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Depuis les années 1980, Béatrice Helg (Née en 1956) développe une écriture de lumière, par le dispositif de la mise en scène. Le Musée Réattu à Arles est l’écrin de cette exposition constituée de plus de soixante-dix photographies des trente-cinq dernières années. Chaque spectateur découvre des « vues de l’esprit » où se mêlent poésie et atmosphère mystérieuse. Certaines œuvres n’ont jamais été présentées au public.
Les images sont exposées dans les collections permanentes, une grande salle revient sur les premières décennies de création et les sources d’inspiration. L’artiste suisse est très émue et heureuse de cette monographie, elle se rend depuis des années au Musée Réattu.

Exposition In Situ © Fatma Alilate

Gradations de lumière et fluidité des couleurs

Inspirée par la lumière, la musique, l’architecture, les mises en scène de théâtre et en particulier par l’univers de l’opéra, Béatrice Helg crée des tableaux oniriques. Cette magicienne de l’image compose des espaces avec « presque rien » : des matériaux de construction, des plaques de métal oxydées, du verre… Elle constitue des « petits théâtres » par des gradations de lumière et une fluidité des couleurs. Les photographies sont des invitations à l’imaginaire. 

© Béatrice Helg – Crépuscule XIV, 2006

Le parcours s’ouvre sur Crépuscule XIX (2006). Dans les salles aux hauts plafonds, les photos en grands formats de différentes séries semblent se rejoindre par des arrière-plans. « Quand une série commence, il y a toutes sortes de lumières, je ne le sais pas à l’avance », explique Béatrice Helg. Parfois, les œuvres naissent d’une commande, c’est le cas de Cosmos I, Wagner étude de scène (2013) qui apparaît dans un passage donnant sur une cour du musée, et qui est à l’origine de la série COSMOS (2013-2023). 

© Béatrice Helg – Cosmos-XX – 2022

Pour le Bicentenaire de la naissance de Wagner, la Fondation Martin Bodmer souhaitait une œuvre pour une exposition hommage. La photographe s’est appuyée sur la notion d’œuvre d’art totale, chère au compositeur, et ses interrogations l’ont menée à la conception d’un Cosmos. « Je suis très sensible à Wagner, je voyage pour assister à ses opéras, je me souviens de fantastiques mises en scène. (…) La musique est une grande source d’inspiration. La pratique musicale est déterminante dans ma manière d’écrire avec la lumière. » 

Echappée I (2014) semble répondre au dialogue des œuvres et invite à de nouvelles découvertes.

© Béatrice Helg – Esprit froissé-VII – 2000

Des tableaux de la série ESPRIT FROISSE (1999-2001) occupent un espace intimiste. Les papiers forment des « apparitions », en suspension. Sans titre (1997) est la première œuvre : « Une œuvre a besoin de temps et c’est par la suite qu’elle trouve une place », confie Béatrice Helg. Cette salle-tribune à l’atmosphère feutrée offre une vue en surplomb sur la Chapelle dont la luminosité est sublimée par Cosmos XVIII (2018), et Profondeurs IX (2009). 

© Béatrice Helg – Metropolis-III – 1987

Impression de flottement

Une grande salle est consacrée aux premières photographies de Béatrice Helg, et une salle-mezzanine réunit THEÂTRE DE LA LUMIERE et SCALA, des années 1990. L’esprit de la scène est très présent, ce sont des décors architecturaux qui pourraient accueillir du lyrique ou de la danse. 

Dès l’âge de vingt ans, alors que Béatrice Helg est musicienne, des images déjà sculpturales et construites s’imposent à son besoin d’expression. La photo Le Violoncelle (1976) a été réalisée à la chambre photographique 4×5 pouces. « Il y a tous les ingrédients : l’espace, la lumière, la matière, la texture, la transparence, l’opacité, les jeux d’échelle », commente Béatrice Helg. 

L’étape de la chambre Polaroïd 50×60 centimètres est fondamentale et favorise un langage visuel plus audacieux, les recherches sur la couleur. La photographe pratique le Cibachrome : « un papier par couches pour sa stabilité, la vibration du support ». Dès que ce procédé n’est plus produit, Béatrice Helg passe au numérique, et explore de nouvelles possibilités plastiques. Les univers abstraits réinventent les notions de l’éphémère, la clarté, des jeux d’ombres, une impression de flottement.

© Béatrice Helg – Labyrinthe – 1991

Le parcours reprend dans les collections permanentes. Trois pièces d’ESPRIT FROISSE sont proposées dans la salle des Grisailles de Jacques Réattu (1760-1833). L’effet des drapés des peintures monumentales d’inspiration antique s’harmonise au sujet. « C’est gigantesque, s’enthousiasme Béatrice Helg, je n’aurais jamais pensé qu’une Grisaille puisse être décrochée pour trois de mes photographies. » 

Dans la salle préférée de la photographe, Cosmos XI (2015) aux dégradés gris fait face au Griffu (1952) de Germaine Richier. Les fenêtres par leur verdure laissent deviner une cour ombragée. Tout à côté, L’Odalisque en bois polychrome (1932) d’Ossip Zadkine contemple le paysage du Crépuscule XVII (2009). 

Fatma Alilate

Commissariat : Béatrice Helg et Daniel Rouvier, Conservateur en Chef du Patrimoine, Directeur du Musée Réattu

INFORMATIONS PRATIQUES

sam05jul10 h 00 mindim05oct17 h 00 minBéatrice HelgGéométries du silenceMusée Réattu, 10 Rue du Grand Prieuré, 13200 Arles

lun07jul(jul 7)10 h 00 mindim05oct(oct 5)19 h 00 minLes Rencontres d'Arles 2025Images IndocilesLes Rencontres d'Arles, 32, rue du Docteur Fanton 13200 Arles

Fatma Alilate
Fatma Alilate est chroniqueuse de 9 Lives magazine.

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