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Les trois fondateurs de la galerie Ceysson & Bénétière : Bernard Ceysson, François Ceysson et Loïc Bénétière, ouvrent un nouveau chapitre de la saga à Saint-Etienne, fief d’origine de la galerie après Lyon, Paris, New York, Genève et Luxembourg. Un ancrage revendiqué au sein du nouveau pôle culturel de Saint-Etienne sur un site de plus de 1000m², dont Loïc Bénétière et François Ceysson nous dévoilent les contours. En termes de foires, la galerie a décidé de participer pour la première fois à Art-o-rama. Un choix qui s’inscrit en cohérence avec le rayonnement de Marseille et sa région et une démarche plus écologique de l’art, comme ils l’expliquent aux côtés de Loïc Garrier, directeur de la galerie parisienne qui a choisi de se concentrer sur le duo Pugnaire Raffini.

Alors que se profile la FIAC nouvelle version dans le Grand Palais éphémère, dans un calendrier pandémique très chargé, le trio reste globalement confiant, même si la présence de collectionneurs américains fait partie des incertitudes.

La galerie ouvre un 7ème espace à Saint Etienne, son fief d’origine, après Lyon, New York, Paris, Genève, Le Luxembourg, quelle stratégie visez-vous et avec quels objectifs ?

François Ceysson and Loïc Bénétière directeurs Ceysson & Bénétière, © Cyrille Cauvet

Loïc Bénétière et François Ceysson. Il convient de préciser en préambule qu’en ce qui concerne notre espace historique du centre de Saint Etienne nous allons le convertir à d’autres besoins de la galerie pour nous concentrer essentiellement sur cet espace de plus de 1000 mètres carrés situé dans le nouveau pôle culturel de la ville aux côtés du Zénith, de la Cité du design, de la Comédie de Saint-Etienne et de l’Ecole des Beaux-Arts. Notre idée qui n’a rien de révolutionnaire, était comme pour le cas du Luxembourg, de profiter de cette opportunité pour maximiser les conditions d’exposition et de monstration des œuvres. Nous partons toujours du principe que si nous avons une belle exposition rassemblant de bons artistes, dans un lieu exceptionnel que ce soit à Saint-Etienne, Clermont Ferrand, Marseille, Nice ou Luxembourg, les collectionneurs seront présents, ce qui incite les artistes à se montrer toujours plus exigeants.

Bernard Venet, Exposition Bernar Venet à la galerie Ceysson & Bénétière Paris

Par fidélité à notre ville d’origine dont nous sommes originaires et très attachés, Bernard Ceysson ayant longtemps dirigé son musée, cela avait d’autant plus de sens de se doter d’un tel outil dans une région où nous sommes bien implantés.

Ce projet a aussi une vocation sociale, et nous insistons sur ce point, l’espace d’exposition pouvant proposer différents programmations et cycles de conférences mais aussi une librairie, un restaurant, dans une perspective très ouverte. Offrir une expérience globale aux visiteurs est une dimension qui nous tient à cœur. L’exposition inaugurale sera consacrée à Bernar Venet qui a choisi de répondre au défi imposé par le lieu en se concentrant sur son travail mural de reliefs, complémentés par des angles, des arcs, des dessins, aspects plus classiques de sa démarche. Nous lui consacrons également une autre actualité à Paris en septembre autour des années 1961 et 1963, dites conceptuelles. Une exposition quasi muséale où rien ne sera à vendre avec à l’occasion, la sortie d’un essai de Bernard Ceysson sur le Tas de charbon, œuvre iconique de l’histoire de l’art. Ces évènements ont pour vocation de fêter nos liens avec Bernar Venet à l’occasion de ses 80 ans cette année.

Quels arguments ont été décisifs pour votre première participation à Art-o-rama ?

Nouvelle galerie Ceysson & Bénétière Saint-Étienne, 10 rue des Aciéries courtesy Ceysson & Bénétière
L’équipe Ceysson & Bénétière :
From left to right : L. Garrier, M. Ebelle, F. Ceysson, D. Pascal et L. Bénétière courtesy Ceysson & Bénétière
© Cyrille Cauvet.

Loïc Bénétière, François Ceysson, Loïc Garrier.Nous avons toujours beaucoup suivi cette foire très pertinente tant par le choix de ses exposants que son inscription dans le temps, ayant acquis une solide réputation à une période de l’année très intéressante, entre fin d’été et rendez-vous de rentrée dans un calendrier différent et complémentaire des autres foires. Le rapport aux collectionneurs sur place est également un atout autour d’une réelle curiosité et aptitude à voir des œuvres et s’ouvrir à d’éventuelles découvertes. Les professionnels sont présents également et c’est un moment privilégié que nous partageons chaque fois que nous participons depuis la foire Paréidolie en 2018. Cette perspective d’un nouvel ancrage en termes de foires en France était cohérente en tant que galerie participant à de nombreuses foires internationales comme la FIAC, Art Basel Miami, Frieze…dans une ville aussi dynamique que Marseille et la région PACA. Nous avons une présence en Auvergne Rhône Alpes (région voisine et très proche) et des liens très forts dans le sud depuis plusieurs années. Il est important pour nous de montrer cette relation et d’encourager cet élan.

Ceysson & Bénétière, nouvelle galerie, Saint-Etienne (maquette) Atelier Grousson architectes

Art o rama nous donne de plus l’occasion de donner à voir des jeunes artistes de notre programmation, sachant que nous sommes en général plus souvent sollicités lors des grandes foires sur des périodes historiques telles que Supports/Surfaces et les années 1970. Le duo Pugniaire et Raffini était une évidence dans ce sens, illustrant notre volonté de soutien à la jeune création, les artistes ayant démarré leur carrière dans la région à Nice avec des œuvres déjà très suivies. La vidéo Driving Through que nous avons choisi de présenter est leur création la plus récente et fait parfaitement échos aux réflexions du moment autour de nos sociétés contemporaines. Il s’agit d’une œuvre forte à la fois dans son propos et dans son esthétisme.

Pour résumer, la foire avait l’avantage de « cocher plusieurs cases » qui nous intéressaient dans une logique de promotion et de défense de nos artistes.

Ceysson & Bénétière, nouvelle galerie, Saint-Etienne (maquette) Atelier Grousson architectes

Ceysson & Bénétière, nouvelle galerie, Saint-Etienne (maquette) Atelier Grousson architectes

Quels facteurs expliquent selon vous le dynamisme de Marseille et sa région ?

Loïc Bénétière et François Ceysson. Plusieurs facteurs sont à l’origine de ce phénomène avec en premier lieu un dynamisme régional de plus en plus évident depuis plusieurs années. Une ville comme Marseille est un lieu de rendez-vous très actif pour les artistes attirés sur place par des questions budgétaires tout en restant connectés au reste du monde, grâce aux facilités de transports. De nombreuses institutions phares concourent également à l’attrait de cet écosystème.

Si au niveau des institutions nous le mesurions déjà comme à Saint Etienne où nous sommes présents depuis 2006 avec un musée d’art moderne et contemporain exceptionnel et plus largement dans notre région à Grenoble, comme sur l’ensemble du l’hexagone, l’on assiste à une réelle évolution du profil des collectionneurs en régions et notamment à Marseille et dans le sud de la France où ils sont très nombreux et manifestent leur attachement à cette scène locale à travers notamment leurs acquisitions.

Ce constat s’inscrit aussi dans les questionnements inhérents aux fondements de notre système en cette période de pandémie où l’on réfléchit davantage aux questions écologiques car s’il est pertinent de participer à des foires dans le monde entier pour aller à la rencontre des collectionneurs, parfois les bons réseaux se trouvent au coin de la rue et il suffit juste de savoir les activer avec la même exigence qu’une grande foire internationale.

La FIAC 2021 présente de nombreux défis, outre le Grand Palais éphémère et la diminution d’espace, comme la question de la présence des collectionneurs étrangers. Quelle est votre position là-dessus ?

LB & FC. La FIAC est une foire tellement qualitative à nos yeux, présentant un tel rendez-vous pour notre galerie que nous y participons toujours avec bonheur, et quelles que soient les conditions, notre objectif étant de proposer des stands les plus rigoureux et précis possibles. Il y a effectivement cette année une diminution des mètres carrés car nous avions la chance au Grand Palais d’avoir un très grand stand au niveau des escaliers de 80m², qui va se voir réduire d’un tiers au moins de sa surface. Cela nous oblige à adopter une présentation différente autour d’œuvres moins monumentales que d’habitude tout en insistant sur quelques pépites historiques de nos artistes avec des œuvres iconiques de Supports/Surfaces de qualité muséale. Malgré un impact sur l’architecture du stand, la thématique et l’exigence des œuvres seront donc bel et bien conservés.

La vraie question qui va se jouer concerne en effet la venue des internationaux avec une problématique de calendrier ; entre Bâle quelques semaines avant puis Frieze juste ensuite, soit l’enchainement de trois des plus grandes foires en un mois. Une telle situation dans un contexte de déplacements déjà compliqué, va obliger les collectionneurs à poser de vrais choix et l’on risque des surprises sur le nombre de collectionneurs étrangers et notamment les américains qui à mon avis vont manquer à l’appel. Même si notre exemple n’est pas forcément révélateur, nos collectionneurs étrangers étant à la recherche de pièces historiques précises que l’on peut leur vendre par d’autres moyens en online, cette foire suscite toujours néanmoins une forte attente et les collectionneurs qui choisissent la Fiac privilégient la programmation associée et toute l’ambiance de la semaine, comme nous le confiait récemment un couple d’américains.

Cela nous permet de rester malgré tout optimistes sur ce qui représentera un réel élan de solidarité dans le fait de se déplacer.

Comment avez-vous accueilli la carte blanche offerte par Aurélie Voltz, MAMC+ à Lionel Sabatté et avez-vous souhaité l’accompagner ?

Lionel Sabatté – Portrait 2020 © Rebecca Fanuele

LB & FC. Nous défendons Lionel Sabatté depuis plusieurs années et l’avons exposé la première fois à Paris en 2018 puis à Luxembourg et sur de nombreuses foires. Nous avons répondu très favorablement à la démarche d’Aurélie Voltz en apportant notre concours sur certains aspects de production ; une cinquantaine d’œuvres étant conçues spécialement pour l’occasion.

Lionel Sabatté Signe, 2020 exposition MAMC+

De telles synergies me semblent toujours très pertinentes.

Cette exposition qui fait évènement est notre priorité de la rentrée. Nous avons tenu cependant à lui donner un écho dans l’une de nos galeries et New York était suffisamment loin de l’Europe pour ne pas être en concurrence. Nous nous concentrons sur des œuvres récentes alors que le musée s’inscrit dans un angle plus rétrospectif. Cela donnait de plus à l’artiste la perspective d’être exposé dans un contexte plus global.

INFOS PRATIQUES :
Ouverture nouvelle galerie à Saint-Etienne : 18 septembre 2021
Bernar Venet, Reliefs
galerie Ceysson & Bénétière
10 rue des Aciéries
42000 Saint-Etienne
&
Bernar Venet, 1961 1963 les Origines
Jusqu’au 9 octobre 2021
galerie Ceysson & Bénétière
23 rue du Renard
75004 Paris
https://www.ceyssonbenetiere.com/
Lionel Sabatté
Eclosion
jusqu’au 2 janvier 2022
https://mamc.saint-etienne.fr/

FIAC, Grand Palais Ephémère
21-24 octobre 2021
https://www.fiac.com/fr

Marie-Elisabeth De La Fresnaye
Après une formation en littérature et histoire de l'art, Marie de la Fresnaye intègre le marché de l'art à Drouot et se lance dans l'événementiel. En parallèle à plusieurs années en entreprise dans le domaine de la communication éditoriale, elle créé son blog pour partager au plus grand nombre sa passion et expertise du monde de l'art contemporain et participe au lancement du magazine Artaïssime.

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