Musique

Le mythe de narcisse chez Madonna (1ère Partie)

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ou comment la photographie (dans ses vidéo-clips) transforme l’héroïne Pop des temps modernes en une inclassable icône

Mais qui es-tu Madonna ?

Qui ne connaît pas Madonna !? L’héroïne de la Pop Culture, celle qui commença dans l’ombre de Patrick Hernandez, To Born To Be Alive, telle pourrait être la devise de cette artiste aux racines italiennes. Madonna, pour en revenir brièvement en chiffre, c’est très certainement la musicienne qui a le plus vendu de disques au monde. C’est aussi, dixit notre ami Wikipédia, peut-être aussi, l’une des femmes les plus photographié au monde ! Quoi de mieux que de revenir sur plus de 35 années de carrière et de se questionner sur son rapport à l’image dans ses propres vidéo-clips.

L’usage du PHOTOGRAPHE dans les vidéos clips de Madonna

Commençons notre exploration en 1984, nous sommes pratiquement au début de la carrière de Madonna et quoi de mieux que d’illustrer la chanson “Borderline” par la mise en scène de ce qui arrive à toutes les personnes qui rêvent de finir sur les feuillets de papier glacée. C’est ce rêve incarné, celui de devenir soi-même une icône de la pop culture, Andy Warhol appelait ça le quart d’heure de gloire. Il n’y a pas meilleur situation narcissique mais la vraie question, c’est celle-ci : une fois la découverte de la perle rêvée par ce photographe, que restera-t-il de cette être et de cette rencontre ?

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Madonna – borderline (1984, réalisé par Mary Lambert)

Avançons dans le temps et en 1992 c’est avec le vidéo-clip « Deeper & Deeper », il y a dans cette proposition, l’illustration d’une séance photographique, mais aussi la réflexion de ce qu’est une image. Quelle sens est donnée par l’artiste au choix d’une posture, d’une esthétique ou d’un projet. La question est effleurée dans ce vidéo-clip qui respire un peu la nostalgie et surtout l’hommage à l’esprit de la Factory cher à Andy Warhol.

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Madonna – deeper & deeper (1992, réalisé par Bobby Woods)

Vous prendrez bien une limousine pour faire la tournée des bars ? C’est l’idée saugrenue qui est arrivé un soir à notre amie Madonna. Qui de mieux que Sacha Baron Coen en Ali G et en driver fou d’un soir. Quoi de mieux que cette télévision qui caricature l’expédition de cette petite tribu prête à vivre par tous les moyens cette folle soirée. Qui de mieux que les paparazzis qui attendent aux pieds des night-clubs qui aiment à jouer du tapis rouge et surtout, quoi de mieux que l’imagination qu’un certain Mario Testino n’aurait pas reniée pour arrêter le temps de quelques clichés cette folle escapade.

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Madonna – Music (2000, réalisé par Jonas Åkerlund)

Revenons en 1985, Madonna joue dans le film « Recherche Susan Désespérément », elle sort gagnante de son incursion dans le cinéma en recevant un prix de meilleur second rôle féminin. Madonna, à son pareil, est montré en train de se prendre en image avec l’aide d’un polaroïd. Cet autoportrait pourrait rappeler un film de Wim Wenders mais c’est bien notre vedette qui tiens l’appareil en bout de main. Sur une de ses photographies, il y a ce cœur dessiné à la main qui traine comme un rappel ou une signature à son vidéo-clip « Borderline ». Ce vidéo clip est composé presque exclusivement d’extrait du film réalisé par Susan Seidlman.

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Madonna – into the groove (1985, réalisé par Susan Seidelman)

L’hymne à l’amour, l’hymne à la différence, l’hymne au vivre ensemble, c’est un peu ce qui est illustré à travers cette chanson produite durant l’an 2000. Ce qui est intéressant, c’est de comprendre que nous sommes au cœur de l’objectif d’un photographe, au cœur d’une vision. Par ces poses, cet éclairage et cette mode du diptyque presque uniforme tout au long de ces multiples portraits, il nous renvoie à des questions de topographie. Et il y a dans ce vidéo-clip, un net rappel au projet avorté du photographe allemand August Sander.

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Madonna – American pie (2000) (réalisé par Philip Stolzl)

https://www.youtube.com/watch?v=wAticSct7Ys
Un jour, Britney Spears a eu l’idée d’inviter la reine de la pop culture, il n’y a pas mieux que Madonna pour incarner celle qui doit jouer à la madame Big Brother. Assise sur son fauteuil à contempler ce peuple terrifié à l’idée d’être filmé 24h/24, il y a comme l’illustration de ce que peut-être le sur-contrôle des images. Vous n’êtes plus propriétaire de votre propre image semblerait parfois dire ce vidéo-clip qui ne peux que rappeler le moment où Steve Job lançait ses ordinateurs sur fond d’ambiance 1984 de George Orwell. Madonna vous a à l’œil, qu’on vous dit.

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Britney Spears feat Madonna – me against the music (2003 réalisé par Paul Hunter)

Madonna comme de nombreux artistes aiment les shows, spécialement ces méga-concerts de stade où s’exposent tous ces nombreux fans en mal de frissons et de souvenirs mémorables. L’époque des fans en folie de The Doors ou des Beatles n’est peut-être plus là mais la génération Madonna rivalise sans mal. Montrer l’artiste sur scène, c’est bien, mais montrer ses fans appareils photos en main, c’est encore mieux.

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Madonna – miles away (2008)

https://www.youtube.com/watch?v=pWtZT-TZtQ8
Madonna, c’est devenu au fil des années : la cible de la presse people, celle qu’il faut absolument montrer sur les couvertures des magazines. Que ces paparazzis soient les premiers à dégainer leurs téléobjectifs à la sortie des hôtels et parfois à poursuivre la vedette à bord d’un scooter pour transpercer la vitre teintée à coup de flash. Le rappel à la tragique fin de vie de Lady Diana sonne comme une évidence. Et puis, sans ce jeu de « Je t’aime, moi non plus » il n’y aurait pas cette foule en liesse, qui d’une seule note saurait capable de chanter a cappella certaine chanson de Madonna. En groupie des temps moderne, il n’y a pas mieux qu’un petit appareil photo pour immortaliser les rares occasions de croiser l’idole en vacances quelque part en méditerranée.

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N’oublions pas qu’il y aura toujours quelqu’un pour montrer l’artifice d’un tournage d’un vidéo clip, pour montrer cet envers du décor. Alors, oui, quand le réalisateur se laisse avoir par la zizanie qu’il a créée, il n’hésite pas à montre qu’il était ni moins voyeur qu’un paparazzi ni plus fan que ces vacanciers sommé de courir sur quelque centaine de mètres.

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Madonna – turn up the radio (2012 réalisé par Tom Munro)

Quoi de mieux que de réunir David Fincher à la réalisation, Christopher Walker qui attends sa promise au sommet d’une grue de cinéma et Madonna en victime cinématographique. Un mélange de tous les genres qui donne cet étonnant vidéo-clip. Notez qu’il y a un photographe sur un plan qui déclenche son flash et seul son crépitement visuel nous parvient. Et puis, se mélangent la passion pour la photographie, l’effet miroir, et la recherche d’une image à l’aide d’un compte-fils.

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Madonna – bad girl (1993 réalisé par David Fincher)

Madonna est une personne presque comme tout le monde. C’est un peu la vie rêvée d’Hugh Grant dans « Coup de foudre à Notting Hill ». Une vie ennuyeuse dans cette petite maison à l’entrée chiquement décoré et cette insatiable vie médiatique où le moindre faits et gestes est scrutés jusque dans les hôtels. Du journaliste, aux fans en passant par les femmes de ménage qui s’improvisent en Patrick Timsit photographe, il n’y a pas à dire, la vie de Madonna ne peux qu’être insupportable. Tout ça pour protéger comme un miracle la vie de Lourdes pour qu’elle soit, au mieux un long fleuve tranquille.

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Madonna – Drowned World / substitute for love (1998 réalisé par Walter Stern)

https://www.youtube.com/watch?v=a4ChERg__G8
La photographie, c’est aussi associé à la question du voyeurisme. Il y a cette question récurrente de la sexualité et du désir du corps de l’autre. La représentation de la sexualité en photographie accompagne les mœurs de toutes les époques et cultures de chacun des pays du monde. La question de la pornographie en photographie, à une époque, ça s’échangeait sous le manteau et à l’ombre du regard de la maréchaussée. Madonna a connu ce style de job et a même avoué récemment avoir subi une agression sexuelle dans ses plus jeunes années. Alors, quand il s’agit de parler du rapport au corps dans un vidéo-clip et ce, en montrant l’univers d’un peep show, c’est fait de façon romanesque. Le petit garçon, naïf comme un sou, qui n’en fera que du lèche vitrine et ses spectateurs adultes frustrés derrière cette vitrine, il y a un monde. L’un deux, capte tel un souvenir avec son toy camera, cette madone se dévoilant à nue mais que reste-t-il au fond de ce spectacle et de cet obscur objet du désir.

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Madonna – open your heart (1986)

Madonna se prend de passion pour la télévision de sa chambre d’hôtel, elle tombe même amoureuse du toréador qui est diffusé à l’écran. Un nouvel amour et un nouvel objet de tous les fantasmes. Ce qui ne manque pas d’être remarqué par une horde de photographe qui n’auront d’yeux que pour ce manège entre cette idole des arènes et la Madone venue d’Amérique.

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Madonna – take a bow (1994 réalisé par Michael Haussman)

Alan Parker réalise Evita avec Madonna qui aura le premier rôle. Une œuvre cinématographique qui marquera à jamais les cinéphiles et les amoureux des belles mélodies. Les trois vidéo-clips qui suivent sont extraits de l’œuvre de fiction. Vous noterez l’importance d’inclure voire d’insister sur la figure du photographe.

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Madonna – you must love me (1996 réalisé par Alan Parker)

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Madonna – don’t cry for me Argentin (1996 réalisé par Alan Parker)

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Madonna – another suitcase in another hall (1996 réalisé par Alan Parker)

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Sébastien Moitrot
Ayant grandi dans des classes spécialisées pour sourds et malentendants en région parisienne, j’ai souvenir d’avoir toujours eu ce goût pour les arts et pour l’image en mouvement. Je me retrouve alors à gravir école après école toutes ces marches estudiantines et parisiennes qui me transforme en spécialiste de l’image photographique. Tour à tour : un peu d’arts appliqués en formation STI au lycée, un CAP de retoucheur photographe puis un Bac Professionnel d’art et métier option : Photographe. Une entrée inattendue à l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts où j’ai pu durant cinq années pousser au plus loin mes interrogations d’artiste. J’ai séjourné quelques mois au Sydney College of Arts de l’Université dans le cadre d’un échange universitaire. L’Australie c’était une fantastique aventure. J’ai continué mon voyage sur les bords du lac Léman à la Haute-École d’Art et de Design pour y perfectionner mes connaissances en médiation culturelle et y découvrir le métier d’enseignant. J’ai poussé le vice estudiantin en commençant un doctorat à l’université Paris 8. Mais plus que ce parcours scolaire, ce qui compte pour moi, c’est de toujours réfléchir et de proposer, lorsque les occasions se présentent, une réflexion sur la photographie, d’en saisir et d’en définir son essence. Ce qui compte avec la photographie, ce n’est pas, pour moi, l’instant déclic cher à Henri-Cartier Bresson mais ce qu’il se passe dans l’esprit du preneur d’image.

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