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Partager Partager OtherSide Rencontre avec Emmanuel Cuisinier, Centre des arts, Enghien-les-Bains Marie-Elisabeth De La Fresnaye19 janvier 2018 Temps de lecture estimé : 9minsLe Cda est la première scène conventionnée « écritures numériques » par le Ministère de la Culture et Communication. Aux confins des arts, sciences et technologie, les arts visuels (danse, musique et cinéma) inscrivent une programmation expérimentale et pluridisciplinaire, doublée d’un pôle édition. Le Cda gère et coordonne pour la Ville d’Enghien-les-Bains, ville créative de l’UNESCO (catégorie arts numériques) en partenariat avec la Communauté d’Agglomération Plaine Vallée, le Numeric Lab, incubateur de start-ups numériques. Depuis plus de 10 ans le CDA développe un programme de résidences de création et programme les Bains numériques, biennale internationale des arts numériques. Emmanuel Cuisinier est au cœur de cet écosystème innovant, il a répondu à nos questions. 9 lives : Quel bilan faites-vous depuis votre arrivée au CDA ? Emmanuel Cuisinier : Depuis mon arrivée en 2004 deux ans après l’ouverture de ce projet extrêmement neuf sur le territoire, le CDA a eu très vite la labellisation « Ecritures Numériques » du Ministère de la culture qui nous conduisait à avoir une colonne vertébrale assez identifiée à la fois au niveau du public et des professionnels mais aussi au niveau de la programmation à mettre en place. En ce qui me concerne, j’étais au départ chargé de mission arts plastiques jusqu’à ce que le poste lui-même adopte la terminologie « arts visuels », engageant les acceptations de sémantique et de medium que l’on cela implique. Progressivement ont surgi un certain nombre de questionnements sur la définition des nouveaux medias, le croisement arts sciences et technologies et l’apport éventuel de ces nouvelles écritures dans le domaine de l’art. 9 lives : Comment tisser ces passerelles art contemporain et écritures numériques ? E. C. : Naturellement nous avons été à la rencontre d’artistes qui étaient au croisement art et sciences comme ORLAN ou Edouardo Kac, des propositions mixant arts et technologies avec des artistes comme Bill Vorn ou Stelarc et d’autres personnalités liées à art et internet comme Grégory Chatonsky et Maurice Benayoun. Rapidement une famille d’artistes a émergé, invitée à développer à chaque fois un propos inédit. Ensuite, sur une volonté plus spécifique de Dominique Roland le directeur du CDA qui affectionne par exemple le cinéma, sont convoqués cette fois des artistes comme Ettore Scola ou Alain Fleischer et qui vont être invités à explorer conjointement la veine numérique dans leurs pratiques. Ettore Scola qui avait une pratique du dessin satirique, fut invité à réaliser une série d’œuvres sur palette graphique afin de mettre en scène son trait et permettre de révéler sa pensée graphique se faisant. Alain Fleischer quant à lui, a pu développer de nouvelles images vidéos à l’aide de logiciels en infographie. 9 lives : Comment le public réagit et quels accompagnements sont proposés ? E. C. : Ce qui est très étrange avec le public c’est de part le glissement sémantique autour de l’art numérique désigné comme medium plutôt que pratique, les gens l’identifie à une sorte de génération spontanée née de nulle part et qui ne se raccorde à rien ! Au-delà de cette technicité,l’idée est donc de créer cette rencontre, par un travail de passerelle entre une discipline qui tient compte des outils de son époque avec l’histoire de l’art. Tout ce travail de re-contextualisation est très important au quotidien. Dans cette démarche, s’opère un processus de légitimation de l’art numérique, chaque époque étant témoin d’évolutions mais appelées différemment. Après cela, il y a l’accompagnement dans un lieu qui dépend d’une municipalité et dont le cahier des charges intègre aussi les écoles. La médiation doit donc aussi s’adresser à un jeune public. Cela fait plus de 10 ans que j’interviens sur le territoire avec des enfants qui viennent à raison de 3 expositions par saisons que l’on voit grandir, changer puis revenir avec leurs parents. Il y a cette mutation qui s’opère sur le territoire par l’enfant. Il y a aussi tout un ensemble de dispositifs que nous mettons en place et qui s’adressent à tous les autres publics adolescents, adultes et seniors, en groupe, en famille ou en individuel et qui passent par la mise en place d’ateliers, de résidences ou de rencontres sur le territoire. 9 lives : Le projet Ange Leccia : genèse, rencontre et scénographie E. C. : Genèse : pour la petite histoire.. Cela remonte à l’époque de l’ouverture du Musée d’Art Moderne et Contemporain de Strasbourg dans lequel j’ai travaillé comme conférencier et entre deux visites, j’allais contempler le travail d’Ange Leccia qui y était exposé à l’époque. Plus de 20 plus tard, je me retrouve dans son atelier avec l’artiste qui a depuis accepté ma proposition tandis que son travail et son esthétique sont restés ancrés dans ma mémoire tout ce temps. Une belle occasion de pouvoir rencontrer cette personne qui prend le temps de partager avec vous ses projets et de lancer à la fin du rendez-vous : mais est-ce conforme à ce que vous attendiez ? avec ce questionnement très humble du haut de sa longue carrière ! Au-delà de cette anecdote, je ne sélectionne pas que des madeleines de Proust et reste attentif à proposer une programmation en corrélation avec le cahier des charges éditorial du lieu, en souhaitant aussi revenir à des medias plus « historiques » avec le cinéma expérimental et voir comment un artiste tel qu’Ange Leccia peut rencontrer les enjeux déployés par le Centre des arts au sein de son propos artistique et de la scénographie dans les espaces. Titre et enjeux : Nous sommes partis d’un schéma de composition des images naturel chez Ange Leccia qui travaille par « communauté des images », et qui a donné son titre à l’exposition. Il juxtapose ses images les unes aux autres, créant des motifs vidéos qui, par évocations successives convoquent chez le spectateur d’autres images intérieures cette fois et qui lui sont personnelles. L’idée était de créer un climat dès l’entrée dans les espaces d’exposition. Il y a ce premier écran avec cette pièce que l’on connaît « La Mer » et qui a été re-filmée cet été pour l’exposition et plus loin de nouvelles productions comme notamment « Palmyre » et qui se compose d’images extraites de son voyage sur le site en 2000. Il y a rajouté un long plan de coucher du soleil filmé à travers les vitres d’un train et qui participe à la nostalgie d’une époque révolue aujourd’hui, conférant à ce travail la notion de témoignage même si, comme le précise l’artiste lui-même, c’est l’Histoire et les évènements que l’on connaît qui lui confèrent ce statut, et non le film en lui-même. Ces images se fondent et se répondent entre elles, renvoyant ensuite à d’autres voyages et des époques différentes. Une autre œuvre montrera cette fois une succession de visages, de sculptures, une galerie de portraits dont les expressions pétrifiées apparaissent et disparaissent en sur-impressions successives, et récupérées de la banque de données de l’artiste remontant à l’époque de sa résidence à la Villa Médicis. Il y aura aussi des installations qu’Ange Leccia appelle « arrangements » pour la qualité que ces pièces possèdent à tenir compte de l’espace dans lesquelles elles sont présentées, à être arrangées et ré-arrangées et pas seulement installées de façon figée. Des écrans aussi qui diffuseront également cette matière écran, cette neige cranique -qui vient de l’écran, ce degré zéro finalement du signal image, cette sorte de brouillage qui devient avec la distance un parti pris esthétique. Scénographie : L’exposition s’étend sur deux niveaux d’une surface totale de 350m². Un 1er niveau est plongé entièrement dans le noir avec 3 ensembles vidéos plaçant immédiatement le spectateur dans une atmosphère en rupture avec l’extérieur. Au 2ème étage nous prévoyons une alternance entre des vidéos, des travaux photographiques et des « arrangements ». L’approche se veut résolument non chronologique et davantage dans un travail d’ambiances successives. Pour les œuvres elles-mêmes, au-delà des nouvelles productions, l’artiste a procédé à tout un travail de re-montage, de re-travail des pièces anciennes en apportant de nouveaux filtres et nouveaux jeux d’associations visuelles. En terme de médiation, de nombreux dispositifs sont prévus, et notamment depuis cette année la possibilité à partir d’un I-Pad mis à disposition à l’accueil, de suivre les commentaires de l’artiste œuvre par œuvre. Publication : Nous menons depuis la création du CDA, une politique éditoriale pour chaque exposition, créant ainsi une collection de propos d’artistes Pour Ange Leccia, un livre sera publié avec la contribution de Fabien Danesi, universitaire et historien de l’art. Et en regard de ce texte, j’ai proposé à l’artiste de se prêter au jeu d’un abécédaire établit à partir d’une liste de mots que je lui ai soumise, mots qui relevaient d’impressions personnelles face son travail. Je souhaitais plutôt que d’aborder sous la forme d’une interview la question des œuvres, avoir accès d’avantage à l’artiste et son ressenti. Et dans cette proposition de lecture ouverte, le lecteur égraine à loisir les mots dans le sens qu’il souhaite et bâtissant l’histoire qu’il souhaite au-delà de l’ordre alphabétique. 9 lives : La 10ème édition de la Biennale internationale des Bains Numériques du 14 au 17 juin 2018 E. C. : D’une manière générale les 4 entrées seront toujours prévues : une programmation pour le tout public et en accès libre comprenant la question d’une exposition et d’un parcours arts visuels ainsi que des évènements de danse et de live musicaux, des temps de rencontres cette fois pour les professionnels avec des conférences et des tables rondes, des appels à projets lancés, dans le champ arts visuels et de la danse-musique et enfin, ce que nous appelons une fabrique numérique, sorte de salon avec des exposants qui viennent proposer des prototypes, des initiatives entrepreneuriales mises en relation avec le domaine de la création. La thématique générale est « human futures » dans une logique prospective. Pour ma partie plus spécifiquement cette fois, nous recevrons au CDA l’artiste japonais Yoichiro Kawaguchi et pour le parcours des installations dans la ville d’Enghien-les-Bains seront programmés les œuvres d’une famille de 10 artistes avec lesquels nous avons déjà collaboré pour célébrer la dixième édition de ce festival. Enfin, seront exposés les 6 lauréats de cet appel à projets que nous lançons à chaque édition, 3 pour des projets intégrant des dispositifs d’images montrés dans des chambres noires imaginées par la designer française Matali Crasset et 3 autres pour des installations conçues pour l’espace public. INFOS PRATIQUES : Ange Leccia La communauté des images Du 19 janvier au 15 avril 2018 Vernissage : 18 janvier à partir de 18h30 Centre des arts 12-16 Rue de la Libération Enghien-les-Bains (95) http://www.cda95.fr/fr Favori0
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