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Carte blanche à Klavdij Sluban : Aleksandra Vajd, Femme photographe slovène

Temps de lecture estimé : 7mins

À l’occasion de sa carte blanche, le photographe français Klavdij Sluban a choisi une dizaine de femmes photographes slovènes qu’il nous a présenté chaque jour. Aujourd’hui, nous découvrons la onzième et dernière artiste, il s’agit d’Aleksandra Vajd. Elle explore les frontières du médium photographique pour se concentrer sur la matérialité de la lumière… Son travail intitulé « 36 Dramatic Situations », proposé ce jour, vient clore la série de portfolios consacrés à ces femmes photographes slovènes qui luttent pour exister.

Aleksandra Vajd est née en 1977 à Maribor (Slovénie), vit et travaille à Prague (République tchèque), où elle a obtenu un Masters en photographie à la FAMU. Elle a également obtenu un diplôme de photographie à la State University of New York, à New Paltz.
Son œuvre que l’on pourrait qualifier de « post-conceptuelle » est une expérimentation questionnant les lois et les variations structurelles des divers éléments du langage photographique.

Aleksandra Vajd a travaillé et crée en binôme avec l’artiste tchèque Hynek Alt pendant 15 ans. Ce qui la stimulait dans ce dialogue collaboratif est la naissance d’une troisième identité, née de la somme de deux individualités.

Leurs œuvres ont été exposées dans nombre d’expositions en Europe (Futura et Atelier Josef Sudek à Prague, Musée d’art moderne de Ljubljana) et aux Etats-Unis (Bard College and Samuel Dorsky Museum à New Paltz, Centre Culturel Tchèque de New-York, Museum of Contemporary Photography de Chicago). Ils ont reçu de nombreux prix, bourses et résidences comme The First Prize of the Frame 005 Award de Brno en République Tchèque, ont été nominés pour le Deutsche Börse Photographic Award et obtenu une bourse de la Fulbright Foundation.

Depuis 2008, Aleksandra Vajd dirige le Département de Photographie à l’Académie des Arts, d’Architecture et du Design à Prague.
Elle est représentée par la galerie Lucie Drdova Gallery à Prague.

Pour son projet plus récent intitulé, (en anglais):
MALE NAME SELLS ME
SAND, LAKE, ALE
MAKES ME MEAN AND SAD,
AND MEANS JINK
[Le titre-poème est un anagramme du nom des artistes ]

(Titre original en tchèque):
DAR JMÉNA, ALE I NÁS
JÍM NÁSLEDEK RÁNA
DERE NÁS JÍL A KAMNA
NÁŠ JÍL. RAMENA. DEKA.
JÍL, RAMENA AND SAKÉ
JÍL, RAMENA & SAKÉ

Aleksandra Vajd a également collaboré avec plusieurs artistes. Travailler avec un écrivain, un designer et une céramiste a profondément influé son propre processus de création, particulièrement dans la phase finale du projet qui a abouti à la publication d’un livre. Le projet initial a été une rencontre et une collaboration avec Jimena Mendoza, artiste mexicaine. Ensemble, les deux artistes ont crée des sculptures combinant photographie et céramique.

Avec une approche totale de déconstruction du médium photographique Aleksandra Vajd en casse toutes les règles de base, comme la pratique, en général, solitaire, pour proposer outre un langage nouveau, des formes visuelles nouvelles.
Son œuvre se donne à voir dans un espace d’exposition de manière tout à fait différente qu’imprimée dans un livre.
Chaque mise en forme et chaque support utilisé sont traité comme une création nouvelle, avec les possibilités et les limites du support en question.

Avec ses représentations qui ont relégué le documentaire au siècle dernier, les œuvres d’Aleksandra Vajd sont plus à vivre qu’à simplement regarder.
La participation du regardeur est le dernier maillon de la chaîne de collaborateurs qui interviennent dans la création de chaque pièce.

Le degré d’abstraction atteint dans la représentation ainsi que le concept qui induit chaque projet ne prend pas pour autant la forme d’une entité hermétique qui nécessiterait l’usage d’un mode d’emploi pour y pénétrer.
Au contraire, il ne s’agit pas de comprendre mais bel et bien de ressentir. Comme disait Claude Simon « L’art c’est ce qui crée une émotion ».

Son projet le plus récent se présente sous forme d’une installation visuelle, une plateforme qui représente un index de toutes les situations dramatiques que l’on peut rencontrer dans les comportements humains. Selon cette théorie développée au 19ème siècle par l’écrivain français dans 36 Situations Dramatiques il existerait pour tout type de scénario 36 situations dramatiques de base.

Les photogrammes présentés sur la plateforme sont une proposition des diverses représentations d’états de l’âme. Aucune association directe entre l’objet représenté et la notion de situation dramatique. Juste plonger dans la complémentarité qu’offre l’association de ces divers médiums.

En conclusion, offrons-nous cet inventaire à la Perrec.

Décollons.

Implorer : un personnage en péril implore qu’on le tire de l’embarras.
Sauver : un personnage se propose pour en sauver un ou plusieurs autres.
Venger un crime : un personnage venge le meurtre d’un autre personnage.
Venger un proche : une vengeance au sein d’une même famille.
Être traqué : un personnage doit s’enfuir pour sauver sa vie.
Détruire : un désastre survient, ou va survenir, à la suite des actions d’un personnage.
Posséder : un désir de possession (un bien, un être, etc.) contrevenu.
Se révolter : un personnage insoumis se révolte contre une autorité supérieure.
Être audacieux : un personnage tente d’obtenir l’inatteignable.
Ravir ou kidnapper : un personnage kidnappe un autre personnage contre sa volonté.
Résoudre une énigme : un personnage essaie de résoudre une énigme difficile.
Obtenir ou conquérir : un personnage principal essaie de s’emparer d’un bien précieux.
Haïr : un personnage voue une haine profonde à un autre personnage.
Rivaliser : un personnage veut atteindre la situation enviable d’un proche.
Adultère meurtrier : pour posséder son amante, un personnage tue son mari.
Folie : sous l’emprise de la folie, un personnage commet des crimes.
Imprudence fatale : un personnage commet une grave erreur.
Inceste : une relation impossible entre proches.
Tuer un des siens inconnus : un personnage tue un proche sans le savoir.
Se sacrifier à l’idéal : un personnage donne sa vie pour un idéal.
Se sacrifier aux proches : un personnage se sacrifie pour sauver un proche.
Tout sacrifier à la passion : une passion se révèle fatale.
Devoir sacrifier les siens : pour un idéal supérieur, un personnage sacrifie un être proche.
Rivaliser à armes inégales : un personnage décide d’affronter un autre plus fort que lui.
Adultère : un personnage trompe un autre personnage.
Crimes d’amour : un personnage amoureux s’égare et commet un crime.
Le déshonneur d’un être aimé : l’être aimé se livre à des activités répréhensibles.
Amours empêchées : un amour est entravé par la famille ou la société.
Aimer l’ennemi : un personnage en aime un autre même s’il est son ennemi.
L’ambition : un personnage est prêt à tout pour concrétiser son ambition.
Lutter contre Dieu : un personnage est prêt à affronter Dieu pour assouvir son ambition.
Jalousie : mépris et jalousie amènent un personnage à poser des actes regrettables.
Erreur judiciaire : un personnage est injustement accusé et condamné.
Remords : rongé par la culpabilité, un personnage a des remords.
Retrouvailles : après une longue absence, des personnages se retrouvent ou se reconnaissent.
L’épreuve du deuil : un personnage doit faire le deuil d’un personnage aimé.

En savoir plus
https://drdovagallery.com/2019/03/10/aleksandra-vajd/

La Rédaction
9 Lives magazine vous accompagne au quotidien dans le monde de la photographie et de l'Image.

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