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Art Brussels qui affiche un bilan effervescent – 24 541 visiteurs -contre 25 473 en 2019 et des ventes non stop – se jouait également en ville. L’occasion de prolonger l’effet dopant pour celles et ceux qui ne sont pas déplacés pour la foire, Bruxelles ayant toute l’année de quoi offrir découvertes et jeunes talents dans des lieux toujours atypiques et conviviaux. Ici l’art est question de partage et non d’ego et c’est toujours un petit miracle ce concentré d’influences et d’univers où l’on rejoue les possibles.

Dans les galeries : ma sélection

Heidi Bucher, Mendes Wood (Sao Paulo -Bruxelles)

Heidi Bucher, Mendes Wood gallery

En plus d’une sélection très pertinente à la foire, le solo show de l’artiste suisse Heidi Bucher est très impressionnant. Elle transforme l’espace de la galerie avec ses embaumements de latex de vêtements et d’espaces entre performances et empreintes poétiques aux accents féministes. L’intimité, la sphère domestique, la chambre à soi sont à la source de ses recherches et de ses « écorchements ».

Charbel -joseph H. Boutros chez Jaqueline Martins (Sao Paulo-Bruxelles)

Invitation au rêve et à la décélération chez cet artiste qui aime convoquer l’absence et la trace autour d’une esthétique de la ruine en devenir. A l’instar de ces grandes grandes stèles en marbre brisé provenant de 5 villes différentes qui contiennent les morceaux d’une bague en hommage à un amour vécu et transitoire. A la fin de l’exposition, cette stèle de pierre sera éparpillée pour disparaître.

Hisae Ikenaga par Nosbaum Reding (Forest) avec le soutien de Galila’s POC

Multiforme vue exposition Hisae Ikenaga Nosbaum Reding

En plus de leur très remarqué solo show de Thomas Arnolds à la foire, l’exposition de l’artiste mexicaine basée au Luxembourg, Hisae Ikenaga entre oeuvres et objets domestiques pose la question du ready made entre logique industrielle et processus artisanal. Elle a reçu le LEAP 2020 et en 2021 le Art In Situ OAI -asbl da Vinci.

Michèle Magema chez Irène Laub
commissaire Julie Crenn

Née à Kinshasa, vit et travaille en Bourgogne l’artiste est inscrite dans un récit des colonialités réévalué qu’elle explore sous le prisme de son histoire à partir d’indices et de trajectoires qu’elle tisse entre l’Europe et la République Démocratique du Congo. Ici en Belgique elle retrace à partir des jardins botaniques, les routes du commerce triangulaire.

Fondation A BELLEVILLE, Thomas Boivin
commissaire Tristan Lund

Thomas Boivin Belleville, Trifon Boulevard de Belleville 2017

Ancré dans ce quartier du nord-est parisien, le photographe privilégie un rapport de proximité loin de toute vision mélancolique et édulcorée. Au gré des saisons et des rencontres il capture l’essence même de ce gens entre joies et peines, détresse et fulgurances. La série Place de la République dévoilée pour la première fois, à partir d’une position fixe au même endroit avec un appareil photo monté sur trépied induit une nécessaire et saine complicité entre le photographe et son modèle. Son dernier livre publié par Stanley/Barker est disponible à la librairie de la Fondation.

Dans les institutions :

That is what you came for Els Dietvorst CENTRALE vue exposition

Centrale for contemporary Art se détache très nettement avec Els Dietvorst, lauréate du BelgianArtPrize 2021. L’exposition est née des réflexions de l’artiste pendant la pandémie. Elle est visible également à Bozar. Elle transforme Centrale en laboratoire immersif autour de ses rencontres dans le quartier multiculturel d’Anneessens (projet le retour des hirondelles) et s’entoure d’artistes invité.e.s. « I love linking energies, linking souls » déclare -t -telle. La photographie d’un petit arbre en cire d’abeille qui se consume dans un main choisie comme image symbole de l’exposition invite à une communion rituelle et à un questionnement sur l’anthropocène et la prédation des ressources naturelles. Se situant hors des logiques commerciales, l’artiste développe une pratique très radicale et inclusive autour de son amour de la capitale belge – carrefour des mondes.

Tactiques du rêve augmenté, la Verrière Fondation d’Entreprise Hermès

Tactiques du rêve augmenté La Verrière Fondation d’Entreprise Hermès

Guillaume Désanges, commissaire, récemment nommé directeur du Palais de Tokyo, achève bientôt son cycle d’exposition à la Verrière Matières à panser dont j’ai suivi toutes les étapes avec grand intérêt. Tactiques du rêve augmenté réunit une quinzaine d’artistes dont certains exposés pour la première fois à Bruxelles sous l’angle de la science-fiction comme pratique spéculative dans une dérive poétique et désabusée à partir de différents vecteurs de transformations et de réappropriations. Une cartographie en devenir où se détachent notamment les constellations de Marie-Claire Messouma Manlanbien.

Portrait of a Lady, Boghossian Fondation

A partir de la transposition du roman célèbre de Henry James, l’exposition réunit 25 artistes femmes de l’ère paléolithique à la création contemporaine autour du male gaze et d’une possible émancipation. Si l’accrochage est impeccable, le parcours manque un peu de vibrations et d’effets de confrontation auxquels nous sommes habitués à la Villa Empain. Des Vénus de Brassempouy à Mary Cassatt, Paul Delvaux, James Ensor en passant par Elina Brotherus, Thomas Schütte, Cindy Sherman, William Klein… ou l’incontournable Ariane Loze, la liste est prestigieuse.

Elina Brotherus vue exposition Portrait of a Lady Fondation Boghossian

Ne pas manquer de descendre voir l’exposition dédiée à l’architecte Michel Polak (à ne pas confondre avec le cinéaste) qui est tout à fait passionnante. Auteur de la Villa Empain, de l’hôtel Plaza ou de la Résidence Palace, l’architecte des Années Folles signe de véritables paquebots du luxe très innovants aux inspirations orientalisantes ou mauresques. C’est le chantier, véritable carte blanche que lui donne le baron Empain pour sa Villa de l’Avenue Franklin Roosevelt qui condensera sa vision d’une oeuvre d’art totale autour des meilleurs artistes et artisans. La piscine en étant le point d’orgue !

MARAT Assassiné et Omar Ba aux Musées Royaux des Beaux-arts de Belgique

Jacques-Louis David: Marat assassiné (1793) Huile sur toile, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique / Robert Wilson: La Mort de Marat (2013) avec Lady Gaga ©©Bruxelles, MRBA / © courtesy of RW Work Ltd

Si le tableau de Jacques-Louis David est passé à la postérité, peu de gens savent que son original est conservé en Belgique et non au Louvre, l’artiste ayant du fuir son pays pour prises de positions politiques. Le remarquable focus proposé par les Musées Royaux à partir de recherches menées sur le dessin sous-jacent de l’oeuvre confrontées à des interprétations contemporaines signées Lady Gaga, Gavin Turk, Ai Weiwei, Jan Van Imschoot.. ouvre des perspectives inédites. Je retrouve la relecture de Rachel Labastie autour de Charlotte Corday.

L’exposition de l’artiste sénégalais Omar Ba que nous dévoile Mathieu Templon dans son interview spécial sur la foire (relire), rassemble 20 toiles majestueuses conçues spécialement autour des hybridations et « anomalies » qu’il explore et dénonce. Les enjeux sociaux et politiques de notre temps, les défis de la pandémie sous le prisme du costume et de la parade.

Eleven Steens un espace brut et gigantesque (4 niveaux) comme Bruxelles aime les offrir avec Jean-Marc Dimanche aux commandes. Créateur de la Maison Parisienne, il a créé la Biennale DE MAINS DE MAITRES LUXEMBOURG. Le craft est passion et l’exposition actuelle artefacts réunit : le collectif VIV de la Haute École des Arts du Rhin à Strasbourg autour du bijou contemporain, le peintre français Antoine Carbonne (Beaux-arts de Paris), la bruxelloise diplômée la La Cambre, spécialiste en art textile Arlette Vermeiren et la française basée à Bruxelles Elise Peroi également maître du tissage que l’on retrouve à la l’Ancienne Nononclature autour de la belle proposition de Maria Lund.

Elise Peroi, Eleven Steens

Elise Peroi, vue de l’exposition © Jules Toulet

Art Brussels Week
https://www.artbrussels.com/
Artsy Online Viewing Room
Agenda : les galeries et centres d’art
NECA
Art centers :
Portrait of a Lady – Fondation Boghossian
Tactiques du rêve augmenté – La Verrière Fondation d’Entreprise Hermès
That is what you came for Els Dietvorst – CENTRALE for contemporary art
MARAT assassiné Musées Royaux des beaux-arts de Belgique
Omar Ba Voyage au-delà de l’illusion – Musées Royaux des beaux-arts de Belgique
BELLEVILLE Thomas Boivin – Fondation A
Eleven Steens – espace dédié à l’art et la matière

Organiser votre venue :
Visit Brussels
www.thalys.com/fr

That is what you came for Els Dietvorst CENTRALE vue exposition

Marie-Elisabeth De La Fresnaye
Après une formation en littérature et histoire de l'art, Marie de la Fresnaye intègre le marché de l'art à Drouot et se lance dans l'événementiel. En parallèle à plusieurs années en entreprise dans le domaine de la communication éditoriale, elle créé son blog pour partager au plus grand nombre sa passion et expertise du monde de l'art contemporain et participe au lancement du magazine Artaïssime.

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