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La 7ème édition de la foire AKAA a choisi de se dérouler lors de la semaine très convoitée de l’art contemporain du 21 au 23 octobre au Carreau du Temple. Un total de 38 galeries internationales représentant 129 artistes ont été sélectionnées par un comité de sélection présidé par Victoria Mann, fondatrice et composé de : Bénédicte Alliot, directrice générale de la Cité Internationale Paris, Ifeoma Dike, commissaire et Anne de Villepoix, directrice de la galerie Anne de Villepoix et d’Armelle Dakouo qui assure la direction artistique de la foire. Auparavant Responsable des Exposants et du développement d’AKAA, cet atout s’inscrit dans sa vision du positionnement de la foire autour de propositions curatoriales exigeantes à travers une large programmation culturelle placée cette année sous le régime du mouvement.

Parmi les temps forts, deux cartes blanches dont l’installation monumentale de l’artiste malien, Abdoulaye Konaté (galerie 38, Casablanca), des tables-rondes en résonnance et l’édition d’un ArtBook. Une exposition dans le modèle de celles qui se sont déroulées à Manifesta Lyon se tiendra début 2024.
En termes de nouveautés à noter qu’un espace sera dédié aux NFT par le biais d’un partenariat avec l’agence NEUVIEMETOIT.
Armelle Dakouo a répondu à mes questions.

Portrait d’Armelle Dakouo, directrice artistique AKAA photo Maya Inès Touam

Quelle vision défendez-vous à AKAA ?

Le travail que j’entreprends au sein d’AKAA depuis 7 ans vise à renforcer la visibilité d’une scène qui s’est imposée depuis en France après un certain retard si l’on compare avec les pays anglo-saxons. AKAA a participé à la structuration et globalisation du marché avec de réelles avancées autour d’une plus grande compréhension de cette scène débarrassée de certains clichés, avec un nombre croissant de galeries, collectionneurs et institutions impliqués.

Notre défendons l’idée de vraies découvertes entre des artistes encore confidentiels, des talents de demain aux côtés de valeurs sûres. De plus, nous revendiquons une pluralité de regards autour de l’art contemporain d’Afrique à travers la mise en avant des relations qu’entretient l’Afrique avec le reste du monde et son impact avec des diasporas qui se comptent en Amérique latine, aux Etats-Unis, jusqu’au Moyen Orient et en Asie pacifique.
Dès lors tout artiste qui revendique un lien ou une influence avec le continent peut être présenté par sa galerie à la foire aux côtés de nombreuses autres nationalités.

Maurice Mbikayi Combattant, 2016, 110 x 73 cm, C-print sur papier Epson 5 Editions, © Maurice Mbikayi, Courtesy ARTCO Gallery

Quelle est la répartition des galeries entre le continent africain et l’Europe ?

L’on revient à une répartition d’avant Covid avec 13 galeries françaises, 11 galeries européennes, 12 galeries d’Afrique et 2 du Moyen-Orient. A signaler en première participation : AKKA Project de Dubaï et Africa Frist & Lys Contemporary Art d’Israël.

En plus du retour en force des galeries sud-africaines : The Melrose Gallery, Deepest Darkest, EBONY/CURATED et Kalashnikovv Gallery, nous observons l’arrivée de nouvelles galeries au Ghana avec la Soview Gallery à Accra et en Egype avec la Karim Francis Contemporary Art Gallery du Caire. La Côte d’Ivoire est également présente avec la galerie Walls House of Art et la galerie VÉRONIQUE RIEFFEL.

En ce qui concerne le Maroc l’on ne retrouve pas encore le niveau de participation habituel. De même avec certains pays comme le Kenya ou l’Ouganda pour qui la situation reste compliquée. L’Angola est également présent avec les galeries MOVART et This Is Not a White Cube basées entre Lisbonne et Luanda. Des combinaisons qui facilitent le marché.

Une carrière entre Dakar et Casablanca

J’ai fait mes premières armes autour de deux festivals cinéma dédiés à l’Afrique, l’un à Dakar et l’autre à Angers.
J’ai commencé par me concentrer plus sur la photographie, notamment à Dakar autour de la création d’un label artistique au sein du nouveau groupe hôtelier Onomo. Il y avait un véritable soutien à la création à travers plusieurs expositions dans les hôtels. Puis j’ai suivi mon compagnon au Maroc et ai poursuivi auprès des galeries jusqu’à intégrer l’équipe d’AKAA.

Gosette, Lubondo Dernière célébration, série « Terre de lait, terre de miel »,, Courtesy Angalia Galerie

En quoi votre rôle de directrice artistique prolonge-t-il l’ensemble de votre parcours avec AKAA ?

J’ai commencé à travailler avec AKAA en tant que consultante basée au Maroc à Casablanca, en charge des relations avec les galeries pour l’Afrique de Nord (Maroc, Tunisie, Algérie). Le dynamisme de la scène marocaine a conduit à la venue de nombreuses galeries à la foire, à part égale avec l’Afrique du Sud, deux pays du continent qui étaient les mieux représentés à AKAA. A mon retour en France fin 2017, Victoria Mann m’a proposée d’intégrer l’équipe en interne en tant que Responsable des Exposants à l’international et du Développement, un volet très impacté par le Covid, jusqu’à ma nomination en 2020 en tant que Directrice artistique. J’ai dans ce cadre mis en place la première édition de l’Art Book qui s’est trouvé enrichi depuis nos réflexions liées au Covid autour notamment de nouveaux modèles de foire. Nous avons alors cherché à pousser les curseurs curatoriaux plus loin autour d’une édition resserrée à 20 galeries avec une sélection d’artistes, une thématique commune et une large programmation culturelle. Si l’édition 2020 n’a pu finalement se tenir, nous avons gardé sa thématique intitulée « Imaginaires émancipés » pour en faire une exposition qui s’est tenue à Lyon dans le cadre du programme Manifesta au printemps 2021. Cette expérience ayant été très positive nous avons renouvelé l’invitation aux galeries l’année dernière avec l’exposition « A Rebrousse temps ». Ce fil rouge donné par la thématique entre la foire AKAA en octobre puis l’exposition curatée au printemps est très en phase avec notre positionnement. Nous travaillons d’ors et déjà sur la prochaine exposition qui aura lieu début 2024 à l’international cette fois.

Ousmane Ba, buraq, 2021, Collage and painting on wood panel, Sumi, japanese pigment on washi (japanese pigment), 140 × 100 cm,  © Ousmane Bâ, Courtesy Ousmane Bâ & Foreign Agent Gallery

Le choix du titre des Rencontres AKAA : Quantité de Mouvement.s

Ce titre, emprunté à la physique quantique m’a aussi été inspiré par le philosophe Paul Souriau, auteur de L’esthétique du mouvement. Il évoque selon moi, un imaginaire en perpétuelle mutation et un acte au quotidien aux multiples résonnances dans le champ de la création et du vivant. Il rejoint aussi la démarche d’ouverture que nous défendons à AKAA autour de l’influence de l’Afrique et ses diasporas.
Enfin, ce fil conducteur résonnait avec la thématique de l’année dernière autour du temps, dans une continuité qui rejoint, selon moi, la démarche de constituer une collection.

La thématique choisie et les temps forts

La thématique retenue permet d’impulser les temps forts et d’articuler les tables rondes, les cartes blanches et l’exposition. Cette année, j’ai choisi la notion de mouvement et de geste qu’elle induit permettant de renouveler avec un grand nombre de performances qui seront proposées tout au long de la foire, à un rythme quotidien. Cela nous tenait à cœur, cette dimension n’ayant pas pu être explorée depuis 2019.

Abdoulaye Konaté, Le vent(fié), 2020, 228 x 404 cm, Textile, Courtesy Galerie 38

Autres temps forts : Nous poursuivons les cartes blanches avec d’une part, l’installation monumentale de la Nef de la Grande Halle de l’artiste malien, Abdoulaye Konaté, représenté par la Galerie 38 (Casablanca) et d’autre part l’installation de l’artiste Nnenna Okore (October Gallery Londres), au sein de l’espace des Rencontres. En terme de programmation, nous avons noué un partenariat avec Présence Africaine Editions qui co-éditent notre livre et proposent une programmation en résonnance à l’auditorium du Carreau du Temple.

L’art Book

J’ai invité deux auteurs : Seloua Luste Boulbina et Eva Barois de Caevel autour d’une sélection d’artistes, 18 au total, présentés à la foire ou non.

Les tables rondes

Deux tables rondes sont consacrées aux cartes blanches, animées d’une part par Claire Staebler, directrice du Frac Pays de la Loire autour de Nnenna Okore et moi-même autour d’Abdoulaye Konaté. De plus les auteurs du livre sont invités à poursuivre les échanges à cette occasion avec notamment Seloua Luste Boulbina autour de David Gumps, vidéaste ou Annabel Guérédrat, artiste performeuse qui produira une performance totalement inédite. Des artistes qui malgré une grande visibilité à l’international, restent étonnement méconnus en France.

INFOS PRATIQUES :
AKAA Art & Design Fair
Du 21 au 23 octobre 2022
Carreau du Temple Paris
4 Rue Eugène Spuller
75003 Paris
akaafair.com

Marie-Elisabeth De La Fresnaye
Après une formation en littérature et histoire de l'art, Marie de la Fresnaye intègre le marché de l'art à Drouot et se lance dans l'événementiel. En parallèle à plusieurs années en entreprise dans le domaine de la communication éditoriale, elle créé son blog pour partager au plus grand nombre sa passion et expertise du monde de l'art contemporain et participe au lancement du magazine Artaïssime.

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