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« Regards du grand Paris » est une commande photographique nationale publique étendue sur une décennie – entre 2016 et 2026 – et invite chaque année, au moins six photographes à porter leur regard sur un territoire en pleine mutation. Cette initiative est portée par les Ateliers Médicis et le CNAP (Centre national des arts plastiques) avec le soutien du ministère de la Culture. Pour cette huitième édition consécutive sur le thème « Ce qui ne tient pas en place », ce sont six nouveaux photographes qui ont été choisi·es : Monsieur Bonheur, Caroline Cieslik, Florence Cuschieri, Julie Joubert, Lynn S.K. et Claire Tenu réaliseront chacun leur commande sur une durée de 10 mois. Découvrez ici les projets lauréats.

La commande Regards du Grand Paris est ouverte à la diversité des pratiques photographiques contemporaines et porte une attention particulière aux artistes émergent·es et aux projets impliquant les habitant·es dans la représentation du Grand Paris.
Avec cette commande, les Ateliers Médicis et le Cnap constituent un corpus documentaire sur le développement et les évolutions de la métropole.
Chaque photographe bénéficie d’une allocation et dispose d’une année pour déployer sa démarche, approfondir ses investigations dans le territoire et réaliser une oeuvre qui intègre la Collection nationale gérée par le Cnap.
En 2023, ce sont déjà 48 photographes qui ont participé à révéler des réalités géographiques, des paysages, des communautés, des habitudes et des organisations multiples de la métropole parisienne.

Monsieur Bonheur
Le Visage des oublié·es

Renaissance © Monsieur Bonheur

Marvin Bonheur grandit dans les « no go zones » de Seine-Saint-Denis. Avec le projet Alzheimer en 2014, il commence à explorer photographiquement les lieux hantés de ce département. Thérapie poursuit cette quête identitaire, et Renaissance conclut la trilogie en dénonçant la stigmatisation et les stéréotypes.
Pour les Regards du Grand Paris, Marvin Bonheur poursuit ce travail et met en lumière le visage et les voix des oubliés, de la Seine-Saint-Denis à la Martinique.

L’artiste a commencé son activité photographique en 2014, capturant avec nostalgie la vie « dans le 93 », son territoire d’origine, de vie et de travail. En 2018, il crée La Trilogie du Bonheur , dévoilant les souvenirs, le quotidien et les rêves de la génération des quartiers populaires de Seine-Saint-Denis. Monsieur Bonheur a réalisé et exposé des séries de photos à Londres, Detroit, Mayotte, en Martinique et à Shanghai.
http://monsieurbonheurartist.com

Caroline Cieslik
Naviguer en oiseau

Naviguer en oiseau © Caroline Cieslik

Des cormorans vivent le long des cours d’eau du Grand Paris. L’espèce a près de soixante millions d’années. Leur apparence archaïque contraste avec les paysages urbains hypermodernes. Les mutations de la ville sont-elles propices à l’oiseau ? L’artiste photographie leurs déplacements, leurs migrations saisonnières et nous invite à regarder autrement notre condition humaine en adoptant l’expérience mobile du territoire de l’oiseau.

Caroline Cieslik est photographe, diplômée de l’École nationale supérieure de la photographie de Arles. Elle travaille sur notre relation au sauvage, notion qu’elle aborde à travers ses dimensions culturelles et sensibles mais aussi politiques et écologiques. Elle a exposé en France et à l’international. Caroline Cieslik est aussi docteure en esthétique et fait partie de deux collectifs interdisciplinaires de recherche. Ce statut lui permet de ne pas uniquement documenter le monde, mais aussi ses propres images, comprendre les mécanismes écologiques, sociaux et culturels dont elles sont issues, se confronter à d’autres points de vue d’écologues, d’urbanistes, de politiques, d’habitants, de collectifs.
http://carolinecieslik.myportfolio.com

Florence Cuschieri
Personae non gratae (titre provisoire)

Mustapha. Pont de Cervière, 2023 © Florence Cuschieri

Personae non Gratae dresse le portrait de mineurs isolés contraints de vivre dans les rues de Paris. Tant qu’ils ne sont pas reconnus comme mineurs, ces jeunes ne peuvent espérer un logement, ce qui les conduit vers des abris de fortune du Nord-Est parisien, fréquemment démantelés. Florence Cuschieri documente le quotidien de ces jeunes et le sentiment de déracinement et d’errance qu’ils éprouvent.

Artiste visuelle et auteure d’origine franco-maltaise, Florence Cuschieri est diplômée de l’École nationale supérieure de la Photographie d’Arles. L’identité, la mémoire et l’exil sont les thèmes centraux de son oeuvre. Elle y explore des fragments d’ « histoires oubliées » – souvent personnelles et familiales – pour penser l’impact émotionnel que ces expériences ont sur les individus et les liens intimes qui s’établissent avec leur territoire. L’artiste tisse photographies, textes, archives et récits afin d’en produire des objets poétiques. Son travail a fait l’objet de plusieurs publications et expositions collectives en Europe et en France. Elle est lauréate du Prix Jeune Photographie Occitanie – Images Singulières 2021. En 2022, elle présente une exposition personnelle durant les Rencontres de la Photographie d’Arles. En 2023, elle participe au festival Transat des Ateliers Médicis, ainsi qu’à la résidence Laimun à Villacidro, en Sardaigne.
https://www.instagram.com/florence.cuschieri/

Julie Joubert
Patria Nostra

Sans titre, 2023 © Julie Joubert

L’artiste suit pendant un an les jeunes recrues de la Légion étrangère, de leur sélection au Fort de Nogent à leur déploiement en missions en Île-de-France et dans le monde. Interrogeant le mythe de la Légion – qui intrigue autant qu’il fascine, l’artiste aborde les questions liées à l’identité, la jeunesse, le rêve et les représentations du masculin.

Photographe diplômée de l’École nationale supérieure des Arts décoratifs de Paris, Julie Joubert explore le genre du portrait. Entre photographie plasticienne et documentaire, elle aborde des questions liées à l’identité, la jeunesse et les représentations du masculin. À travers des images dépouillées de tout artifice, elle cherche à mettre en lumière l’authenticité et la singularité de ses sujets. L’aspect documentaire de son travail écarte toute anecdote pour restituer l’essentiel : la fragilité de la présence humaine. Son travail a été présenté lors de différentes expositions en France et en Europe. Elle est lauréate du Lensculture Portrait Awards (2023) avec son projet MIDO qui est présenté à New York en 2024, du Prix de la Nuit de la photographie du festival 9ph (2023), du Passepartout Photo Prize (2022), du Grand Prix MAP Toulouse (2022), du Prix du Jury du Festival les Boutographies (2021), du Prix Caisse d’Epargne (2020) et finaliste du Prix Caritas Photo Sociale (2020). Son premier livre MIDO a été publié chez KAHL Éditions en 2021.
https://www.juliejoubert.com/

Lynn S.K.
Il n’y a pas d’exil (titre provisoire)

© Lynn S.K.

L’artiste explore les récits et géographies intérieures d’un petit groupe de femmes vivant dans le Grand Paris et dont le parcours est marqué par un exil politique ou économique. Quelles sont les formes et trajectoires d’exils dans le Grand Paris ? En mettant en avant des histoires personnelles (la sienne y compris), elle montre que l’autre n’est pas seulement l’autre (le réfugié, le migrant, l’immigré) mais un possible semblable.

Après des études de cinéma, Lynn S.K. choisit la photographie afin d’élaborer une recherche en images autour de la sororité, la mémoire enfouie et l’entre-deux géographique, directement issue de sa propre histoire personnelle, ancrée entre la France et l’Algérie. Son travail autour de l’identité féminine et de l’adolescence l’amène à collaborer régulièrement avec des auteures telles que Virginie Despentes ou Lola Lafon. Lynn participe à des expositions personnelles ou collectives en France et à l’international. Elle travaille également en commande pour la presse ou des maisons d’édition. L’artiste est lauréate de la grande commande photographique du ministère de la Culture pilotée par la BnF en 2021. Elle a remporté plusieurs prix, dont le Sony World Photography Awards (2018), et a été nominée pour le Foam Paul Huf Award (2019), et le Cap Prize (2020). Elle est également mentor pour le Tilawin Project, plateforme de
mentorat et d’échanges pour femmes photographes vivant en Algérie et issues de la diaspora.

https://www.lynnsk.net/

Claire Tenu
Paris ne tient pas en place

Claire Tenu,
Rue Élisée-Reclus, Le Kremlin-Bicêtre / Paris 13e, d’après Eustachy Kossakowski dans 6 mètres avant Paris en 1971, 2023

Les panneaux signalant l’entrée dans Paris, photographiés consciencieusement avec malice par Eustachy Kossakowski en 1971 on été changés, déplacés, voire supprimés au gré de quarante ans d’aménagement urbain. En re-photographiant les mêmes points de vue, la frontière symbolique entre Paris et les communes voisines apparaît fluctuante, incertaine. L’artiste documente les évolutions de la grande métropole dans ses discrets interstices.

Depuis son diplôme aux Beaux-arts de Paris en 2007, Claire Tenu a développé une pratique lyrique et spéculative de la photographie, au croisement du tableau et du montage, de la description topographique et du récit, de l’écriture et de l’installation. Ses oeuvres ont été présentées dans plusieurs musées et centres d’art. Elle a enseigné à l’École supérieure d’art de Lorraine à Metz et s’est engagée dans de nombreuses expérimentations artistiques et pédagogiques lors d’ateliers-résidence en milieu scolaire. Elle a récemment travaillé à la création de deux Observatoires photographiques des paysages, l’un sur la vallée de la Seine en Normandie (avec Maxence Rifflet), le second sur la forêt de Fontainebleau. Ces expériences récentes ont renforcé ce qui constitue la matrice de son activité artistique depuis le début : la vue comme forme picturale entre le document et l’oeuvre, reliant le proche et le lointain par le travail de composition, et permettant que l’histoire et la géographie, les inscriptions et les représentations, soient jouées et rejouées dans le temps et dans l’espace, en questionnant les opérations de la photographie : enregistrer et reproduire.
https://www.clairetenu.com/

Ericka Weidmann
Après des études d'Arts Appliqués et de photographie, elle rejoint un magazine en ligne consacré à la photo en tant que directeur artistique, poste qu'elle occupera pendant 10 ans. En 2010, elle s'installe comme DA en indépendant. En parallèle, elle devient responsable éditorial pour Le Journal de la Photographie et c'est en septembre 2013 qu'elle co-fonde le quotidien L’Oeil de la Photographie pour lequel elle est rédactrice en chef jusqu'en septembre 2016 avant de fonder 9 Lives magazine ! Ericka Weidmann est également journaliste pigiste pour d'autres médias.

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