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Peut-on tout publier ? Quand Paris Match montre une photographie du cadavre de Vanessa Campos

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Dans son numéro de la semaine dernière, le magazine Paris Match publie son enquête sur le meurtre de Vanessa Campos. Sur la couverture, un portrait de Meghan Markle tout sourire, une image qui contraste durement avec le dossier concernant l’assassinat d’une jeune femme perpétré en août dernier, où sur une pleine page, on voit la photographie… de son cadavre. Fait étonnant car dans la presse française, on publie rarement des photos de nos propres morts (ceux des autres seraient moins choquants ?). Alors pourquoi montrer ce cliché ? Information ou Sensationnalisme ?

Aurions-nous accepté de voir une photographie du cadavre d’Alexia Daval ou encore de celui de Patricia Bouchon (deux histoires qui ont défrayé la chronique ces dernières années) ? Le respect des familles, et sans doute la crainte de poursuites judiciaires l’auraient logiquement empêché…
Mais voilà, Vanessa Campos n’est pas une victime comme les autres. Elle est péruvienne, c’est une travailleuse du sexe, et c’est une femme transgenre. Quel critère a permis que l’on publie une telle image ? Sans doute un peu des trois, qui font qu’on ne la considère plus vraiment comme un être humain. Cette image, difficilement supportable, a bien entendu fait réagir (un peu) sur les réseaux sociaux, en particulier dans la communauté transgenre.

Dans une interview publiée l’an passé dans Mowwgli , Régis le Sommier, directeur adjoint de la rédaction de Paris match, le disait simplement « On ne publiera pas un cadavre pour publier un cadavre. » Or ici, il se pourrait bien que cette image n’ait pour seul but que celui de montrer le corps dénudé de la victime, dans la pénombre de la nuit. Quel intérêt, hormis porter atteinte à la dignité de la défunte et choquer son entourage ? Que raconte cette photographie ? Dans son enquête, le magazine l’introduit d’un titre aguicheur « Les nuits fauves du Bois de Boulogne », suivi d’un article  qui enchaîne les clichés. Cette publication est le reflet d’un traitement médiatique caricatural sur le transidentité et la prostitution.
Il serait temps que ça change.

Ericka Weidmann
Après des études d'Arts Appliqués et de photographie, elle rejoint un magazine en ligne consacré à la photo en tant que directeur artistique, poste qu'elle occupera pendant 10 ans. En 2010, elle s'installe comme DA en indépendant. En parallèle, elle devient responsable éditorial pour Le Journal de la Photographie et c'est en septembre 2013 qu'elle co-fonde le quotidien L’Oeil de la Photographie pour lequel elle est rédactrice en chef jusqu'en septembre 2016 avant de fonder 9 Lives magazine ! Ericka Weidmann est également journaliste pigiste pour d'autres médias.

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