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Pour sa dix-neuvième édition, le festival ManifestO a demandé à la photographe française Catherine Poncin d’être son invitée d’honneur. La manifestation ouvrira ses portes le vendredi 17 septembre, pour une édition qui place l’Humain au cœur de sa programmation. La manifestation présente comme chaque année les 10 photographes lauréats dans des conteneurs, place Saint Pierre à Toulouse. Les visiteurs venus de tous horizons, pourront déambuler à travers les différents univers sélectionnés par le jury 2021. L’occasion également de parcourir l’œuvre incroyable de Catherine Poncin.

Organisées chaque année à la rentrée de septembre, les rencontres photographiques de Toulouse ManifestO offrent gratuitement au public des expositions dans un cadre atypique. Plusieurs conteneurs maritimes investissent la Place Saint-Pierre, sur les bords de la Garonne. Pour chaque édition, un jury se réunit pour choisir les 10 photographes ayant participé à l’appel à projet, afin de composer la programmation de la manifestation. Cette année, le choix a été opéré par Catherine Poncin, invitée d’honneur et présidente du jury, accompagnée de Patrick Le Bescont, des éditions Filigranes, et Éric Sinatora, Directeur du GRAPh-CMi. Les dix lauréats posent un regard contemporain sur le monde, avec ses préoccupations et ses espoirs…

© Aassmaa Akhannouch

© Carolle Bénitah

Plusieurs séries entrent en résonance. Ils sont cinq à explorer la mémoire familiale, à travers des écritures singulières. Ainsi, pendant qu’Aassmaa Akhannouch, nous fait revivre ses souvenirs dans la maison de son enfance, Clémence Elman nous emmène dans le jardin familial pour redessiner les contours du voyage. Carolle Bénitah, collectionne des photographies anonymes pour se recréer un album de famille imaginaire et Laurent Loubet puise dans les lettres écrites par son grand-père pour récréer la mémoire familiale en mots et en images. Enfin, Patrick Brunet révèle en filigrane les heures sombres de l’occupation vécue par ses parents à travers les images réalisées dans un laboratoire secret du IIIe Reich.

Même soleil © Gaël Bonnefon

© Antoine Vincens de Tapol

Le photographe Romain Baro s’est rendu en mer Egée, pour dresser un état des lieux de cette porte d’entrée de l’Europe, entre tourisme et exil. C’est à Sarajevo qu’Orianne Ciantar Olive est partie à la rencontre d’une génération qui cherche à se projeter dans un avenir meilleur, tandis qu’Antoine Vincent de Tapol a suivi de jeunes adolescents à la recherche de sensations fortes qui s’adonnent à la baignade sauvage. Avec “Même soleil”, on traverse en images plus d’une décennie de création : Gaël Bonnefon pose son regard sur l’univers en induisant la question du corps et de son engagement. Pour finir, Clément Marion a tenu à poser son regard sur les grands brûlés afin de nous offrir des portraits d’une grande intensité.

Quatre autres expositions sont également associées à la programmation dans des lieux partenaires à la manifestation. On retrouvera les lauréates du Prix ETPA 2020 et 2021 que sont respectivement Mathilde De Keukelaere et Maéva Bénaiche. Antoine Bazin dresse un portrait de personnes en situation de grande précarité dans une exposition en partenariat avec Médecin du Monde et les photographies d’Hervé Baudat sont présentées à la Médiathèque de Tournefeuille.

Vis-à-Vis © Catherine Poncin

En attendant l’ouverture du festival, nous nous sommes entretenus avec Catherine Poncin, qui est , pour l’occasion, notre invitée de la semaine !

9 Lives : En tant qu’invitée d’honneur du festival, vous avez présidé le jury afin de sélectionner les 10 lauréats de cette édition. Le choix a t-il été difficile et quels critères étaient pour vous indispensables ?

Catherine Poncin : J’ai été très impressionnée par le nombre et la qualité des candidatures. Je n’ai pas une grande habitude des jurys, j’ai donc pris beaucoup de temps pour consulter chaque dossier, j’ai d’ailleurs remarqué qu’ils étaient organisé avec beaucoup de soin par les candidats. Nous ne devions choisir que dix sujets, exercice difficile car il y avait des travaux très intéressants. Pour moi, le plus important, est qu’il y ait une cohérence entre le projet et les images proposées. Le sujet vient du plus profond de soi, et en tant que photographe, il est important d’arriver à l’exprimer. C’était pour moi essentiel de choisir des travaux qui s’inscrivent dans une cohérence de pensée et d’action quant à leur mise en forme et la mise en matière.

9 Lives : Parmi les 10 photographes choisis, il y a beaucoup de sujets qui tournent autour de la famille et de la mémoire. Des thématiques qui ne vous sont pas étrangères… 

C. P. : Avec le jury, nous nous sommes très rapidement accordés sur les sujets sélectionnés. La mémoire, la famille, ce sont évidemment des sujets qui me tiennent à cœur et qui ont logiquement attirés mon attention. Ce sont des sujets que je traite depuis de nombreuses années, je me suis spontanément dirigée vers ces dossiers. Avec ces 10 photographes, chacun avec leur personnalité, le choix était finalement d’une grande cohérence.

9 Lives : Vous avez commencé la photographie assez tardivement, dans quelles conditions avez-vous décidé de vous intéresser à ce médium ?

C. P. : Je vis à Montreuil depuis très longtemps et à deux pas de mon domiclie, il y a un marché aux puces et un jour en flânant là-bas, je suis tombée sur une collection de photographies anonymes. Ces images m’ont tout de suite touchées. Ces photos abandonnées, soumises à ce grand caveau de l’oubli et placées dans de vieilles caisses ou de vieux cartons, m’ont tout de suite attirée. Et c’est en partant de ces reliques que mon imaginaire s’est mis en marche. Alors bien sûr, je faisais des photos en amatrice, mais c’est vraiment à ce moment-là que j’ai souhaité approfondir ma démarche. J’avais 35 ans. La photographie était un médium qui m’intéressait beaucoup car il était facilement abordable. Je me saisissais donc des photos que je trouvais pour les retravailler dans mon atelier. Ça a été le vrai point de départ.

Du champs des Hommes © Catherine Poncin

9 Lives : Votre travail est présenté sur la place Saint Pierre et à l’Imagerie. Place Saint Pierre, les expositions sont présentées dans des conteneurs maritimes, comment avez-vous pensé la scénographie de cette exposition, dans ce lieu atypique.

C. P. : Bien évidemment, nous avons travaillé en binôme avec Jacques Sierpinski, le directeur artistique du festival, pour étudier les lieux d’exposition. Ces caissons métalliques sont bruts, leurs parois sont assez pauvres, un peu comme les photographies que je trouve. S’est dessinée alors une certaine logique entre mon travail et ces conteneurs. De plus dans certains de mes sujets, j’explore les thèmes de l’immigration et du voyage, en parfaite corrélation avec ces caissons dans cette idée du transport et du déplacement… je trouvais que les sujets présentés dans ces conteneurs étaient propices à la diffusion du sujet. Les expositions sont en libre accès, sur la voie publique, ces photographies sont ainsi mises dans une sorte d’abîme, un nouveau mouvement… Le conteneur ce n’est pas anodin comme lieu. Par rapport aux différents thèmes que l’on expose, ça convient parfaitement. Il y a une vraie résonance entre le lieu et le sujet.

9 Lives : Quatre séries sont présentées dans les conteneurs, deux sont exposées à la galerie l’Imagerie et toutes ont ce point commun distinctif de votre travail, d’utiliser des images d’archives – dont vous n’êtes pas l’auteure – comme matière première de votre création. Comment en êtes-vous venue à utiliser ce genre d’images et comment incluez-vous ces photographies d’archives dans votre travail ?

C. P. : Ces images sont la matière essentielle de mon travail. Certains peintres se saisissent de pigments, des sculpteurs utilisent des objets de récupération… et de la même manière, j’utilise des images qui existent déjà et dont j’ignore tout pour la plupart : des lieux aux personnages. Cela me permet donc de m’impliquer et de me transférer dans l’image et pour créer à partir de ces matières, une matière fictionnelle.
Je recrée des histoires à partir de fragments d’images trouvées autour du thème de l’archive et de la mémoire.

Catherine Poncin, Traversées, Arcadie

Pourquoi avoir choisi spécifiquement ces six séries pour le festival ?

C. P. : Le lieu de L’imagerie souhaitait que les travaux exposés soient en lien avec des collections picturales. J’ai donc choisi la série “Traversées”, réalisée à partir de peintures et des photographies de paysage – que j’ai moi-même réalisées. Des lieux que j’ai immortalisés au fil de mes voyages. J’ai donc associé mes propres traversées, mes voyages, avec une traversé picturale de l’Histoire de l’art. Il y a également une autre série intitulée “De fonds… en comble” qui se décline sous plusieurs séries photographiques, et je travaille à partir de gravures, de cartes marines, d’aquatintes du XIXè siècle mais aussi d’images prises sur Google Map, que j’ai associées avec la collection du Musée Alfred Canel de Pont-Audemer. Et pour les autres séries, je me suis dirigée très spontanément vers des séries en rapport aux conteneurs, avec le travail que j’ai fait sur les disparus en Colombie, ou sur l’immigration maghrébine en Seine-Saint-Denis… La direction du festival m’a également suggéré d’y associer certaines séries, c’est ainsi que le choix s’est fait.

INFORMATIONS PRATIQUES

ven17sep(sep 17)10 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minFestival ManifestO 2021 OrganisateurManifestO


L’invitée d’honneur

ven17sep(sep 17)10 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minCatherine Poncin, invitée d'honneur du festival ManifestoAtelier Galerie L'Imagerie, 33 bis Rue Arago, 31500 Toulouse OrganisateurManifestO


Les Lauréat·es 2021

ven17sep(sep 17)10 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minLa maison qui m’habite encore...Aassmaa Akhannouch OrganisateurManifestO

ven17sep(sep 17)10 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minYou have to blowRomain Baro OrganisateurManifestO

ven17sep(sep 17)10 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minJamais je ne t’oublieraiCarolle Bénitah OrganisateurManifestO

ven17sep(sep 17)10 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minMême soleilGaël Bonnefon OrganisateurManifestO

ven17sep(sep 17)10 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minThe secret laboratoryPatrick Brunet OrganisateurManifestO

ven17sep(sep 17)10 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minSous les étoiles d’AndromèdeOrianne Ciantar Olive OrganisateurManifestO

ven17sep(sep 17)10 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minLa fin des voyagesClémence Elman OrganisateurManifestO

ven17sep(sep 17)10 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minEt vous que devenez vousLaurent Loubet OrganisateurManifestO

ven17sep(sep 17)10 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minPhoenixClément Marion OrganisateurManifestO

ven17sep(sep 17)10 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minEau sauvageAntoine Vincens de Tapol OrganisateurManifestO


Expositions associées

ven17sep(sep 17)10 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minTout était calme, Mathilde De KeukelaereLauréate du Grand Prix ETPA 2021 OrganisateurManifestO

ven17sep(sep 17)8 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minMagma, Maëva BenaicheLauréate du Grand Prix ETPA 2020Galerie PHOTON, 8 Rue du Pont Montaudran, 31000 Toulouse OrganisateurManifestO

ven17sep(sep 17)10 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minDérives et navigations des étoilesHervé BaudatMédiathèque de Tournefeuille, 3 Impasse Max Baylac, 31170 Tournefeuille OrganisateurManifestO

ven17sep(sep 17)10 h 00 minsam02oct(oct 2)19 h 00 minEn équilibreAntoine Bazin OrganisateurManifestO

Ericka Weidmann
Après des études d'Arts Appliqués et de photographie, elle rejoint un magazine en ligne consacré à la photo en tant que directeur artistique, poste qu'elle occupera pendant 10 ans. En 2010, elle s'installe comme DA en indépendant. En parallèle, elle devient responsable éditorial pour Le Journal de la Photographie et c'est en septembre 2013 qu'elle co-fonde le quotidien L’Oeil de la Photographie pour lequel elle est rédactrice en chef jusqu'en septembre 2016 avant de fonder 9 Lives magazine ! Ericka Weidmann est également journaliste pigiste pour d'autres médias.

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