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La onzième édition du Prix Camera Clara, qui vise à récompenser les artistes qui travaillent à la chambre photographique, vient d’être décerné au photographe français Baptiste Rabichon pour sa série « Mother’s Rooms ». Le travail primé est actuellement exposé jusqu’au 30 juin, au Studio Frank Horvat à Boulogne Billancourt. À Paris, c’est la galerie Binôme qui propose de découvrir d’autres travaux du lauréat avec l’exposition « Verbatim », visible jusqu’au 20 mai. La remise de ce prix est également l’occasion de présenter la sortie de l’ouvrage qui célèbre les 10 ans du prix et permet de revenir sur les lauréat·es entre 2012 et 2022.

© Baptiste Rabichon, Mother’s Rooms, 2022

Créé en 2012, le prix photo Camera Clara est réservé aux artistes qui travaillent à la chambre photographique. Il récompense un travail d’auteur, inédit et présenté en série ou ensemble photographique afin qu’il puisse être jugé sur sa cohérence, tant sur la forme que sur son contenu. A l’heure où un déferlement vertigineux d’images est offert à tous via Internet et représente une richesse de communication et de partage, il est aussi incontestable – qu’à côté d’un échange démocratisé de contenus de valeurs – il s’est développé un « à tout va » photographique, très à la mode, qui a entraîné une confusion entre le medium, sa performance et sa qualification d’artistique. Pour la créatrice de ce prix, Joséphine de Bodinat Moreno et la directrice artistique Audrey Bazin, il est apparu essentiel de se positionner en « contrechamp » ou plutôt hors champ des tendances et de faire l’éloge d’une démarche réfléchie et d’une certaine lenteur.

© Baptiste Rabichon, Mother’s Rooms, 2022

Le philosophe anglais Bernard Williams déclarait ne pas pouvoir définir la vérité, mais distinguait deux vertus cardinales : l’exactitude et la sincérité qui nous permettaient de s’en approcher.
Lorsqu’un jour Baptiste Rabichon se renverse sur son lit, un souvenir d’enfance remonte, celui de rêvasser en explorant du regard ces étranges palais vides que sont les plafonds. Comme Marguerite Pilven le note dans son texte sur la série Mother’s Rooms – Prix Camera Clara 2022, « En matérialisant une vision d’enfance, (…) Baptiste Rabichon fait un retour sensible au lieu de l’image originelle, non encore corrigée par le filtre des médiations ». C’est là précisément – le lieu de l’image originelle, que Baptiste Rabichon réunit exactitude et sincérité. Alors que l’objectivité de la photographie est sans cesse questionnée, la photographie est pour lui déclencheur d’une vérité ravivée et qu’importe si elle se base sur un souvenir, une sensation forcément subjectifs. Dans ses séries précédentes, Baptiste Rabichon mixait les techniques, celles du photographe et du plasticien puisque « la photographie ne peut à elle seule cerner la complexité d’un moment, l’entièreté d’une situation ; révélant souvent qu’un manque, celui d’un temps saisi et à jamais disparu ». Dans Mother’s Rooms au contraire, son utilisation de la chambre photographique grand format revient à l’essence de l’image : le point de vue. Artifice et discours sont écartés pour laisser place à la grâce de la simplicité de ce seul point de vue. Ici, la beauté de la vérité de Baptiste Rabichon est tellement simple qu’elle opère comme une alchimie, et nous voici tout retournés.

INFORMATIONS PRATIQUES

jeu20avr(avr 20)10 h 00 minven30jui(jui 30)18 h 00 minBaptiste RabichonVerbatimStudio Frank Horvat, 5 Rue de l'Ancienne Mairie, 92100 Boulogne-Billancourt

AUSSI

jeu13avr(avr 13)13 h 00 minsam20mai(mai 20)19 h 00 minBaptiste RabichonVerbatimGalerie Binome, 19 rue Charlemagne 75004 Paris

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http://modds.fr

Ericka Weidmann
Après des études d'Arts Appliqués et de photographie, elle rejoint un magazine en ligne consacré à la photo en tant que directeur artistique, poste qu'elle occupera pendant 10 ans. En 2010, elle s'installe comme DA en indépendant. En parallèle, elle devient responsable éditorial pour Le Journal de la Photographie et c'est en septembre 2013 qu'elle co-fonde le quotidien L’Oeil de la Photographie pour lequel elle est rédactrice en chef jusqu'en septembre 2016 avant de fonder 9 Lives magazine ! Ericka Weidmann est également journaliste pigiste pour d'autres médias.

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