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Pour cette quatrième édition du festival Les Femmes s’exposent qui se déroule actuellement à Houlgate, les noms des trois lauréates viennent d’être dévoilés lors du week-end d’ouverture. C’est la photographe française Jeanne Frank qui remporte le Grand Prix avec « La vallée est morte », un reportage sur le dérèglement climatique. La française Alexa Brunet et l’allemande Nanna Heitmann reçoivent respectivement le Prix SAIF et le Prix Obs.

“La vallée est morte” de Jeanne Frank
GRAND PRIX LES FEMMES S’EXPOSENT- FUJIFILM

Le vendredi 2 octobre 2020, la tempête Alex, ravageait plusieurs vallées des Alpes-Maritimes dont celle de la Roya, la plus enclavée. Des pluies diluviennes, 560 millions de tonnes d’eau, sont tombées en quelques heures. Les inondations ont fait dix morts et huit disparus. Dans la commune de Breil sur Roya, l’eau est montée à plus de 2m50 dans le centre-ville. Un peu plus haut, les communes de Fontan, Saorge, Tende, prisées des touristes, sont désormais coupées du monde. Pour se rendre dans la haute Roya, il faut maintenant parcourir 25 kilomètres à pied, le long d’une route jonchée de débris et de branches. Des kilomètres de routes sont hors d’usage, dix ponts ont été pulvérisés, plusieurs maisons emportées ou fragilisées.
Livrés à eux-mêmes, les habitants des villages enclavés auront attendu 48h avant l’arrivée des premiers hélicoptères qui apportent les vivres et rapatrient les personnes fragiles. Les habitants essaient tant bien que mal de s’organiser, entre aide immédiate et système D. Il faut penser l’après. Les travaux de reconstruction seront colossaux. Ils couteront au minimum un milliard d’euros pour les trois vallées. Et comment reconstruire en tenant compte des réalités abruptes de la modification du climat ? Les maires des communes sont inquiets ; ils veulent éviter l’exode des habitants. Certains ont déjà quitté la Vallée. « La Vallée, elle est morte pour des années », dit-on ici.
Des reportages réalisés en octobre pour Le Monde et Médiapart.

“Utopic théâtre” d’Alexa Brunet
PRIX SAIF – LES FEMMES S’EXPOSENT

Lettre de photographe, 4e lettre, avril 2020, © Alexa Brunet / transit pour ARTE / PRIX SAIF – LES FEMMES S’EXPOSENT 2021

Pourquoi y a-t-il autant de personnages enfermés contre leur gré dans les histoires pour enfants ? De Raiponce à la femme de Barbe bleue, en passant par Hansel et Gretel, la Belle au bois dormant ou Sherhazade. En poussant plus loin, même Robinson sur son île, Noé sur son arche et Jonas dans sa baleine, cela fait un grand nombre de confinés ! Je vis dans un petit hameau ardéchois perdu dans un écrin de verdure entre un ruisseau et une montagne.
J’ai quitté la ville en 2010, sans regret, depuis je tiens rarement en place et ai le sentiment de n’exister que dans le mouvement. Le confinement m’a incitée à me poser. J’ai profité de cette bulle spatio-temporelle pour photographier mes proches de façon ludique, transcender notre quotidien et inventer des histoires en famille. Celles provoquées par des situations subies comme l’école à la maison, la fête d’anniversaire sans copains, etc. En puisant dans notre imaginaire, souvent inspirés par les contes enfantins, nous avons transformé notre lieu de vie en petit théâtre utopique, loin des rumeurs du monde.

Dans le cadre de « Lettres de photographes », une série réalisée à l’initiative du programme de recherche d’Arte TV dirigé par Paul Quezan.
L’exposition sera à découvrir à la Maison des photographes – UPP à l’automne prochain.

« Utrish : à propos des palais et des « sauvages » » de Nanna Heitmann
PRIX OBS – LES FEMMES S’EXPOSENT

Utrish : à propos des palais et des « sauvages » © Nanna Heitmann /
PRIX OBS – LES FEMMES S’EXPOSENT 2021

La réserve naturelle d’Utrish, située sur une demi-île au bord de la mer Noire, est le seul endroit en Russie qui abrite une végétation méditerranéenne telle que des pistachiers et des genévriers uniques vieux de 500 ans. Les écologistes appellent cet endroit « le cœur des écosystèmes méditerranéens ». Depuis les années 1960, ses lagons sont un lieu de prédilection pour les nudistes, yogis et hippies qui viennent y passer l’été. Si la plupart partent dès qu’il fait plus froid, une poignée d' »Utrishiens » y vit à l’année. Ce sont des ermites russes orthodoxes, des adeptes de Krishna, des vétérans ou simplement des personnes qui ont décidé de vivre dans la nature, loin de la civilisation.
Mais le parc national d’Utrish se retrouve au cœur des convoitises ; l’ancien président russe Medvedev y a un projet de résidence de luxe. Et non loin se situe le « palais de Poutine » révélé par la récente enquête sur l’opposant politique russe Alexej Navalny qui a entraîné les plus grandes manifestations en Russie depuis 2011. Cette vidéo accuse le président Vladimir Poutine de posséder en cachette un somptueux domaine de 1,7 G$, devenu le symbole de la corruption qui sévit à la tête de l’Etat.
Pourtant les Utrishiens défendent leur espace de liberté. En 2009, avec les écologistes, ils se sont interposés physiquement pour arrêter la construction d’une route à travers la réserve jusqu’à la résidence prévue de Medvedev. En août 2020, alors qu’énorme incendie s’est déclaré en trois endroits du parc, ils ont formés une chaine humaine pour maitriser l’incendie, des heures avant l’arrivée des hélicoptères bombardiers d’eau.

INFORMATIONS PRATIQUES

mar01jui10 h 00 mindim05sep(sep 5)18 h 00 min4ème édition Les Femmes s'exposent OrganisateurLes Femmes s'exposent

Ericka Weidmann
Après des études d'Arts Appliqués et de photographie, elle rejoint un magazine en ligne consacré à la photo en tant que directeur artistique, poste qu'elle occupera pendant 10 ans. En 2010, elle s'installe comme DA en indépendant. En parallèle, elle devient responsable éditorial pour Le Journal de la Photographie et c'est en septembre 2013 qu'elle co-fonde le quotidien L’Oeil de la Photographie pour lequel elle est rédactrice en chef jusqu'en septembre 2016 avant de fonder 9 Lives magazine ! Ericka Weidmann est également journaliste pigiste pour d'autres médias.

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