Carte blanche à Camille Leboulanger : La transmission photographique

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Pour sa quatrième et dernière carte blanche, notre invitée de la semaine, Camille Leboulanger, chargée de la programmation du cycle de photo-reportage « Escale à la Grange aux Belles – Images du réel », a choisi nous parler de transmission à travers la photolittérature jeunesse. C’est lors d’une exposition à l’IMMIX Galerie, dans le cadre du festival Formula Bula, qu’elle découvre ce genre méconnu, entre texte et image, fiction et réel. Une rencontre marquante qui la conduit à explorer un univers riche et singulier, où l’enfance devient terrain d’expérimentation artistique et de pensée.

J’ai découvert il y a peu « la photolittérature jeunesse », lors d’une exposition à l’IMMIX Galerie – au sein de l’association d’éducation populaire CRL10 – dans le cadre du festival Formula Bula : de magnifiques ouvrages et des maisons d’édition dédiées à ce genre.

La photolittérature fusionne les arts de la photographie et de la littérature pour créer un nouveau mode d’expression visuelle et textuelle. Cette forme hybride est particulièrement intéressante car elle exploite les capacités de chaque média pour enrichir et nuancer le message, la narration, et l’expérience du spectateur ou du lecteur.

Ce qui me plaît dans ce genre, c’est que les photographies ne sont pas simplement décoratives ; elles sont actives dans la narration, capables de donner un nouveau point de vue ou de faire évoluer le sens de l’histoire racontée par le texte. Cela peut produire des narratives non linéaires, des récits visuels fragmentés, ou encore des récits où l’image et le texte ont leur propre autonomie, tout en se nourrissant l’un de l’autre.

La photolittérature permet aussi de jouer avec la frontière entre réalité et fiction. Les photographies, souvent perçues comme des témoignages réels de l’existence, peuvent être intégrées dans des récits fictifs ou poétiques. De même, des éléments fictifs peuvent être introduits dans un contexte photographique, créant des mondes mi-réels, mi-imaginaires. Ce jeu ouvre un champ d’expérimentation où l’artiste peut interroger le rapport à la réalité, à la représentation et à la subjectivité.

C’est ainsi que les éditions MeMo ou Les Grandes personnes – entre autres – proposent la reproduction d’images, qu’elles soient de création ou de patrimoine. Leur travail à l’intention de la jeunesse est porté par une conviction profonde : la fiction est le meilleur biais qui soit pour aborder avec l’enfant les grands questionnements de la vie, et c’est dans la qualité des mots et des images qu’elle puise sa force.

A découvrir…

© Yveline Loiseur
Les Musiciens de Brême, 2024
Livre d’artiste, double leporello, tirage Fine Art sur papier Hannemühle, 25 x 400 cm
Texte: Jacob et Wilhelm Grimm Traduction: Frédéric Baudry Design graphique: Loïc Boyer
Livre réalisé dans le cadre d’une résidence d’artiste à Moly Sabata – Fondation Albert Gleizes en janvier 2023, sur une invitation du Bleu du Ciel, Lyon.
Avec Abel, Basile, Garance, Paloma, Virginie, et les enfants de l’école maternelle des Églantines (Lyon), Alessio, Balkyss, Thaïrys, Yaqine et leurs enseignantes.

Yveline Loiseur est une figure importante dans le domaine de la photolittérature. Elle crée des œuvres où le spectateur-liseur est invité à interpréter les images et les mots ensemble, enrichissant ainsi l’expérience du lecteur. Dans ses travaux, elle s’intéresse à la manière dont la photographie peut servir de médium pour raconter des histoires, tout en conservant l’impact d’une narration écrite. Cela peut inclure l’utilisation de la photographie comme un outil pour amplifier ou souligner les thèmes, les émotions ou les atmosphères du texte. Son approche peut aussi inclure une certaine expérimentation, jouant avec les frontières entre l’image fixe et le texte dynamique, et parfois même en mettant en question les rôles traditionnels de l’un par rapport à l’autre.

Bazar Bizarre Poussin-coussin © Jean Lecointre

Bazar Bizarre Lapin-sapin © Jean Lecointre

L’Odyssée d’Outis © Jean Lecointre

Cache Cache Cauchemars © Jean Lecointre

Animaux Domestiques© Jean Lecointre

Jean Lecointre est un photographe français connu pour son travail explorant la relation entre la photographie et la littérature, ainsi que pour sa capacité à raconter des histoires visuelles. Son travail photo littéraire se distingue par une approche où chaque image semble porter une narration sous-jacente, créant une sorte de dialogue entre l’image et le texte. Son travail se situe souvent à l’intersection de la photographie documentaire, du portrait et de l’illustration visuelle de récits littéraires. En s’inspirant des écrivains et de leurs univers, il cherche à donner vie à des récits par le biais de ses images, qu’elles soient inspirées par des romans, des poèmes ou des atmosphères littéraires spécifiques. Il a travaillé avec des écrivains et des éditeurs pour illustrer des ouvrages, mais il a également créé des séries photo qui peuvent être perçues comme des récits visuels indépendants.

François Delebecque est un photographe et plasticien français. Il collabore régulièrement avec la littérature jeunesse. Avec l’écrivain Michel Chaillou, il réalise Les Habits du Fantôme, un roman-photo policier publié en 1999, où les images en noir et blanc illustrent une enquête mystérieuse . Cette œuvre se distingue par sa narration visuelle et son ambiance cinématographique. Il collabore également avec l’éditrice Brigitte Morel pour créer des livres pour enfants alliant photographie et texte. Des ouvrages tels que Les Songes de l’Ours et La Plage… d’où les bateaux s’envolent illustrent sa capacité à mêler poésie visuelle et narration, offrant aux jeunes lecteurs une expérience immersive.

Mon coup de cœur : « Taka-chan et moi. Le voyage d’un chien au Japon« , de Betty Jean Lifton et Eikoh Hosoe. L’histoire étrange et merveilleuse d’un chien, Runcible. Runcible est le narrateur de cette histoire, il nous raconte comment il a un jour creusé un trou sur la plage de Cape Cod, dans le Massachusetts, où il vit. Ce trou débouche sur un tunnel, le chien s’y engouffre et y marche pendant des jours pour arriver finalement sur une plage du Japon, où il fait la connaissance d’une petite fille, Taka-Chan. La petite le recueille, l’entraine dans une maison dont elle est prisonnière – un palais régi par le Dragon noir de la mer. Furieux contre le père de Taka-Chan, un pêcheur, le dragon refuse de laisser la petite fille retourner chez elle. Pour la libérer, Runcible devra trouver la personne la plus loyale de tout le pays, et déposer une fleur à ses pieds.

Pour aller plus loin : découvrez les écrits de Laurence Le Guen qui anime le site Miniphlit, dédié à la photolittérature jeunesse. Elle publie régulièrement des articles dans les revues spécialisées Histoires littéraires et Revue de photolittérature, et intervient dans des colloques internationaux ayant pour objet la photolittérature de jeunesse.

Photos extraites des oeuvres de Yveline Loiseur, François Delebecque, Jean Lecointre

A LIRE
Laurence Le Guen, Docteure en Photolittérature et présidente de l’association des Amis d’Ergy Landau, est notre invitée de la semaine