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Partager Partager Temps de lecture estimé : 8minsPour sa première carte blanche, notre invitée de la semaine, Laurence Le Guen partage avec nous un texte d’une grande sensibilité sur la photographe oubliée Ergy Landau. Oubliée… jusqu’à ce que la chercheuse découvre son œuvre en 2015 et qu’elle consacre sept années de travail acharné, aux côtés des deux co-commissaires (Kathleen Grosset et David Martens) pour faire naître une première exposition en ligne en 2018 avant de présenter son travail à la Maison Robert Doisneau de Gentilly et publier un catalogue aux éditions du Bec en l’air… Une volonté ferme de sortir cette photographe de l’ombre… « Qui d’entre vous connaît la photographe Ergy Landau ? » C’est ainsi que démarrent les visites guidées de la rétrospective Ergy Landau qui se tient depuis le 23 septembre à la Maison de la photographie Robert Doisneau à Gentilly. Un ou deux doigts se lèvent dans une assemblée d’une trentaine de personnes en général. L’affluence pour cette petite maison. Nous ne sommes pas étonnés. Juste toujours plus motivés à « sortir de l’ombre », (re)mettre son talent dans la lumière », « à lever le mystère » d’une « photographe oubliée » comme s’entendent à titrer leurs articles les généreux journalistes qui ont traversé le périphérique pour rendre compte de ce qu’ils ont vu. Affichage sur le façade de la Maison Robert Doisneau de Gentilly © Kader Benamer Alors je raconte. J’explique comment j’ai découvert cette praticienne remarquable en 2015, au début de mes recherches sur le livre de photographies pour enfants. Je raconte comment, soucieuse de saisir la collaboration créative qui procède à la réalisation d’un ouvrage photo-littéraire pour la jeunesse, j’ai tenté d’enquêter en 2015 dans les archives non classées de Maurice Genevoix qui co-signe avec elle le livre Le petit Chat paru en 1957 chez Arts et Métiers graphiques. Je raconte encore comment j’ai cherché sans succès les traces d’Yves Bonnieux, nom d’emprunt pour le second auteur d’Horoldamba le petit Mongol, paru la même année chez Calmann-Lévy. Je reconnais que c’était par la photographie qu’il fallait commencer. A la source. C’est au tour de Kathleen Grosset de raconter. En 1928, alors qu’il était en vacances à la montagne avec ses parents, Raymond Grosset, le futur directeur de l’agence Rapho, a 17 ans. Il rencontre une vieille femme, âgée en vérité d’une trentaine d’années, penchée vers le viseur de son appareil photo, un Rolleiflex. Cette dame, à la diction sans doute teintée d’un accent des pays de l’est, devient une amie de la famille et l’introduit quelques temps plus tard dans le milieu des jeunes artistes, musiciens, photographes, écrivains, tous exilés de pays de l’Est, l’Allemagne nazie, la Hongrie qui a basculé sous le joug de l’amiral Horthy, …. Virées en camping, en canoë, à la montagne, la photographe fixe sur ses négatifs les souvenirs de ces moments amicaux et les vend régulièrement à une presse soucieuse d’illustrer les articles sur les congés payés, sur le matériel de randonnée ou de ski. Cette photographe n’est pas une débutante. Raymond Grosset découvre bien vite qu’elle participe à toutes les grandes expositions nationales, en France et à l’étranger, qu’elle expose dans les galeries parisiennes et musées, et que ses nus, ses portraits d’écrivains ou d’enfants, ses images de Paris ou de la vie rurale des années 30 sont présents dans toutes les publications de l’époque, des revues artistiques aux plus légères. Il se rend sans doute vite compte que la bonne société et les artistes se pressent dans son atelier du XVIe arrondissement, rue Lauriston puis rue Scheffer. Il apprend également qu’elle défend les droits des photographes aux côtés de Laure Albin-Guillot et Emmanuel Sougez, puis de Charles Rado, émigré hongrois comme elle et qui vient de créer l’agence Rapho. Après la Deuxième Guerre mondiale, elle, qui a refusé de porter l’étoile jaune et a continué à travailler dans son atelier, le pousse à relancer et à diriger l’agence de la rue d’Alger, alors que son fondateur s’est réfugié de l’autre côté de l’Atlantique, comme de nombreux artistes. Cette histoire d’amitié se prolongera jusqu’au décès d’Ergy Landau en 1967, deux ans après son accident avec un bus parisien qui la laissera incapable de travailler. Ce sont en effet la famille Grosset et les copains de l’agence Rapho, Robert Doisneau et Brassaï en tête, qui se cotisent pour engager une infirmière, payer les médicaments, qui lui font croire que ses images se vendent encore, et qui finalement règlent le coût de ses obsèques. Y croyait-elle encore à ces petits mensonges, elle qui, sans héritiers, confia peu avant de mourir ses tirages, négatifs et souvenirs de famille à son ami de quarante ans ? Vue d’exposition Ergy Landau, Maison Robert Doisneau de Gentilly © Kader Benamer Si la toile permet d’accéder à ses images les plus célèbres et à un résumé de sa carrière, c’est dans le fonds de ses archives soigneusement conservées par Raymond Grosset, puis par sa fille Kathleen Grosset, et pas dans une improbable valise mexicaine à la manière de celle de Capa, que l’on peut commencer à trouver les pièces du puzzle d’une vie à reconstituer. C’est en parcourant ses carnets de prise de vue que l’on recense la liste des personnalités qu’elle a photographiées : Koestler, Sartre, Vercors, Moholy-Nagy, Bourdelle et tant d’autres … On y trouve aussi le noms des modèles qui ont posé pour ses nus, des plus connus aux plus confidentiels, le détail des reportages qu’elle a réalisés, dans les écoles et bibliothèques nouvelles en France et en Angleterre dans les années 30, dans des usines du nord de la France, dans les ports de Bretagne, et puis au Brésil, en Russie, et surtout dans la Chine de 1954… C’est dans ses documents personnels que l’on trouve ses premiers tirages signés Landau Erzsi, ses premiers diplômes, les portraits des membres de sa famille, l’intérieur une maison bourgeoise de Budapest. C’est en consultant les archives de la ville de Paris que l’on trouve la date de son entrée en France, sous le nom d’Elisabeth Landau, celle de la création et de la vie de son atelier, celle de sa naturalisation française et le lieu de sa sépulture. C’est en fouillant dans celles de ses éditeurs qu’on trouve ses lettres à l’écriture fine et élégante, la maquette de ses projets de livres. C’est dans les collections des institutions publiques ou chez les collectionneurs privés que l’on découvre d’autres images, d’autres angles de prise de vue. C’est grâce aux témoignages d’enfance des anonymes et des célébrités que l’on peut évoquer sa voix grave, son fume-cigarettes, son habileté à raconter des histoires pour obtenir les poses les plus naturelles de ses plus jeunes modèles… C’est enfin à Budapest que l’on tente de comprendre quelle a pu être sa jeunesse… Vue d’exposition Ergy Landau, Maison Robert Doisneau de Gentilly © Kader Benamer Sept années d’un travail acharné, militant et passionné avec mes co-commissaires Kathleen Grosset et David Martens ont mené en 2018 à une première exposition en ligne qui retrace ses collaborations avec le monde littéraire, à cette rétrospective à la maison Doisneau qui rencontrera le public de Budapest de mars à mai 2023, à celle qui ouvre ce mois-ci sur les grilles de la mairie du XVIe arrondissement de Paris et à la publication de l’ouvrage Ergy Landau, 1896-1967, une vie de photographe aux éditions du Bec en l’air. L’Association Les Amis d’Ergy Landau a aussi œuvré à la remise en état de sa sépulture au cimetière de Bagneux et à la conservation de ses archives qui rejoindront dans un avenir proche une institution qui les protègera. « Quelle photographe ! j’ai éprouvé de l’émotion devant bon nombre de portraits » , « Superbe, des perspectives magiques, des transparences, des lignes douces.. une grande photographe ! Bravo pour cette expo ! » sont quelques-unes des traces du passage des spectateurs dans le livre d’or de la maison Doisneau. Sans doute reste-t-il des zones d’ombre, d’autres pièces de puzzle à identifier. Mais nous avons accompli notre mission, celle de remettre dans la lumière une des grandes femmes photographes du XXème siècle. – Laurence Le Guen Présidente de l’association des amis d’Ergy Landau Assia endormie, studio d’Ergy Landau, 1932Tirage gélatino-argentique d’époque. © Ergy Landau / ARJL INFORMATIONS PRATIQUES Maison de la Photographie Robert Doisneau1, rue de la Division Général Leclerc 94250 Gentilly ven23sep(sep 23)13 h 30 min2023dim26fev(fev 26)18 h 30 minErgy Landau 1896-1967PhotographiesMaison de la Photographie Robert Doisneau, 1, rue de la Division Général Leclerc 94250 Gentilly Détail de l'événementL’exposition rétrospective Ergy Landau, 1896-1967 retrace pour la première fois la trajectoire de cette photographe d’origine hongroise installée à Paris au début des années 1920. C’est à travers une centaine Détail de l'événement L’exposition rétrospective Ergy Landau, 1896-1967 retrace pour la première fois la trajectoire de cette photographe d’origine hongroise installée à Paris au début des années 1920. C’est à travers une centaine de tirages originaux totalement inédits et des archives personnelles récemment redécouvertes que nous suivons cette figure aujourd’hui peu connue du grand public et pourtant prédominante du milieu du 20ème siècle. Pendant plus de trente années, Ergy Landau participe en effet aux plus grandes expositions photographiques et collabore à de multiples publications, livres d’art et ouvrages pédagogiques en passant par les revues grand public. Ses photographies les plus personnelles témoignent d’une assurance, d’un sens précis de la composition, d’une attention et d’une facilité pour agencer les jeux de l’ombre et de la lumière. Qui, aujourd’hui, a entendu parler d’Ergy Landau ? Sans doute peu de personnes en dehors d’un cercle restreint de spécialistes, historiens et amateurs de photographie du 20ème siècle. Pourtant très active entre le début des années 1920 et la fin des années 1950, Ergy Assia endormie, studio d’Ergy Landau, 1932 Tirage gélatino-argentique d’époque. © Ergy Landau / ARJL Landau a plus que compté dans le paysage photographique français. Issue de la diaspora hongroise qui quitte son pays au lendemain de la Première Guerre mondiale, elle s’installe à Paris et développe une activité de photographe professionnelle particulièrement diversifiée. Si elle ouvre dès son arrivée un atelier dans le 16ème arrondissement c’est parce qu’elle s’est initiée très tôt avec la DU 23 SEPTEMBRE 2022 AU 8 JANVIER 2023 technique et qu’elle fréquente depuis plusieurs années déjà, et malgré son jeune âge, les cercles hongrois de la «photographie d’art». En France, elle continue d’entretenir ses amitiés avec ses compatriotes (Brassaï, Kertész, Moholy-Nagy…) et contribuera à initier Nora Dumas et Ylla, qui seront dans un premier temps ses assistantes. S’imposant rapidement comme une spécialiste du portrait, tout spécialement d’enfants, elle développe des recherches formelles qui la rapprochent à certains égards de la Nouvelle Objectivité et réalise dans le même temps de nombreux nus féminins. Publiées dans différents périodiques de la presse illustrée et des magazines ou revues de l’entre-deux-guerres, ses images témoignent de l’émancipation des corps qui accompagne certaines transformations des modes de vie, notamment sous la forme des loisirs de plein air et des sports pratiqués en pleine nature. En 1933, elle rejoint l’Agence Rapho, dont elle soutiendra la renaissance après-guerre. Jusqu’à l’accident qui, en 1965, la laisse lourdement handicapée, elle effectue plusieurs séjour et reportages à l’étranger (Mongolie, Chine) et publie plusieurs livres de voyages et d’autres destinés au jeune public. Décédée sans descendance en 1967, avant la période qui, dans les années 1970, marque la reconnaissance des photographes comme des artistes à part entière, Ergy Landau tombe peu à peu dans l’oubli. Cette exposition, ainsi que l’ouvrage monographique qui l’accompagne, sont les résultats d’une recherche qui a été rendue possible par l’exploration du fonds E. Landau, inédit jusqu’alors. Ce travail vise à faire connaître la trajectoire d’une photographe à la fois singulière en même temps qu’exemplaire de l’histoire des femmes photographes du 20ème siècle. Kathleen Grosset, Laurence Le Guen et David Martens Photo : Ergy Landau, années 1930, Tirages gélatino-argentiques (Photomaton) d’époque. © Ergy Landau /ARJL Commissariat : Kathleen Grosset, Laurence Le Guen et David Martens Exposition organisée avec la collaboration de l’Association des Amis d’Ergy Landau DatesSeptembre 23 (Vendredi) 0 h 30 min - Février 26 (Dimanche) 5 h 30 min(GMT-11:00) LieuMaison de la Photographie Robert Doisneau1, rue de la Division Général Leclerc 94250 Gentilly Maison de la Photographie Robert Doisneau1, rue de la Division Général Leclerc 94250 GentillyEntrée Libre. Ouvert du mercredi au vendredi : 13h30 - 18h30 et le samedi et dimanche : 13h30 - 19h Dermée les jours fériés Get Directions CalendrierGoogleCal À VENIR Mairie du XVIe arrondissement de Paris71 Av. Henri Martin, 75016 Paris mer01fev8 h 30 minlun27(fev 27)17 h 00 minParis dans l'objectif d'Ergy LandauMairie du XVIe arrondissement de Paris, 71 Av. Henri Martin, 75016 Paris Dates1 (Mercredi) 8 h 30 min - 27 (Lundi) 17 h 00 min(GMT-11:00) LieuMairie du XVIe arrondissement de Paris71 Av. Henri Martin, 75016 Paris Get Directions CalendrierGoogleCal Favori0
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