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Partager Partager Temps de lecture estimé : 7minsAu milieu de nulle part entre le parking d’un supermarché et un poste de police, l’IKOB museum surgit dans la ville d’Eupen à l’est de la Belgique aux confins de la frontière avec l’Allemagne. Le musée a été fondé par l’artiste Francis Feidler en 1993 d’abord comme Centre international d’Art de la Communauté Germanophone de Belgique pour devenir un musée à part entière avec une collection de 600 œuvres d’artistes belges, néerlandais, allemands, luxembourgeois selon le carrefour géographique qu’il représente. A l’occasion de l’exposition de l’artiste polonais Marcin Dudek (Harlan Levey Projects) rencontre avec son directeur, Frank-Thorsten Moll qui décrit les paradoxes d’un territoire très riche en centres culturels (Eurorégion Meuse-Rhin) mais peu visible sur l’échiquier de l’art européen. Il ambitionne de faire du musée une plateforme d’échanges entre l’Allemagne et la Belgique. Vue de l’exposition Marcin Dudek Akumulatory © IKOB – Museum für Zeitgenössische Kunst, Photo : Lola Pertsowsky Vue de l’exposition Marcin Dudek Akumulatory © IKOB – Museum für Zeitgenössische Kunst, Photo : Lola Pertsowsky Né en 1977, Frank-Thorsten Moll a obtenu en 2005 une maîtrise en histoire de l’art et en théorie des médias. Auparavant, il avait déjà travaillé au ZKM – Center for Art and Media à Karlsruhe, en Allemagne, et comme guide à la Documenta 11. De 2005 à 2006, il a travaillé comme assistant du professeur Lydia Haustein à la Maison des cultures du monde (HKW) à Berlin. En 2006, il devient conservateur à la Kestnergesellschaft, à Hanovre. En 2009, il devient conservateur au Zeppelin Museum de Friedrichshafen, en Allemagne, où il est responsable de la collection d’art et de diverses expositions temporaires. Il travaille avec des artistes comme Bruce Nauman, Raymond Pettibon, Barbara Kruger et Phoebe Washburn, entre autres. Vue de l’exposition Marcin Dudek Akumulatory © IKOB – Museum für Zeitgenössische Kunst, Photo : Lola Pertsowsky A quand remonte l’origine du projet avec Marcin Dudek ? Cela remonte à la visite de Brenda Guesnet, notre curatrice, à la galerie Harlan Levey. Il s’inscrit dans la sphère géographique des artistes que nous exposons habituellement selon une grande région du nord de la France, aux Pays Bas, Flandres, et à l’Allemagne. Nous recherchons toujours l’inattendu et restons ouverts. Ce qui rentre parfaitement dans notre démarche est qu’il provient d’une ère de changements post soviétiques, assez proches des défis qui s’imposent à nous. Si chacun est conscient des changements à opérer en matière de décroissance, de société capitaliste, nous sommes relativement frileux et craintifs alors que beaucoup d’individus et d’artistes ont déjà vécu un changement radical dans leurs vies. Avec Henrike Naumann nous avons exposé une artiste allemande qui a le même âge que nous et qui se concentre également beaucoup sur l’esthétique de tels changements. Nous avons aussi de très bonnes relations avec Harlan Levey et il était certain que nous ferions quelque chose avec l’un de ses artistes. Quel mode de fonctionnement du musée privilégiez-vous ? Il est vain de vouloir changer ce qui fait l’ADN d’un lieu, son origine. J’ai décidé de prendre cela comme un avantage. Nous ne sommes pas un musée avec des règles ou procédures strictes. Nous faisons beaucoup de choses semblables à d’autres musées mais nous nous réinventons à chaque exposition. Quelle est la provenance des visiteurs ? Je parlerais en pourcentages plus qu’en chiffres. Principalement de la région proche : 60% proviennent de la communauté germanophone de la Wallonie, puis l’Allemagne, principalement Aix la Chapelle. Nos voisins pour résumer même si cette cartographie n’a pas tenue pendant la pandémie. Les plus réticents à nous visiter restent les Wallons pour qui des frontières culturelles persistent, cette zone étant considérée comme étrangère en raison de la langue aussi. Qu’est-ce qui vous a séduit dans l’idée de ce musée ? Je suis allemand d’origine et je ne dirigeais pas d’institution avant. J’étais chef de département dans un grand musée, le Zeppelin Museum de Friedrichshafen, responsable d’une collection mais pas d’un musée en tant que tel. Mes premières impressions en arrivant face à ce carrefour et ce bâtiment étaient : mais que se passe-t-il ici ? (rires). Puis je suis entré et me suis dit quel bel ensemble ! Et puis l’interview a eu lieu sur un autre modèle que celui auquel j’étais habitué sur mes actions passées, succès et projection chiffrées, mon potentiel de carrière… mais beaucoup plus ouvert. J’ai ensuite été confirmé et déménagé ici sans jamais le regretter même si mes collègues en Allemagne n’arrivent toujours pas à comprendre ce qui se joue vraiment ici. Comment décririez-vous la scène artistique wallonne ? Un peu trop renfermée sur elle-même. Ce que l’on peut dire aussi d’autres scènes même si les artistes ici se sentent un peu enclavés, n’ayant pas les mêmes moyens et visibilité que les flamands par exemple. Quels synergies ou changements souhaitez-vous développer ? Nous avons envie à présent de transformer le rez-de-chaussée en un espace pluridisciplinaire (workshops, conférences, expositions..) dont le design sera confié à un artiste chaque année. Nous souhaitons être plus flexibles pour ressembler plus à un Centre d’art contemporain français. J’organise des expositions depuis 25 ans maintenant et je réalise que j’ai besoin de changer le logiciel. Une révolution douce des formats en quelque sorte. Vous avez organisé un projet avec le réseau « Very Contemporary » Nous avons en effet invité ce festival de performances, ce qui a été une bonne expérience. Nous soutenons cette association transfrontalière sans assise juridique formelle mais avant tout collégiale. Ce club de directeurs de structures de Wallonie, Nord de la France jusqu’à Maastricht (Eurorégion Meuse-Rhin) réfléchit à comment attirer plus de gens dans cette région qui représente toujours le Far Ouest ou le Far Est mais qui concentre un large nombre de structures culturelles. Il faut vraiment se décider à aller jusqu’à Eupen si vous vivez en Belgique ou en France ! L’exposition Private Views donnait à voir les collections wallonnes à La Boverie, que pensez-vous des collectionneurs belges ? Ils sont discrets (rires) et je me demande toujours en ce qui concerne les collectionneurs flamands quels trésors ils gardent dans leurs réserves étant donné la réputation et l’engagement qu’ils ont. Ils ne se contentent pas de cocher les cases d’une liste mais ils suivent et soutiennent véritablement leurs artistes. Ce qui explique la place des artistes flamands à un niveau international. Dans cette région il y a quelques collectionneurs mais vraiment très discrets. Ce qui est intéressant ici est le grand nombre de résidences secondaires. Les artistes et notamment allemands aiment beaucoup avoir un atelier ici, de l’autre côté de la frontière. La vie de la collection Nous avons à présent 600 œuvres, et avons perdu 200 œuvres lors d’une inondation en 2021 qui a été terrible pour de nombreuses infrastructures. Parmi les 200 oeuvres stockées seulement 9 d’entre elles ont pu être restaurées. Nous projetons d’exposer nos dernières acquisitions compensatoires à la fin de l’année 2024. Nous dédions aussi l’un des murs de notre nouvel espace du rez-de-chaussée à nos œuvres restaurées. 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