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Commençons l’année sous un prisme stimulant et inspirant : le soleil dans les arts. Orbe rouge chez les Égyptiens, figure masculine dénommée Hélios, Apollon, Phébus en Grèce puis à Rome, le soleil a toujours fasciné les hommes, incarnation de Dieu dans l’Antiquité. S’il est masculin en Europe, symbole de puissance et de beauté, les grands monarques s’approprient rapidement son image, comme en témoigne la fabuleuse tapisserie de Jean Lurçat « Soleil de Paris » qui ouvre le parcours de l’exposition Face au soleil. Un astre dans les arts, du Musée Marmottan-Monet.

Autour des 150 ans Impression soleil levant peint par Claude Monet au Havre le 13 novembre 1872 au petit jour depuis une fenêtre d’hôtel sur le port, le musée parisien et le Musée Barberini à Potsdam (2ème plus important fonds impressionniste en Europe) explorent la polyphonie des sens et des représentations de l’astre dans les arts. Un total de 53 prestigieux prêteurs, autour d’une centaine d’œuvres retracent son aura à travers les âges, tandis qu’un ensemble de dessins, photographies et instruments de mesure provenant de l’Observatoire de Paris revient sur les différents développements scientifiques notamment autour des éclipses, dans le sillage de Copernic.

Paul Signac, Le Port au soleil couchant, Opus 236 (Saint-Tropez), 1892
Potsdam, Museen der Hasso Plattner Foundation gGmbH © Hasso Platner Collection

Du géocentrisme, la science passe à l’héliocentrisme après l’intérêt et l’observation du soleil et de la lune à la Renaissance.

Cette appétence pour les découvertes astronomiques se déplace alors dans la peinture de paysage.

Le thème d’une nature au soleil, levant ou couchant, se développe. Les œuvres Pierre-Paul Rubens (musée du Louvre, Paris), Claude Gellée dit Le Lorrain (musée du Louvre, Paris), Joseph Vernet (Dulwich Picture Gallery, Londres), William Turner, Caspar David Friedrich, Gustave Courbet, Eugène Boudin retracent cette évolution dont Impression, soleil levant de Claude Monet apparaît comme l’un des sommets.

Arthur G. Dove,Soleil rouge,1935. Huile sur toile, 51,4 x 71,1 cm. Washington, The Phillips Collection. © Washington, courtesy The Phillips Collection.

Les années 1880-1914 marquent une nouvelle étape. À la science de l’observation qu’est l’astronomie s’ajoute celle de l’astrophysique qui permet d’étudier la nature physique des objets célestes. Ces développements scientifiques majeurs, largement retranscrits par la presse de l’époque, permettent de mieux connaître le soleil dont on découvre la composition
chimique. Le soleil devient un sujet d’étude à part entière et un thème en soi pour les artistes.
On ne peint plus seulement un paysage dominé au loin par l’astre, mais l’astre lui-même selon un cadrage serré. Chaque mouvance offrant une vision qui lui est propre : naturaliste et harmonieuse chez les nordiques Valdemar Schønheyder Møller, Laurits Tuxen, Anna Ancher; symboliste chez Félix Vallotton; poétique chez le fauve André Derain, l’orphiste Delaunay ou le
futuriste Wladimir Baranov-Rossiné; expressionniste voire tragique chez Albert Trachsel, Otto Dix et Edvard Munch…

The Sun, Edvard Munch 1910

Vers 1920, une nouvelle révolution – la théorie de la relativité générale d’Einstein qui établit que l’univers est en perpétuel expansion – interrompt le face à face des artistes avec le soleil.
Les poétiques constellation de Miró et les stabiles de Calder rendent compte de cette dilatation de l’espace. Dans cette immensité en perpétuelle croissance, le soleil n’est plus qu’une modeste étoile : toujours éblouissante chez Richard Warren Poussette-Dart, promise à disparaître chez Piene. L’Impression soleil levant, 2019 de Gérard Fromanger s’inscrit dans cette lignée et renouvelant depuis l’espace le point de vue proposé par Monet il y 150 ans, clôture l’exposition. Servi par une scénographie très réussie, ce parcours touche, entre naturalisme et symbolisme, autant les phénomènes météorologiques que psychologiques et émotionnels. Plongez-y !

Gérard Fromanger, Impression, soleil levant 2019 – 2019 – Anna Kamp © Studio Christian Baraja SLB

Commissariat : Marianne MATHIEU, directrice scientifique du musée Marmottan Monet, Paris
et Dr. Michael PHILIPP, conservateur en chef au musée Barberini, Potsdam

HORS LES MURS musée Marmottan-Monet : MONET / MITCHELL
Fondation Louis Vuitton

Ce partenariat a tout son sens eu égard à la proximité géographique entre les deux établissements, à la présence d’importantes œuvres de Joan Mitchell dans les collections de la Fondation et à l’exceptionnel ensemble des œuvres de Claude Monet de sa période tardive – celle pendant laquelle il travaillait aux Nymphéas de l’Orangerie – au musée Marmottan Monet.

Joan Mitchell ne se réclamait pourtant pas de Monet même si elle a pu exprimer sa préférence pour le « late Monet » mais il existe de vraies parentés entre les deux univers : cette ampleur dans le geste pictural, dans le format, cette incroyable sensibilité dans les juxtapositions de tons.

Infos pratiques :
FACE AU SOLEIL
jusqu’au 29 janvier 2023
Musée Marmottan-Monet
2, rue Louis-Boilly
75016 Paris
Tarifs :
Plein tarif : 12 euros
Tarif réduit 8,50 euros
https://www.marmottan.fr/

 

Marie-Elisabeth De La Fresnaye
Après une formation en littérature et histoire de l'art, Marie de la Fresnaye intègre le marché de l'art à Drouot et se lance dans l'événementiel. En parallèle à plusieurs années en entreprise dans le domaine de la communication éditoriale, elle créé son blog pour partager au plus grand nombre sa passion et expertise du monde de l'art contemporain et participe au lancement du magazine Artaïssime.

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