔ Découvrez notre entretien avec Marion Hilsen, Sylvie Hugues, Emilia Genuardi et Anne-Eléonore Gagnon pour vous présenter le réseau LUX et l’événement LUX#01.

Marie-Elisabeth De La Fresnaye
Après une formation en littérature et histoire de l'art, Marie de la Fresnaye intègre le marché de l'art à Drouot et se lance dans l'événementiel. En parallèle à plusieurs années en entreprise dans le domaine de la communication éditoriale, elle créé son blog pour partager au plus grand nombre sa passion et expertise du monde de l'art contemporain et participe au lancement du magazine Artaïssime.

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