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La ville de Leuven renommée pour son université prestigieuse, propose avec BOUM ! le festival Big Bang d’explorer le lien entre la science et l’art à travers la fascination de l’homme pour le cosmos et son origine. Ce festival est une collaboration entre la Ville de Louvain et la KU Leuven. A cette occasion Eva Wittocx, conservateur art Actuel au M Leuven, a invité l’artiste britannique au rayonnement international Richard Long. De plus, Eva Wittocx cofondatrice du festival d’art vivant Playground en partenariat avec le centre d’art STUK de Leuven, nous en détaille les ambitions. Le M Leuven est bel et bien ancré dans l’art d’aujourd’hui même si son ADN s’inscrit dans une longue histoire entre l’ancienne habitation néoclassique et le nouveau complexe muséal tout en transparence de l’architecte Stéphane Beel dévoilé en 2009 autour de riches collections (25 000 objets) des Flandres et du Brabant jusqu’à des œuvres d’art contemporain belge.

Un art de la synthèse qui infuse la programmation et les différents projets artistiques comme actuellement avec l’artiste égyptien Wael Shawky autour de nouvelles œuvres produites par le musée. Un soutien à la création qui se remarque également avec la carte blanche donnée à l’artiste français Alexis Gautier. Des missions plurielles qui animent Eva Wittocx qui depuis son arrivée, ambitionne avec le directeur général, de mettre le M Leuven sur l’échiquier des grandes institutions muséales belges et internationales. Eva Wittocx a répondu à mes questions.

Retour sur l’exposition de Richard Long (BOUM ! le festival Big Bang)

Vue de l’exposition Richard Long M Leuven 2022 photo Dirk Pauwels

Cela a été assez compliqué car pendant la pandémie Richard Long n’a pas pu venir au musée donc nous avons du imaginer la conception de l’exposition par d’autres moyens : emails, échanges vidéos et mêmes courriers. Il a juste découvert les salles et le musée 10 jours avant le vernissage. Nous avons privilégié des œuvres appartenant plutôt à des collections européennes ne sachant pas les restrictions de voyage et de transport et l’évolution de la situation. Nous présentons des sculptures en pierre, en bois, des photographies, des textes pour offrir un large panel de médiums. Il a aussi décidé de créer deux œuvres in situ directement sur le mur à l’aide de sable et d’eau en réponse à la thématique du festival Big Bang, la Gravity Line et le cercle : Hands of clay circle qui correspond à l’univers.

En terme de public et de réception du public quel est le bilan ?

Ce festival attire un large public international qui vient aussi au M Leuven pour la combinaison offerte d’expositions plus historiques. De plus Richard Long est un nom très connu qui attire à lui tout seul des gens venus de partout. Même si l’exposition n’était pas très grande le public a été très impressionné par les œuvres murales, les site-specific installations.

La carte blanche à Alexis Gautier qui a lui-même invité d’autres artistes

Vue de l’exposition Alexis Gautier, L’heure de la soupe M Leuven photo Miles Fischler

Dans le cadre de ce focus sur l’émergence nous souhaitons fournir un accompagnement le plus large possible aux artistes à travers le soutien à la production des œuvres, leur monstration, une publication et dans le cas d’Alexis Gautier un programme de performances. L’artiste étant engagé dans une approche collaborative, il initie un dialogue inter culturel et inter générationnel entre des artistes, des artisans, des employées du musée autour de plusieurs médiums. De multiples synergies et scénarios combinatoires.

Comment avez-vous découvert l’artiste ?

J’avais remarqué deux de ses œuvres réalisées en soie dans une exposition collective et je l’ai retrouvé en tant que performeur cette fois dans une autre exposition solo. Nous avons alors amorcé un dialogue et j’ai visité son atelier à plusieurs reprises. J’ai décidé ensuite de lui donner carte blanche pour ce projet dans le musée.

L’exposition de Wael Shawky : genèse et enjeux

Wael Shawky Dry Culture Wet Culture M Leuven 2022 photo Dirk Pauwels

Le point de départ est toujours d’inviter l’artiste à visiter les espaces et en ce qui le concerne cela remonte à 3 ans. Wael Shawky adapte toujours les œuvres présentées au lieu et à l’environnement qui l’accueillent. En découvrant pour la première fois la salle qui ouvre sur un panorama sur la ville de Leuven il a été fasciné par cette vue et a souhaité présenter une sorte de paysage de formes, de bâtiments en correspondance avec cette scène urbaine. Nous avons produit cette grande installation The Gulf Project Camp : Drama ce qui veut dire que pendant plusieurs semaines une équipe a réfléchi avec lui au choix des matières, des couleurs, des dimensions, de l’implantation dans l’espace. De même pour l’autre installation que nous produisons spécialement The Gulf Project Camp : the Wall 2, un mur recouvert d’asphalte sur lequel sont tendues des toiles qui rappellent les tentes des Bédouins.

Nous trouvions intéressant de rapprocher ses recherches récentes autour de Gulf Project Camp avec de nouveaux éléments autour de Cabaret Crusades : des bas-reliefs et des dessins. Ces bas-reliefs en bois font le lien avec la peinture historique de nos collections.

Wael Shawky Dry Culture Wet Culture M Leuven 2022 photo Dirk Pauwels

Les collections du M Leuven couvrent plusieurs siècles d’écart, une donnée importante dans son ADN et votre démarche curatoriale, comment cela se traduit-il ?

Pour le public il est en effet intéressant de pouvoir découvrir à la fois des œuvres du Moyen Age et des créations très actuelles et pour nous de créer des programmations en parallèle même si le lien n’est pas direct. C’est le bâtiment qui nous guide et dans la présentation de la collection nous avons souhaité de ne pas suivre un fil historique ou chronologique mais thématique comme actuellement autour de la notion du temps autour d’œuvres de plusieurs périodes.

En ce qui concerne les expositions nous présentons uniquement que des solos shows pour mettre l’artiste au cœur et engager ce dialogue dont je parlais précédemment et ce soutien que nous lui apportons afin de favoriser sa visibilité sous plusieurs formes. La démarche est assez différente pour chacun et nous donnons toujours à l’artiste un éclairage sur la collection historique en les incitant à faire des liens mais pas de façon obligatoire.

Le festival Playground : quelles origines et ambitions ?

Le STUK a fondé le festival en 2007, époque à laquelle j’y travaillais. Depuis 2009 c’est une collaboration entre STUK et le M Leuven. Maintenant la programmation est faite par Steven Vandervelden du STUK, Lore Boon et moi-même du M. Il nous semblait important de proposer aux artistes d’expérimenter de multiples formes et formats de création, hors des catégories habituelles autour de ces zones poreuses entre arts plastiques et arts vivants. Le temps de 4 jours nous présentons ces créations éphémères dans les salles de spectacle du STUK, les espaces du musée ou l’espace public selon l’initiative d’Alexis Gautier qui a proposé cette année à un petit groupe de visiteurs de participer à une exploration originale de Louvain. Notre ambition est susciter une réflexion sur l’art et les moyens de le présenter et d’encourager les gens à sortir de leur zone de confort. Nous privilégions dès lors des performances qui suscitent des questionnements. Nous invitons chaque année une dizaine d’artistes internationaux.

BOUM ! le festival Big Bang : quel est son positionnement ?

A Leuven nous avons une université scientifique prestigieuse et ce festival bi-annuel organisé par KU[N]ST Leuven est une collaboration entre la Ville de Louvain et la KU Leuven. Un thème assez ouvert est retenu à chaque édition pour favoriser des expositions dans le musée et aussi des projets dans la ville. La dernière édition était autour de Georges Lemaître le contemporain d’Einstein à l’origine de la théorie du Big Bang. L’exposition Richard Long s’inscrit dans ce cadre ainsi que de nombreuses autres initiatives.

Quelles seront les prochaines expositions ?

Nous maintenons toujours un équilibre entre artistes belges et internationaux et le 6 mai prochain nous inaugurons deux expositions, d’une part une exposition avec l’artiste émergent Naufus Ramírez-Figueroa originaire du Guatemala très présent sur la scène internationale et d’autre part une exposition dédiée à des artistes de la scène de Louvain ou du Brabant flamand, Open M, suivant un appel à candidature que nous lançons tous les 2 ans. En octobre, nous proposerons deux expositions différentes, une jeune artiste belge Kato Six, diplômée de l’Académie des Beaux-Arts de Gand et exposée au WIELS en dans le cadre d’une résidence et aussi une grande exposition historique autour de l’albâtre en lien avec nos collections et en partenariat avec le Louvre.

Comment se traduit votre travail au quotidien ?

Il s’agit d’exercer à la fois un travail de prospection autour de l’actualité artistique à travers des visites d’expositions, d’ateliers, des lectures et également un travail plus concret d’organisation et de gestion des projets avec les équipes en lien avec le conseil d’administration du musée dont je fais partie autour de nombreuses réunions et choses concrètes à mettre en place. Un travail à mener tout en restant en prise avec le monde artistique, ce qui est essentiel si l’on veut lancer des projets et engager une programmation pertinente. Savoir trouver le juste milieu et maintenir un temps de présence réparti à la fois dans le musée et en dehors !

INFORMATIONS PRATIQUES :
Big Bang, le festival qui rend hommage à notre fascination pour la naissance du cosmos
Richard Long, exposition terminée
Wael Shawky, Dry culture, Wet culture
Jusqu’au 28.08.22
Alexis Gautier, L’heure de la soupe
Exposition terminée (se poursuit au CIAP Genk)
Pour être sûr d’une place, il est conseillé de réserver un créneau horaire. Vous pouvez également entrer et vérifier auprès de l’employé de la réception s’il y a de la place.
€ 12 | tarif standard
Leopold Vanderkelenstraat 28, Leuven

https://www.mleuven.be
Ne manquez pas de découvrir également la Collégiale Saint-Pierre.

Organiser votre venue :
VISITFLANDERS

Marie-Elisabeth De La Fresnaye
Après une formation en littérature et histoire de l'art, Marie de la Fresnaye intègre le marché de l'art à Drouot et se lance dans l'événementiel. En parallèle à plusieurs années en entreprise dans le domaine de la communication éditoriale, elle créé son blog pour partager au plus grand nombre sa passion et expertise du monde de l'art contemporain et participe au lancement du magazine Artaïssime.

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