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L’été est déjà bousculé par les dérives climatiques alors restez aux frais dans les musées, méditez à l’ombre des vieilles pierres ou des tonnelles et ouvrez l’œil ! Quelques pépites, à commencer par le sud pour se parer des couleurs de Jean-Michel Othoniel et danser sur le Pont d’Avignon, jouer le vertige à la Villa Carmignac, lire le ciel et les étoiles au Mucem, s’approcher du cactus et vivre la décennie Riviera avec Coco Chanel au Nouveau Musée de Monaco, parcourir les océans partout dans la ville de Nice, oser Pierre Soulages et Agnès Varda, redécouvrir les sortilèges de Leonor Fini au Palais du Facteur Cheval mais aussi à l’ouest plonger dans le grand bleu aux Franciscaines de Deauville, plus au nord « S’habiller en artiste » et parcourir la Galerie du temps au Louvre Lens…

La liste est étourdissante, sans oublier pour les parisien.es, les échos de la Saison du Brésil en France avec Ernesto Neto au Grand Palais, trois femmes photographes unies par une même exigence en faveur de voix non dominantes : Donna Gottschalk, Hélène Giannecchini et Carla Williams (le Bal), les expérimentations vibratoires de Vivian Suter et les fantômes de l’histoire du Vietnam avec Thao Nguyen Phan au Palais de Tokyo, les 20 ans du MAC VAL sur un air d’ Alphaville dans le Grand Paris de l’art… et tant d’autres !

La Porte des Navigateurs de Jean-Michel Othoniel OTHONIEL COSMOS ou Les Fantômes de l’Amour Crédit OTresson / Avignon Tourisme

« Cosmos » la constellation Jean-Michel Othoniel en Avignon, 10 lieux !

A l’occasion des 25 ans de la désignation d’Avignon comme capitale européenne de la culture et des 30 ans de son inscription au patrimoine mondiale de l’UNESCO, carte blanche est donnée au magicien Othoniel en 10 lieux. Au-delà de sites emblématiques comme le majestueux Palais des Papes, cœur névralgique de la constellation, la Collection Lambert, le Petit Palais/musée du Louvre, le musée Calvet, ou plus inédits comme le musée lapidaire, les bains publics Pommer, la chapelle Sainte-Claire…

http://www.othoniel-cosmos.com

Laure Prouvost, « Mère We Sea » Vieille Charité, Ville de Marseille Courtesy Laure Prouvost et Galerie Nathalie Obadia Photo Sophia El Mir – ARTER

Laure Prouvost s’empare des musées de la Ville de Marseille

De la Vieille Charité au Mucem en allant jusqu’au [mac] musée d’art contemporain, il est question de l’imaginaire maternel, d’Icare, d’un voyage initiatique…l’artiste s’est récemment installée à Marseille pour l’occasion. Elle réactive la mémoire de l’ancien hospice de la Vieille Charité qui a accueilli de nombreuses personnes autour de nouveaux récits.
Expositions gratuites !
« Mère We Sea »
https://musees.marseille.fr/laure-prouvost-mere-we-sea

Vue de l’exposition « S’habiller en artiste » Louvre Lens photo F Lovino

« S’habiller en artiste », Louvre Lens

De l’Antiquité gréco-romaine aux catwalks contemporains, l’art n’a cessé d’influencer mode et comportements. Les créateurs se sont emparés depuis toujours des codes de représentation « à la manière de » avec tout l’apparat associé au pouvoir. L’on songe à Cindy Shermann notamment. L’émancipation des artistes femmes passent par la robe chemise popularisée par la peintre Elisabeth Vigée-Lebrun jusqu’ à Rosa bonheur posant en blouse. Bientôt c’est le genre qui s’impose à travers des déclinaisons du costume masculin dans des visées émancipatrices. Petit détour par l’artiste en robe de chambre négligée avec Balzac qui lance la mode. Le bleu de travail devient un objet de récupération et l’attitude bohème un manifeste. On bascule avec l’avènement de la haute couture et la pratique de la performance avec des créatrice comme Yoko Ono pour aller vers de véritables collaborations entre artistes et couturiers. Mention spéciale pour Jeanne Vicérial qui a inventé le précédé du « tricotissage », (technique qu’elle développe en partenariat avec le département de mécatronique des MINES ParisTech).

« S’habiller en artiste », l’artiste et le vêtement
Jusqu’au 21 juillet 2025
https://www.louvrelens.fr

Vue d’installation de l’exposition Vertigo à la Villa Carmignac –
Exposition présentée du 26 avril au 2 novembre 2025 à la Villa
Carmignac.

« Vertigo », Villa Carmignac, île de Porquerolles

Au-delà de la simple évocation du film d’Alfred Hitchcock, l’exposition propose une exploration élargie des sensations vertigineuses suscitées par une expérience intensifiée de la nature, entre perte de repères, flottement et éblouissement. Le parcours s’articule en six volets, autant de registres visuels du paysage : l’aquatique, le cosmogonique, l’aérien, l’infini, le terrestre et l’abysse.
Réunissant une cinquantaine d’œuvres issues de prêts muséaux, institutionnels et privés, ainsi que de la collection Carmignac et de créations conçues spécialement pour l’exposition, VERTIGO rassemble des artistes qui se sont affranchis de la figuration, des apparences et des images convenues afin d’interroger plus profondément notre relation au monde sensible.

https://www.fondationcarmignac.com/fr/vertigo-exposition-villa-carmignac-porquerolles

Sunrise Cactus® par Paul Smith, 2023 (Drocco, Mello, 1972) © Gufram

Cactus, vous avez dit cactus ? Nouveau musée national de Monaco

L’esthétique singulière des cactées a captivé de nombreux artistes, notamment au début du XXe siècle, et plus particulièrement durant l’entre-deux-guerres. Leur aspect original, parfois chargé de symbolisme, a fait des cactus et autres plantes succulentes des figures à la fois transgressives et inspirantes. Architectes, photographes, designers, plasticiens, cinéastes et autres créateurs ont ainsi intégré leur graphisme iconique dans leurs œuvres et décors. Peu de familles végétales ont suscité autant de transpositions artistiques ! C’est ce que l’exposition propose à la fois dans l’intérieur de la Villa Sauber mais aussi son jardin devenu écrin des cactées avec le concours du Jardin Exotique de Monaco.

Commissaires : Marc Jeanson, ingénieur agronome et botaniste & Laurent Le Bon, président du Centre Pompidou. Interview à suivre Laurent Le Bon.
Villa Sauber, NMNM
https://www.nmnm.mc/expositions/cactus

Les Années Folles de Coco Chanel, Nouveau Musée National de Monaco – Villa Paloma

Si Deauville a été un marqueur décisif dans le parcours de Gabrielle Chanel, c’est à Monte-Carlo au sein du luxueux Hôtel Ermitage qu’elle ouvre sa 2ème boutique, la Principauté étant synonyme de vie moderne et sportive (premières Olympiades féminines en 1921). Des loisirs au grand air que la créatrice décline en manifeste, la Côte d’Azur étant un terrain d’expérimentation et d’amitiés artistiques fertiles, la compagnie des Ballets Russes étant établie à Monte-Carlo. Avec Cannes pour 3ème enseigne, c’est la ligne Riviera qu’impose Chanel à rebours des normes en vigueur, son vestiaire étant principalement masculin et androgyne. Point culminant de cette aventure, la villa La Pausa que Coco acquiert en 1928 à Roquebrune-Cap-Martin où elle séjourne pendant une vingtaine d’années au milieu de ses proches : le Duc de Westminster, Jean Cocteau (installé dans le pavillon des invités), Salvador Dali et sa femme Gala, Winston Churchill, Misia Sert, Serge Lifar…aborant un style chic tout en simplicité, avec coupe à la garçonne, pantalon fluide et indispensable marinière. Sa marque de fabrique qui trouve vite écho chez ses riches clientes en villégiature bientôt adeptes de sa gamme de solaires, parfums et cosmétiques. Cette exposition d’une décennie emblématique en parallèle de la réouverture de la Pausa par la maison Chanel est une expérience unique.

Madame d’Ora, La créatrice de mode Coco Chanel, avant 1923, Photographie gélatino-argentique 21,8 x 16 cm Museum für Kunst und Gewerbe Hamburg, © Estate of Madame d’Ora, Museum für Kunst und Gewerbe Hamburg

Les Années Folles de Coco Chanel
Jusqu’au 5 octobre 2025
Nouveau Musée National de Monaco
https://www.nmnm.mc/expositions/les-annees-folles-de-coco-chanel

« Couleurs ! » chefs-d’oeuvre du Centre Pompidou au Grimaldi Forum, Monaco

Didier Ottinger, commissaire est le directeur adjoint du Musée national d’art moderne.
Si le sujet peut sembler a priori sans surprise, il n’en est rien tellement cette traversée multi sensorielle est riche en découvertes et résonances ! En parallèle au parcours réunissant des oeuvres emblématiques des collections modernes et contemporaines et des pièces de design ont été orchestrées dans des installations par Marion Mailaender. Autre innovation : des chambres d’écho ont été aménagées pour permettre au visiteur de se plonger dans des déclinaisons sonores et olfactives de chacune des couleurs. Le compositeur et designer sonore Roque Rivas en collaboration avec l’Ircam et le « nez » Alexis Dadier avec la Maison Fragonard ont été très inspirés pour ses déclinaisons en BLEU, BLANC, ROUGE, ROSE et VERT. Catalogue (Skira) incontournable, en vente sur place. Interview Didier Ottinger à suivre.

« Couleurs ! » chefs-d’oeuvre du Centre Pompidou
Jusqu’au 31 août 2025
Grimaldi Forum, Monaco
https://www.grimaldiforum.com/fr/agenda-manifestations-monaco/exposition-couleurs-chefs-d-oeuvre-du-centre-pompidou

Ingo Niermann
With Anna María Millán, Roman Bayarri, Ville Haimala, Franziska Aigner and Dan Bodan
Sea Lovers, 2020 Single-channel video installation, color, sound
19 min 40 sec Commissioned by TBA21–Academy Still: Courtesy the artist

Biennale des arts et de l’océan, Nice : Avec 11 expositions, 1 parcours dans la ville

Commissaires généraux : Jean-Jacques Aillagon et Hélène Guenin

Incontournable à la Villa Arson l’exposition programmatique Becoming Ocean: a social conversation about the ocean, avec TBA21 Thyssen-Bornemisza Art Contemporary et la Fondation Tara Ocean. Plus de vingt artistes internationaux prennent part à l’exposition, mêlant approches critiques et documentaires à des formes d’expression plus sensorielles, poétiques ou spéculatives.

Au Palais Lascaris, l’artiste Anne-Laure Wuillai, résidente à la Station, prélève dans son atelier laboratoire des échantillons d’eau de mer, des grains de sable, des pierres, des algues et bien d’autres matières, pour recréer des biotopes dans son atelier-laboratoire, où alambics, solutions chimiques et planches d’observation cohabitent avec pinceaux et crayons.

En off, l’exposition « Ressacs » au 109 avec comme commissaire Isabelle de Maison Rouge. Le ressac évoque les répercussions négatives qui surgissent après la fin d’un événement ou d’une période. Sa proximité étymologique avec le mot « saccage » renforce l’idée d’un déferlement brutal, intensifié lors des marées montantes. Terme issu du lexique océanographique et hydrologique, il est aussi utilisé de manière métaphorique pour désigner certaines réalités de la condition humaine, que l’artiste cherche à transcender.

https://le109.nice.fr/programmation/ressacs

» La mer autour de nous », Nice 2025

https://anneedelamer.nice.fr/biennale-des-arts-et-de-locean

NICEAUNTIES, Auntlantis série – Sweeping the Floor, Trashy Friends, Day in the Life Of, 2024
© Niceaunties

« Bleu profond. L’océan révélé. », les Franciscaines

Des abîmes aux abysses, de la faune marine de l’invention de la photographie à l’apparition de l’aquarium : formes et motifs artistiques, observation scientifique et immersion, c’est tout un imaginaire qui est convoqué dans une approche transhistorique par Jean de Loisy, le commissaire.

Jusqu’au 21 septembre 2025
Les franciscaines de Deauville
https://lesfranciscaines.fr/fr/expositions

Claire Chesnier «une éclaircie à la verticale», vue d’exposition au CCC OD, Tours, France, juin 2025 (commissaire: Marine Rochard) © Photo Aurélien Mole

Claire Chesnier, « une éclaircie à la verticale », CCC OD

Claire Chesnier investit la galerie blanche du CCC OD avec ses œuvres récentes. Ses peintures, véritables espaces sensibles, convoquent souvenirs, récurrences et instants suspendus. Chacune d’elles se compose d’un tissage de couleurs, de transparences et de lumières, patiemment déposées en strates. En surface, une répartition horizontale des masses affleure, évoquant une ligne d’horizon, point de rencontre entre ciel et terre, plus proche d’un passage subtil que d’une frontière nette, aussi délicate qu’un sfumato de la Renaissance italienne.

Pour les parisien·nes de l’été :

Si le Centre Pompidou ferme ses portes pour 5 ans, ses collections voyagent au Centre Pompidou Metz (interview Chiara Parisi), Grimaldi Forum de Monaco…

Gabriele Münter, « Peindre sans détour », Musée d’art moderne de Paris

Un destin contrarié et méconnu, son compagnon Vassily Kandinsky l’ayant éclipsé. Co-fondatrice du cercle d’avant-garde du Cavalier Bleu, elle est une pionnière de l’expressionisme. On l’avait découverte photographe au Pavillon Populaire de Montpellier, on plonge dans sa palette influencée par le cloisonnisme. Gabriele soutient Kandinsky et accueille avec lui les compagnons du Cavalier Bleu à Murnau, même si elle reste complètement dans l’ombre de ces hommes. Reconnue artiste de son vivant, ses œuvres sont qualifiées d’art dégénéré par les nazis pendant la 2nde guerre mondiale. Sa rupture avec Vassily, la plonge dans des dépressions et l’éloigne un temps de son art. C’est parce qu’elle va cacher de nombreuses œuvres du Cavalier Bleu dans sa maison du Murnau qu’elle participe à la reconnaissance de ce mouvement.

https://www.mam.paris.fr/fr/expositions/exposition-gabriele-munter

« Nous autres » au Bal

Donna Gottschalk, Jill, San Francisco, 1971, Courtesy de l’artiste et de Marcelle Alix © Donna Gottschalk

DONNA GOTTSCHALK et HÉLÈNE GIANNECCHINI avec CARLA WILLIAMS, une histoire de générations et de filiations
Pour la première fois en France, les œuvres de Donna Gottschalk, Carla Williams et Hélène Giannecchini sont réunies. Trois femmes, trois générations, trois approches, photographie, histoire de l’art, littérature, unies par une même exigence : rendre visibles des vies longtemps tenues à l’écart des récits dominants. Cette exposition naît de leur rencontre.

Donna Gottschalk, née en 1949 dans le quartier populaire d’Alphabet City à New York, est photographe. Depuis la fin des années 1960, elle documente les vies de celles et ceux avec qui elle a vécu, milité et travaillé. Son regard s’est construit en parallèle de l’émergence des premiers mouvements pour les droits des personnes LGBT+, auxquels elle prend part activement, dans un contexte où l’homosexualité reste encore criminalisée aux États-Unis.

Donna Gottschalk, Jill, President Street, Brooklyn, New York, 1968

Hélène Giannecchini, née en 1987 à Paris, est écrivaine et théoricienne de l’art. Son travail s’attache aux paroles absentes et aux images effacées, avec une attention particulière portée aux mémoires queer et aux archives minoritaires. Lors de sa première rencontre avec Donna en 2023, une complicité immédiate naît entre elles. En confiance, Donna lui ouvre ses archives, que Hélène explore, interroge et réassemble.

Carla Williams, née en 1965 à Los Angeles, est photographe et historienne de l’art. Sa série Tender résonne intimement avec l’œuvre de Donna Gottschalk. Très tôt, alors qu’elle est encore étudiante, elle prend conscience de l’absence criante d’images réalisées par des femmes noires dans l’histoire de la photographie. Avec la volonté de combler ce vide, elle entame, dans l’intimité de sa chambre, une série d’autoportraits affirmés et sensibles.

« Nous autres »
Jusqu’au 16 novembre 2025
Le Bal
https://www.le-bal.fr/

Thérèse Bonney (1894-1978). Paul Poiret et le mannequin Renée dans les salons de sa maison de couture, 1 rond-point des Champs-Elysées. 1927. Tirage gélatino-bromure d’argent par l’ARCP, [198.], d’après le négatif. Bibliothèque historique de la Ville de Paris.

Paul Poiret, la mode est une fête au MAD

Il a libéré le corps féminin avec une ligne simplifiée, d’une grande modernité, loin des carcans fin de siècle. Il annonce la silhouette à la garçonne et les questions de genre. Paul Poiret est un véritable entrepreneur : il collabore avec les Ballets Russes, lance son parfum, travaille pour le cinéma…Il invente le métier de directeur artistique avant l’heure et inspire de très nombreux créateurs actuels.

https://madparis.fr/Paul-Poiret-La-mode-est-une-fete

Liste forcément incomplète, chacun.e tissant son musée idéal au gré des rencontres, des inspirations, des saveurs, des odeurs, du mistral ! Bon été dans la lenteur.

Marie-Elisabeth De La Fresnaye
Après une formation en littérature et histoire de l'art, Marie de la Fresnaye intègre le marché de l'art à Drouot et se lance dans l'événementiel. En parallèle à plusieurs années en entreprise dans le domaine de la communication éditoriale, elle créé son blog pour partager au plus grand nombre sa passion et expertise du monde de l'art contemporain et participe au lancement du magazine Artaïssime.

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