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Après son appel à candidature lancé l’été dernier, le Centre Photographique d’Île-de-France vient d’annoncer le nom de ses deux artistes qui entreront en résidence à l’Atelier de recherche et de post-production. Dans un premier temps c’est la photographe française Julie Rochereau qui débute sa résidence avec un projet sur le site de la Corniche des Forts à Romainville. Cet automne ce sera au tour d’Hélène Bellenger de développer ses recherches autour de son projet intitulé « Bianco Ordinario ».

Julie Rochereau

Julie Rochereau, Sans titre, Etat limite, 2020, épreuve argentique sur verre, 20 x 30 cm, courtesy de l’artiste

« Le site de la Corniche des Forts à Romainville abrite une étrange forêt, qui s’est élevée de manière autonome sur une ancienne carrière de gypse abandonnée depuis plus de 60 ans. Symbole d’une nature résiliente, elle abritait plusieurs espèces d’écureuils, divers oiseaux et d’autres insectes. Aujourd’hui, une partie de la forêt est en chantier, pour l’installation d’une base de loisir*.

Découvert par hasard en 2017, cet espace hybride, m’a tout de suite fascinée par sa beauté vague et ambiguë. À la fois espace sauvage et friche industrielle, il est aussi espace limite, aux frontières floues entre forêt et urbanité : un îlot de résistance à la « société de contrôle » annoncée par Gilles Deleuze dès les années 1990.
Mouvant, ce territoire cristallise alors les nombreuses contradictions de notre rapport aux espaces dits « naturels ». Pour le philosophe Jean-Baptiste Vidalou, la forêt aujourd’hui n’est plus qu’ « une simple ressource à gérer […] tantôt mythe récréatif, tantôt gisement de bois. »

À l’image des situationnistes qui voulaient se réapproprier l’espace urbain par l’imaginaire, mes visites s’apparentent à des dérives « psycho-photographiques » pour tenter d’appréhender ces lieux qui demeurent insaisissables. »

Julie Rochereau est née en 1982. Elle vit et travaille à Montreuil.
Artiste, photographe et vidéaste, elle est diplômée du Master Art Photographie et Art contemporain de l’Université Paris 8. Dans sa pratique, elle s’intéresse au paysage contemporain à travers des recherches sur la matérialité de l’image photographique et sa mise en espace. Son travail a notamment été sélectionné pour la Biennale de l’image tangible (Paris, 2018), Circulation(s) (Le CENTQUATRE, Paris, 2014), et plus récemment pour le prix Création émergente en Île-de-France POLY __ (2021).

Hélène Bellenger

Hélène Bellenger, Sans titre (industrie papetière), 2021, courtesy de l’artiste

Bianco Ordinario, ou blanc ordinaire, est le nom donné au marbre de Carrare.
Cette appellation se chuchote mais ne se dit pas car elle renvoie l’image d’un blanc commun et répandu, loin du caractère rare et immaculé du marbre statuaire de Carrare.
Initié à l’été 2020, ce projet d’Hélène Bellenger prend racine dans les carrières de marbre de Carrare, situées dans les Alpes Apuanes en Italie. Sculptées depuis des siècles pour la qualité de leur marbre blanc, très prisées par les artistes et les designers, ces carrières sont aujourd’hui surexploitées pour l’utilisation de la poudre de marbre, carbonate de calcium à l’état pur.
Utilisée notamment dans la composition du dentifrice, du maquillage, du papier ou des produits d’entretien, la poudre de marbre vient ainsi se nicher dans l’histoire de la « blanchité » (Judith Ezekiel) de nos sociétés occidentales contemporaines.
À travers un vocabulaire à la fois photographique et plasticien, il s’agira de lier l’histoire des représentations dominantes à celle de la transformation du paysage. Par un travail qui traverse les thématiques du paysage et de l’écologie à l’ère de l’ anthropocène, ainsi que de la culture visuelle traitée par le prisme de la critique féministe, Bianco Ordinario tend ainsi à questionner les rouages de production de la subjectivité blanche occidentale et son impact sur l’environnement et les imaginaires collectifs.

Hélène Bellenger est une photographe plasticienne installée à Marseille.
Par la collection et le détournement, l’artiste mène des investigations au sein de la culture visuelle de notre temps et déconstruit l’espace intermédiaire du “ re ” de représentation.
Depuis 2017, ses travaux ont été présentés par Agnès B (Paris), le 62e Salon de Montrouge, les galeries Binôme et Younique (Paris), la Fondation Luma (Arles), le Festival Circulation(s) (Paris), le Centre de la Photographie de Genève, la Galerie Soma (Le Caire), la Galerie Fonderia 20.9 (Vérone), le musée Nicéphore Niépce (Chalon-sur-Saône) ainsi que les centres d’art d’Annemasse, Aix-en-Provence et Embrun.
En 2018 elle fait partie des lauréats du Prix Dior de la Photographie pour jeunes talents et en 2020, elle est lauréate du Prix Impression Photographique avec les Ateliers Vortex et le musée Niépce.
En 2021, Hélène Bellenger est lauréate de bourse de recherche et création Eurazeo et de l’Aide à la Création de la DRAC PACA avec son projet Bianco Ordinario.

ACTUELLEMENT AU CPIF

dim23jan(jan 23)14 h 00 mindim10avr(avr 10)18 h 30 minIpáamamu - Histoires de WawaimUn projet mené par Eléonore Lubna et Louis MattonCPIF - Centre Photographique d'Ile-de-France, 107 Avenue de la République, 77340 Pontault-Combault


A LIRE
Sandra Rocha, CPIF « Le moindre souffle »
Lauréats 2021 de l’atelier de recherche et de post-production du CPIF

Ericka Weidmann
Après des études d'Arts Appliqués et de photographie, elle rejoint un magazine en ligne consacré à la photo en tant que directeur artistique, poste qu'elle occupera pendant 10 ans. En 2010, elle s'installe comme DA en indépendant. En parallèle, elle devient responsable éditorial pour Le Journal de la Photographie et c'est en septembre 2013 qu'elle co-fonde le quotidien L’Oeil de la Photographie pour lequel elle est rédactrice en chef jusqu'en septembre 2016 avant de fonder 9 Lives magazine ! Ericka Weidmann est également journaliste pigiste pour d'autres médias.

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