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Rencontre avec Audrey Illouz, responsable du centre d’art Micro Onde (Vélizy)

Temps de lecture estimé : 5mins

Succédant à Sophie Auger-Grappin actuelle directrice du Centre d’art le Creux de l’Enfer (Thiers) que nous avons interviewé en mai dernier, Audrey Illouz a repris les rênes de Micro Onde depuis novembre 2018. Critique d’art et commissaire d’expositions indépendante, Audrey Illouz a notamment été commissaire associée à la Comédie de Caen entre 2015 et 2017) tout en développant des recherches sur Vito Acconci et le Studio Acconci. Elle a notamment organisé les expositions L’Apparition des Images (2013) à la fondation d’entreprise Ricard, Constance Nouvel (Les Rencontres d’Arles, 2017). Elle a été co-commissaire de l’exposition 77 Experiment au CPIF pour les 40 ans du Centre Pompidou avec Aurélie Pétrel, Marina Gadonneix et Marcelline Delbecq.

« Les images parfois prêtes à être activées ou performées malmènent le réel, défient l’espace. La photographie dans le champ élargi prend possession des lieux.  »

S’intéressant donc au médium photographique et ses multiples enjeux, elle livre avec « L’image située » un brillant prolongement des propos de Michel Gauthier qui revient dans son texte « Les mutations de l’espace » sur la contextualisation de l’œuvre en relation avec le lieu qui l’accueille. D’une œuvre située Audrey Illouz prend le pari de l’image, du photographique.

Remake, genèse et enjeux en concertation avec le musée des Beaux Arts

Au cours de mes recherches j’ai observé que l’angle du rapport art et cinéma revient comme en leitmotiv, en filigrane dans la collection notamment à travers la photographie, la vidéo ou le dessin. Aussi lorsque le musée des Beaux Arts de Rouen nous a fait part de ce projet sur les relations art et cinéma j’ai proposé à son directeur Sylvain Amic d’en faire l’écho, nous positionnant sur une approche résolument contemporaine, le musée traitant la partie plus historique des origines jusqu’à la Nouvelle Vague. Nous souhaitions poursuivre la réflexion dans le champ actuel de la création avec un projet totalement orienté sur la vidéo.

Le parcours : défi d’exposer de la vidéo et parti prix scénographiques

Nous avons souhaité interroger le parcours des Beaux Arts de Rouen très construit et articulé partant des inventeurs du cinéma Méliès, Muybridge, en passant par le cinéma surréaliste, expressionniste, le cinéma abstrait pour aller jusqu’à la Nouvelle Vague pour discerner les résonnances de ces mouvements très fortes chez de nombreux artistes contemporains. Nous avons pris comme défi de tenter de rejouer le parcours de façon très fidèle au musée, non seulement autour de la question du remake mais aussi d’un remake d’exposition, instaurant chez le visiteur le sentiment de déjà vu et de pouvoir comparer entre l’original au musée et la copie, le remake au Frac. Ce qui m’intéressait aussi était de ne pas enfermer les vidéos dans des boites noires mais au contraire de pouvoir tisser un maximum de correspondances et de dialogues entre elles, générant comme un écran géant et multiple à l’image de nos environnements numériques aujourd’hui. Cela a demandé un maillage très précis sur le son, le format des vidéos choisi, toutes de format très court et certaines fonctionnant en boucle, comme des tableaux visuels pour susciter cette sorte d’impression animée au sein du Frac.
Le parcours se scinde en 2 parties, l’une véritablement historique qui part des premières lanternes magiques pour arriver aux symphonies urbaines des grandes métropoles. Puis la 2ème partie à l’étage, aborde les enjeux plus contemporains des artistes avec le cinéma et le genre et prolonge jusqu’au 21ème siècle avec par exemple Chris Moukarbel qui rejoue le World Trade Centrer d’Oliver Stone ou Brian de Palma revu par Brice Dellsperger notamment.

Effets spéciaux, une première avec le centre culturel La Forge (Harfleur)

Nous partons toujours d’une exposition thématique au Frac à partir d’ échos dans notre collection pour décliner ce projet dans des hors les murs prolongeant la réflexion. Pour donner corps à Remake cela a nécessité le rassemblement de vidéos du Frac mais beaucoup d’œuvres prêtées et l’idée était de montrer que le cinéma se joue aussi à travers d’autres médiums de notre collection. « Effets spéciaux » nous est venu assez naturellement car nous avons réalisé qu’un certain nombre d’œuvres abordées sous cet angle avait un sens tout particulier avec un côté cinématographique que l’on suppose et qui devient flagrant ici. Cela offre une façon très différente d’analyser et de regarder les œuvres dans un parcours assez drôle orchestré autour des trucages, artifices, de l’incrustation, du masque, du maquillage, du feu (effets pyrotechniques) et surtout des effets de post production avec notamment Kist de Thieres,Santeri Tuori ou Annelies Strba.

La place de la vidéo dans la collection

Même si la vidéo n’est pas le medium principal de la collection, il se trouve que nous avons un fonds totalisant 80 vidéos environ ce qui est reste moins important que la photographie ou le dessin. Mais pour être en cohérence avec la ligne de notre fonds orientée photographie avec comme complément immédiat l’image en mouvement, chaque année 1 ou 2 vidéos sont acquises. L’exposition Remake est aussi pour nous l’occasion de faire le point sur des pratiques d’artistes vidéastes et de poser des jalons pour continuer à enrichir la collection de façon la plus logique et pertinente possible.

Votre 1ère rencontre avec ce médium

Le plus marquant a été pour moi la première Biennale de Lyon consacrée à la vidéo nouveaux médias proposée en 1995 par Thierry Raspail et son commissaire invité, le cinéaste expérimental Georges Rey. Je sortais d’histoire de l’art où ce média n’était pas encore enseigné et je me trouvais face à ces grands artistes d’avant-garde. J’ai été abasourdie face à tant de complexité et de maîtrise. Découvrir que je me trouvais face à une autre histoire de l’art.

INFOS PRATIQUES :
• REMAKE, Quand la vidéo rejoue le cinéma
Jusqu’au 5 janvier 2020
EFFETS SPECIAUX,
Frac Hors les murs – centre culturel La Forge
Rue Frédéric Chopin
76700 Harfleur
• “ARTS ET CINEMA : LES LIAISONS HEUREUSES”
Du 18 octobre 2019 au 10 février 2020
Au Musée des Beaux Arts de Rouen
Espl. Marcel Duchamp
76000 Rouen
http://www.frachautenormandie.org/

Marie-Elisabeth De La Fresnaye
Après une formation en littérature et histoire de l'art, Marie de la Fresnaye intègre le marché de l'art à Drouot et se lance dans l'événementiel. En parallèle à plusieurs années en entreprise dans le domaine de la communication éditoriale, elle créé son blog pour partager au plus grand nombre sa passion et expertise du monde de l'art contemporain et participe au lancement du magazine Artaïssime.

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