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The Eyes Publishing viennent d’éditer « Faire Face – Histoires de Violences conjugales ». Cet ouvrage rassemble trois séries autour d’une même thématique réalisées ces quatre dernières années par la photographe française Camille Gharbi. Une trilogie venue border les contours de ce que l’on a longtemps appelé à tort des crimes passionnels. Qui sont les victimes ? Qui sont les bourreaux ? Quels sont les processus systémiques, sociaux et juridiques qui entourent ces crimes ? Ce livre évoque la réalité de ces violences, leur intensité, leur banalité. A travers ces histoires singulières -racontées en images et en mots- c’est la société entière qui doit « faire face » , pour déconstruire les systèmes de pensées et encourager la recherche de solutions constructives.

Preuve d’amour © Camille Gharbi

La première série « Preuves d’amour » a été présentée à l’occasion de nombreuses expositions. Nous avions d’ailleurs rencontré Camille Gharbi dans le cadre du festival Circulation(s) en 2019 pour nous présenter ce travail. Dans « Preuves d’amour » ont découvre de manière distanciée les armes qui ont servi à tuer des femmes par leur mari, amant, ex-compagnon. Si la majorité des féminicides sont provoqués par des armes à feu ou des couteaux, on oublie que les objets du quotidien, somme toute banals peuvent devenir des armes létales. Ici, seul compte les faits : des photographies froides et épurées montrant les objets du drame, des prénoms, des âges, des dates, des lieux… Une chose est sûre, ces violences touchent n’importe quelle femme et ce quel qu’en soit l’âge.

Toufik, Les monstres n’existent pas © Camille Gharbi

Le deuxième chapitre présente une série moins connue, elle laisse la parole aux bourreaux. Dans « Les monstres n’existent pas« , on découvre des hommes mais aussi des femmes, qui sont des individus parfaitement intégrés à la société, loin des stéréotypes véhiculés. Les portraits sont réalisés de trois-quart, de dos, sans faire face, leur témoignages perturbent et bousculent toutes nos certitudes. Parmi ces « monstres », une femme – Emy -, incarcérée pour homicide volontaire sur son ex-conjoint… violent. Elle exprime sa culpabilité malgré la violence et les viols subis, malgré les plaintes aussi. Ce sont aussi les victimes qui peuvent tuer.

« Il manquait à celles qui étaient douée pour affirmer leur génie de quoi vivre du temps et une chambre à soi » – Virginia Woolf

Rebecca, Une chambre à soi © Camille Gharbi

Enfin, on termine par « Une chambre à soi » – dont le titre est tiré d’une citation de Virginia Wolff. Ici, Camille Gharbi est partie à la rencontre de femmes hébergées par l’association FIT – Une Femme Un Toit », qui accueille les jeunes femmes (de 18 à 25 ans) en situation de violences sexuelles, intrafamiliales et/ou conjugales. Ce centre d’hébergement devient le temps d’un moment un refuge pour tenter de se reconstruire avant de démarrer, on l’espère une nouvelle vie.

INFORMATIONS PRATIQUES
Faire Face. Histoires de violences conjugales
Camille Gharbi
Textes et entretiens : Raphaële Bertho,Ivan Jablonka, Lorraine de Foucher, Carole Groulet
Direction artistique : Sarah Boris
The Eyes Publishing
21 x 27cm, 196 pages
ISBN : 979-10-92727-49-4
35 euros
https://theeyes.eu/
https://www.camillegharbi.com/

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Continuum des violences faites aux femmes Entretien avec le photographe Marc Melki et l’association Droits d’urgence
Virginie Merle a suivi la Marche contre les violences sexistes et sexuelles
Circulation(s) 2019 : Rencontre avec Camille Gharbi autour de Preuves d’amour
Les crimes passionnels n’existent pas, récits de féminicides par Arianna Sanesi aux éditions D’une rive à l’autre

Ericka Weidmann
Après des études d'Arts Appliqués et de photographie, elle rejoint un magazine en ligne consacré à la photo en tant que directeur artistique, poste qu'elle occupera pendant 10 ans. En 2010, elle s'installe comme DA en indépendant. En parallèle, elle devient responsable éditorial pour Le Journal de la Photographie et c'est en septembre 2013 qu'elle co-fonde le quotidien L’Oeil de la Photographie pour lequel elle est rédactrice en chef jusqu'en septembre 2016 avant de fonder 9 Lives magazine ! Ericka Weidmann est également journaliste pigiste pour d'autres médias.

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