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Il y a 20 ans, le petit village breton de la Gacilly, inaugurait la première édition de son festival photo souhaitant se transformer, le temps d’un été, en véritable galerie à ciel ouvert. Au fil des années, le festival est devenu un événement majeur de la photographie environnementale et sociétale, en vingt ans, il a réunit plus de 300 photographes et des millions de visiteurs ! Cette année est l’occasion de célébrer les 20 ans du Festival Photo La Gacilly avec l’organisation de 20 expositions monographiques sur la thématique « La Nature en héritage » venues nous insuffler un vent d’optimisme.

Série « Reincarnation » © Nazil Abbaspour

Le Festival Photo La Gacilly vous donne rendez-vous dès le 1er juin dans le Morbihan pour découvrir vingt sujets photographiques porteurs d’espoir. En 2004, lorsque la première édition s’inaugurait, le réchauffement climatique et l’environnement n’étaient pas aussi présents dans nos préoccupations. Deux décennies plus tard, les constats sont édifiants, la situation se dégrade d’une vitesse non soupçonnée jusque là. Face à ce climat anxiogène qui règne sur notre planète,  l’équipe du Festival Photo La Gacilly a choisi de semer l’espoir pour ré-enchanter le monde !

Gentoo and chinstrap penguins on an ice floe near Danko island Antarctica. © David Doubilet

« Cette année, nous avons souhaité faire la part belle aux travaux des grands maîtres de la photographie environnementale, mais également aux nouvelles générations d’artistes qui ont ce souci de faire cohabiter durablement le genre humain avec son milieu naturel. Sur les questions fondamentales que sont l’urbanisation, la biodiversité, les ressources naturelles, les pollutions ou le réchauffement climatique, nous tenterons d’apporter, images à l’appui, sinon des solutions, au moins des pistes de réflexion pour laisser nos yeux ouverts sur le monde.

Préserver nos espaces naturels ? Sebastião Salgado revient à La Gacilly pour nous présenter son dernier opus, Amazônia. Pendant six ans, il a sillonné cette région tropicale de son Brésil natal : la forêt, les cours d’eau, les montagnes, les derniers peuples indigènes qui vivent en harmonie sur ce « Paradis sur Terre », selon les mots du photographe. Son vœu le plus cher : « que d’ici à cinquante ans, ces images ne ressemblent pas au registre d’un monde perdu ». Car ces milieux végétaux sont menacés, comme le montre Maxime Riché. Il s’est rendu à Paradise, une localité californienne qui porte mal son nom depuis que la ville a été ravagée par les feux de forêts. Dans une écriture photographique où les paysages prennent la couleur de l’embrasement, où les portraits de celles et ceux qui ont tout perdu sont réalisés sans fard, il nous révèle toutes les blessures de la terre. Protégeons nos arbres et rendons leur hommage : c’est le travail de toute une existence, celui de Beth Moon qui, au fil des années, a parcouru le monde à la recherche de ces géants de bois, des dragonniers de Socotra aux baobabs de Madagascar. Des êtres vénérables, derniers et frêles témoins de l’immortalité.

© Lorraine Turci / Festival Photo La Gacilly pour le Conseil départemental du Morbihan

Protéger notre biodiversité ? Trois expositions pour mieux comprendre ce combat essentiel. En arpentant pendant des mois la réserve naturelle du Pantanal au Brésil, le dernier sanctuaire des jaguars, Brent Stirton nous livre des images d’une beauté stupéfiante mais d’un éden menacé par la déforestation et les feux de forêt. Alain Schroeder en a fait le triste constat en Indonésie : il s’est intéressé à la sauvegarde des orangs-outans, menacés d’extinction par la disparition de leur habitat naturel. L’agriculture intensive, l’exploitation minière et l’urbanisation massive mettent en danger la survie de ces grands primates. Car, force est de constater que, partout où s’infiltre la main de l’Homme, le monde animal est en souffrance. Il reste pourtant un endroit qui reste inviolé : celui de la profondeur des océans. David Doubilet, l’un des pionniers de la photographie sous-marine nous offre, dans une rétrospective inédite, ses plus beaux clichés du monde du silence.

Comprendre notre société ? Dans le cadre de la commande réalisée avec le soutien du Conseil départemental du Morbihan, la jeune photographe Lorraine Turci s’est intéressée à ceux qui vivent en mer, embarquant avec les derniers pêcheurs de Lorient qui témoignent d’un métier éprouvant dans la fureur des éléments. Lucas Lenci, quant à lui, brouille nos consciences en dévoilant, dans ses essais photographiques, cette folie des Hommes qui idéalisent la nature mais l’effacent au fil du temps. Et si notre sursaut venait des femmes ? Nadia Ferroukhi, infatigable voyageuse, s’est penchée, de l’Inde au Kenya, sur ces sociétés matriarcales qui, en bouleversant l’ordre établi, ont su développer un monde plus harmonieux. Nous découvrirons aussi le travail si poétique d’Evgenia Arbugaeva sur ces terres froides et hostiles de l’Arctique que les humains s’évertuent à vouloir coloniser, et nous montrerons, avec Metropolis, les différentes facettes de cette inexorable urbanisation, captée par l’œil du photojournaliste Pascal Maitre.

Série « I want to believe », Petit Prince & The Rose © Sacha Goldberger

Imaginer un monde pour demain ? Ce n’est certainement pas celui de Cássio Vasconcellos que nous désirons : dans une fresque époustouflante, sur une seule et même image, l’artiste brésilien a minutieusement composé les méfaits de notre surindustrialisation, avec ces supertankers, ces avions ou ces automobiles que nous abandonnons après utilisation. Ni même celui de Sacha Goldberger qui imagine avec humour une terre attaquée par des aliens après qu’ils aient épuisé les ressources de leur lointaine planète. Il est plus vraisemblable et réaliste que les clichés réalisés par Luca Locatelli dessinent les contours de notre avenir : un monde parsemé de fermes verticales, des villes futuristes conçues dans le souci des énergies renouvelables, des territoires mieux aménagés.

Série « Dystopia » © Vee Speers

Réinventer notre humanité ? N’en doutons pas, quoi qu’il advienne, les humains ont toujours eu cette capacité à conserver cette lueur d’espoir qui, même dans les pires situations, leur permettent de se réinventer et de se surpasser. David et Peter Turnley ont traversé tous les soubresauts de notre histoire contemporaine et ces frères jumeaux, aux regards si différents, fêteront cette année, à La Gacilly, 50 ans de carrière avec, en commun, cette même empathie pour les femmes et les hommes qu’ils ont rencontrés. Yasuhoshi Chiba, photoreporter à l’Agence France-Presse, est lui aussi l’archétype de ce regard rigoureux mais délicat sur le chaos du monde : ses clichés, de l’Afrique à l’Ukraine, éclairent l’actualité comme des phares dans la tempête. Alors, continuons de rêver, pour avancer encore et toujours, pour ne jamais éteindre notre soif d’idéal. L’iranienne Nazli Abbaspour le prouve en scrutant les fantômes enchanteurs de notre passé enfoui, l’ivoirienne Joana Choumali l’imagine en nous plongeant dans un univers imaginaire digne du Petit Prince, et l’australienne Vee Speers nous emporte dans ses métamorphoses au carrefour de la nostalgie et du contemporain. » – Texte issu de l’édito de Cyril Drouet, Commissaire des expositions.

INFORMATIONS PRATIQUES

jeu01jui10 h 00 mindim01oct19 h 00 minFestival La Gacilly Photo 2023La Nature en héritage OrganisateurAssociation Festival Photo La Gacilly

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Ericka Weidmann
Après des études d'Arts Appliqués et de photographie, elle rejoint un magazine en ligne consacré à la photo en tant que directeur artistique, poste qu'elle occupera pendant 10 ans. En 2010, elle s'installe comme DA en indépendant. En parallèle, elle devient responsable éditorial pour Le Journal de la Photographie et c'est en septembre 2013 qu'elle co-fonde le quotidien L’Oeil de la Photographie pour lequel elle est rédactrice en chef jusqu'en septembre 2016 avant de fonder 9 Lives magazine ! Ericka Weidmann est également journaliste pigiste pour d'autres médias.

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