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Carte blanche à Etienne Hatt : La photographie est-elle paradoxale ?

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Dans la carte blanche que nous avons confié à notre invité de la semaine, le critique d’art et rédacteur en chef adjoint de la revue Artpress, Etienne Hatt, souhaite partager ses réflexions qui constituent, pour lui, un cadre de référence dans les activités du métier de critique. Aujourd’hui, voici sa troisième exploration : La photographie est-elle paradoxale ?

La photographie contemporaine semble avoir le goût du paradoxe. Elle voit, en effet, se côtoyer techniques numériques et historiques, dématérialisation de l’image et nouveau matérialisme de l’œuvre, image pure et image pauvre, image de synthèse et photographie amateur, etc. Faut-il pour autant parler de fragmentation, d’opposition, voire de réaction ? Les photographes joueraient-ils la matériologie des procédés anciens contre le pixel ? La présence de l’objet photographique contre la fluidité numérique ? L’histoire des photographies trouvées contre celles qui en semblent dépourvues ?

L’action que nous menons, Aurélie Pétrel et moi, avec le soutien de Michel Poivert, au sein du Centre d’expérimentation, ou laboratoire, du Collège international de photographie du Grand Paris, entend aider à dépasser ces contradictions apparentes. Depuis deux ans, cinq bourses de recherche-création ont été attribuées à des artistes afin qu’ils et elles interrogent la condition de l’image contemporaine, en articulant prénumérique, profusion, dématérialisation et hypermobilité/accessibilité des images. L’année dernière, Léa Habourdin avait pris à revers les attendus de la bourse en explorant les procédés écologiques de l’anthotype et du monotype à l’encre chlorophylle tandis que Matthieu Boucherit avait constitué une archive du temps présent en figeant sur plaques de verre le flux des actualités partagées sur les réseaux sociaux. Cette année, les lauréats sont Jeremie Brugidou, Fabien Ducrot et Anna Katharina Scheidegger. Leurs recherches en cours seront restituées en fin d’année.

Ces artistes et bien d’autres participent à la recomposition actuelle de la photographie qui se fonde sur une praxis et une esthétique du mélange inédites. Sans doute encore plus aujourd’hui qu’hier, la photographie croise les techniques et les temporalités, les univers de référence et de projection. Les distinctions établies ne sont plus opérantes et les cartes largement rebattues. Loin de toute crispation ontologique, la photographie affirme son impureté productive.

La Rédaction
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