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Pour le week-end inaugural du Festival Planches Contact, La Caravana Obscura, une caravane transformée en un immense appareil photo, a sillonné la ville de Deauville. La caravane est équipée d’un laboratoire argentique qui permet à un large public de découvrir le développement de la photographie en Noir et Blanc. Le succès est intergénérationnel, les groupes de réservation ont été immédiatement complets. Lolita Bourdet est à l’origine de ce projet, elle est désormais accompagnée par d’autres photographes comme Louisa Ben, présente à Deauville.

Lolita Bourdet a suivi la formation Beaux-Arts de Cergy-Pontoise. Elle est artiste-photographe et propose un travail documentaire depuis plusieurs années, elle a publié un livre. Louisa Ben a rejoint le projet de façon ponctuelle depuis deux ans. Photographe documentaire et aussi artiste photographe, elle réalise des reportages pour de prestigieux magazines comme Le Monde Magazine, El País

Lolita Bourdet, Festival Planches Contact Deauville © Fatma Alilate

Lolita Bourdet, Festival Planches Contact Deauville © Fatma Alilate

Fatma Alilate : Lolita, pouvez-vous présenter votre projet pour La Caravana Obscura ?

Lolita Bourdet : Ma passion c’est de faire découvrir la photographie à différents publics, notamment la jeunesse mais pas seulement. J’ai été en résidence en 2016, j’ai poursuivi un travail autour d’une caravane transformée en un appareil photo géant et équipée d’un laboratoire photo. L’idée c’est d’être très mobile, d’aller à la rencontre de tous types de publics. C’est immersif et simple d’accès car quand on entre dans la Caravana Obscura, on entre dans un appareil photo. Un atelier se décline et on passe par toutes les techniques de la photographie comme la profondeur de champ, le temps de pause, la lumière. Ces techniques deviennent très simples à l’intérieur de la caravane et tout se voit avec les yeux. On peut avoir quatre ans comme quatre-vingt-dix ans, et la photo est un procédé compréhensible. Le développement se fait en direct et sur place. Il y a un côté magique car l’image se crée sous les yeux, sur une feuille. Le fait que les personnes partent avec une photo qu’elles ont fabriquée et développée avec nous, c’est intéressant car c’est aussi un souvenir particulier. Les personnes posent pendant plusieurs secondes. C’est un vrai engagement, une mise en scène pour chaque personne qui participe à l’atelier. J’ai eu des Prix qui m’ont permis de développer ce projet, de le faire voyager, notamment le Prix Mondes nouveaux avec le Ministère de la Culture en 2022 et le Prix Echo Culture Award de la Fondation Chaumet en 2023. J’ai pu former d’autres artistes-photographes à l’animation d’ateliers comme Louisa Ben.

Caravana Obscura © Antoine Sabourin

Caravana Obscura © Antoine Sabourin

Caravana Obscura © Antoine Sabourin

Caravana Obscura © Antoine Sabourin

FA : C’est comme si on entrait dans un appareil photo parce qu’il y a un laboratoire argentique.

Lolita Bourdet : Il y a une partie appareil photo, c’est une camera obscura. Tout ce qui fait face à la caravane se projette naturellement à l’intérieur, à l’envers dans le fond de la caravane, vraiment comme n’importe quel appareil photo. Ce phénomène de la chambre noire est un outil ancestral, Léonard de Vinci s’en servait et il y a des traces écrites qui datent de l’an 400 avant notre ère. Donc les gens découvrent ce phénomène qui est assez magique. Et ensuite, le laboratoire permet d’expérimenter les étapes de fabrication d’une photo argentique, de découvrir comment avec la lumière on peut inscrire une image. On passe de la réalisation d’un négatif, à la réalisation d’un positif et la personne repart avec la photo.

FA : Vous êtes installée à Montreuil.

Lolita Bourdet : Je suis en Seine-Saint-Denis, c’est grâce au Prix du Ministère de la Culture que j’ai pu installer la caravane dans les Murs à pêches à Montreuil, nous accueillons du public et nous nous déplaçons. Je suis aussi co-fondatrice de l’association Les Cousines, un collectif d’artistes féminines dans les arts visuels : photographes, artistes plasticiennes, peintres… On est installées à Montreuil et on fait beaucoup de projets de médiation avec le public, notamment un public fragilisé et éloigné de l’offre artistique.

Lolita

Laure & Gilles

couple Fakele

Famille Bochent

FA : Que vous apporte l’expérience du Festival Planches Contact ? Vous rencontrez plus d’une vingtaine de photographes, vous êtes en immersion pendant quatre jours.

Lolita Bourdet : Ce territoire est très intéressant. On a pu aller dans différents lieux. Cet après-midi, on était dans un quartier dans les hauteurs de Deauville, demain nous serons en front de mer. C’est aussi très enrichissant de rencontrer d’autres photographes, certains que l’on connaît et d’autres que l’on découvre. Le Festival est magnifique, les installations à l’extérieur ou les expositions aux Franciscaines qui est un lieu magistral. C’est hyper valorisant d’être parmi ces personnes. Laura Serani (directrice artistique du Festival Planches Contact), je l’avais rencontrée sur le Prix Le Bal, c’est un honneur de la revoir ici.

FA : Votre caravane rencontre beaucoup de succès notamment auprès des enfants, comment l’expliquez-vous ?

Lolita Bourdet : C’est le côté ludique. Cette caravane interpelle dès qu’on s’installe dans l’espace public, les gens se questionnent sur cet équipement. Tout le monde connaît la caravane, elle évoque des souvenirs pour certains. Souvent on se fait embarquer dans l’histoire de la photographie sans le savoir au départ. C’est vraiment des moments magiques et d’échange, chaque groupe a des réactions différentes.

Camille et son lapin

Olivier et Renée

Lucien, Suzette et Charlene

FA : Louisa, quand avez-vous commencé cette expérience, que vous apporte-t-elle ?

Louisa Ben : J’ai rejoint le projet il y a deux ans, c’est de manière ponctuelle. Je fais découvrir le médium photographique à des publics différents. Ce qui est chouette c’est le côté mobilité, on peut être autant à Deauville, dans un Festival de photos avec un public averti, et on peut animer des ateliers dans un collège auprès de jeunes qui n’ont jamais entendu parler d’un appareil photo argentique. Ça permet de montrer les étapes. Quand tu parlais des enfants, ce qui leur plaît c’est vraiment ce côté magique. Sur la feuille blanche apparaît la photo en direct et les enfants sont habitués à la photo en instantané et là il y a tout un procédé lent.

Lolita Bourdet : Les gens partent avec leurs photos, ce n’est pas autant éphémère que les images numériques.

Louisa Ben : C’est quelque chose qu’ils ont fabriqué et qui est unique. Le public est acteur de l’expérience et ça contribue au succès et ça plaît aux enfants, aux personnes âgées. On a eu aussi un public très jeune, des trois – quatre ans.

FA : Quand les personnes quittent cette caravane, elles sont joyeuses, ça fait plaisir.

Lolita Bourdet : Nous allons aussi auprès de personnes qui ont un handicap. J’ai adapté la caravane pour qu’elle soit accessible aux fauteuils roulants. Avec les personnes qui sont en situation de handicap mental, on peut se dire qu’il va il y avoir des appréhensions par rapport à la technique de la photographie et pas du tout, ce côté immersif et ludique, ça marche très bien. Chacun peut prendre ce qu’il veut dans cette caravane.

Propos recueillis par Fatma Alilate

INFORMATIONS PRATIQUES

sam19oct(oct 19)10 h 00 min2025dim05jan(jan 5)19 h 00 minPLANCHES CONTACT 2024Le Festival de Photographie de DeauvilleFestival Planche(s) Contact, 143 Avenue de la République, 14800 Deauville

Fatma Alilate
Fatma Alilate est chroniqueuse de 9 Lives magazine.

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