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Le photographe Georges Souche a commencé la photo dans les années 1990 après une jeunesse consacrée à la musique. Quand il se sépare de son piano, il ressent le besoin de s’exprimer par le médium de la photo. Il vit alors dans les Cévennes, et contemple des paysages majestueux. Dès les années du lycée, il a une expérience déterminante. L’été, il est guetteur d’incendie dans des tours de guet au sommet de pics et de montagnes : « J’ai appris à observer la nature, les bêtes, les éléments, l’arrivée des orages. »

Rencontre décisive

Georges Souche revenait régulièrement à Lacoste, dans l’Hérault – il est né à Montpellier en 1957. Il avait fait de nombreuses images du Lac du Salagou. Après trois ans de pratique photographique, un éditeur lui propose de rencontrer l’écrivain Max Rouquette (1908-2005). L’accueil est enthousiaste, Max Rouquette dessine et il est ouvert au médium de la photo comme art pour lire le monde. Il a déjà travaillé avec le photographe Harold Chapman (1927-2022). C’est le début d’une fructueuse collaboration et la réalisation en commun de deux livres : Lac du Salagou, miroir aux cent visages (1996) et Le Larzac (1999). Pour ce second projet, Georges Souche passe près de deux ans au Larzac, pour mieux ressentir ces grandes étendues et s’inspirer des écrits du poète : « Le traverser n’est pas le voir. Encore moins le connaître », avait rappelé Max Rouquette.

L’exposition Le Secret de l’herbe revient sur cette rencontre décisive. Le titre est emprunté à la première prose de Max Rouquette, publiée en 1931 dans une revue occitane et qui est à la source de son chef-d’œuvre Vert Paradis (1961 – traduction française en 1980 / Actes Sud). Un vieil enchanteur lit le soir des contes du Languedoc aux enfants du village d’Argelliers : « Il confiait cet antique trésor tel qu’il l’avait reçu de ses ancêtres. » Dans cet hymne à la nature au décor de garrigues, la mort rôde et frappe, le songe surgit et se mêle à la tendresse. Le parcours proposé par Georges Souche est une alternance de textes de Max Rouquette et de photos : « Je suis fasciné par son œuvre depuis longtemps. Souvent, je me dis : « C’est très rouquettien. » Il m’accompagne par la pensée. »

L’exposition est en deux volets. Des panneaux du CIRDOC (Centre interrégional de documentation occitane) présentent une synthèse biographique et la découverte de la richesse littéraire de Max Rouquette.

La lumière et ses variations

Le photographe a réalisé des vues à hauteur d’enfant, inscrivant son approche dans celle du poète : « L’herbe était notre compagne. Nous vivions toujours mêlés à sa fraîcheur, amis de l’humble vie qu’elle cache. » Certaines images sont très abstraites. Un insecte apparaît dans le mouvement d’une danse, deux gouttes d’eau deviennent d’étranges yeux.

Il confie travailler de manière un peu obsessionnelle sur la lumière et ses variations. Il privilégie le clair-obscur, et parfois tout au contraire, il favorise « une lumière presque surexposée pour évoquer la « calorassa », la canicule brûlante de l’été. » Il explique « ouvrir les ombres sur certaines zones ou au contraire les accentuer, et équilibrer la luminosité du ciel ».

Il emploie une large gamme d’optiques, depuis le grand angle jusqu’au long téléobjectif : « Dans le cas du projet Max Rouquette, j’utilise souvent un objectif macro. Pour mon travail sur la nature et les paysages, ce qui m’intéresse ce sont les lumières changeantes et éphémères qui permettent à partir d’un même sujet, d’obtenir des résultats très différents d’une minute à l’autre. Le soleil qui joue à cache-cache avec les nuages, une nappe de brouillard qui se dissipe et transforme la scène à chaque instant, ou encore si je me trouve au milieu de la végétation, le soleil qui passe à travers le feuillage animé par le vent. C’est dans ce genre de situations aléatoires et imprévisibles que parfois se produit un miracle. »

Pour les vingt ans de la disparition de Max Rouquette – les trente ans de leur première rencontre -, Georges Souche publie Triptics roquetians. Une série de douze triptyques associe pour chaque feuillet trois photographies à des poèmes, des extraits de Vert Paradis. A l’automne, il publiera un livre hommage.

Georges Souche connaît parfaitement l’œuvre du poète, il vit et respire ses textes. Il reste fidèle à cette grande amitié artistique, à l’écrivain pétri de culture et d’humanisme.

Fatma Alilate

Photographies © Georges Souche

INFORMATIONS PRATIQUES
Double Exposition Max Rouquette l’enchanteur … et le Secret de l’herbe
Georges Souche
Jusqu’au 11 juillet 2025
L’Hôtel d’Aurès
14 rue Eugène Lisbonne
34000 Montpellier.
Du mardi au vendredi, de 14 à 18 heures
http://www.georges-souche.com/

Fatma Alilate
Fatma Alilate est chroniqueuse de 9 Lives magazine.

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