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Michael Jackson en version plus conceptuelle que pop au Grand Palais !

Temps de lecture estimé : 4mins

Avis aux fans de reliques et autres « memorabilia », cette exposition n’est pas un hommage à Michael Jackson mais la démonstration de son impact sur la culture visuelle de son temps et l’art contemporain 10 ans sa mort. Pourquoi une telle influence qui dépasse largement les champs de la danse et de la musique ?

Comme le décrypte Vanessa Desclaux, co-commissaire de cette version française qui nous arrive de la National Portrait Gallery de Londres, le Roi de la Pop se réclame de la grande histoire de l’art et revendique une filiation avec des maîtres comme Michel Ange, Rubens, Poussin, les impressionnistes qu’il mixe avec la culture populaire noire ou le steet art. De même avec les musiciens classiques Bach, Beethoven Debussy, Copland, Gounod, Offenbach..couplés avec du R&B et du rap dans une perspective d’œuvre totale. Trois pièces chorégraphiques ont d’ailleurs été commandées à cette occasion où l’on retrouve Jérôme Bel (génial moonwalker), Raphaëlle Delaunay et Jacques Gamblin (mais que diable allait-il faire dans cette galère ?) et François Chaignaud avec Nino Laisné (opéra et poésie sur fond de nature artificielle).

Reprenant les codes des médias populaires et sa fascination pour la posture romantique Michael Jackson repousse les limites du goût par contaminations et métissages, à l’image de son identité kaléidoscopique.

Si l’Estate qui n’est jamais à court de stratégie pour capter de juteux profits, n’a pas financé ce show itinérant (Londres, Paris, Bonn et Finlande), il espère en tant que co-producteur, tirer parti des entrées vendues par le Grand Palais et le catalogue, l’exposition de Londres ayant attiré plus de 80 000 visiteurs.

« On the Wall » rassemble ainsi 40 artistes de tous horizons et 121 oeuvres autour d’un parcours thématique (danseur de légende, Roi de la Pop, métamorphoses, citoyen du monde, le masque, icône et idole..) sur fond de paillettes même si l’exubérance, on l’aura compris ne se joue pas dans une quelconque fétichisation. Le parcours ouvre sur le majestueux portrait en pied commandé de son vivant à l’artiste chouchou des Obama, Kehinde Wiley. A la façon de Rubens, la star richement parée porte une armure et nous toise d’un regard de défi à la limite de l’arrogance. Une stature vite questionnée par l’œuvre de Appau Junior Boakye-Yiadom, installation qui rejoue « the freeze » cette pose qui défie les lois de la gravité sauf que les chaussures sont vides et ce sont des ballons qui font office de baromètre. Avec Yan Pei-Ming c’est la mort précoce et tragique qui est mise en avant, de même chez Johannes Kahrs « Jésus à l’âge de 43 ans » renvoyant à la mort du Christ et de l’idole dont l’image devient spectrale par le truchement du sfomato. David Lachapelle en fait un prophète, martyr des temps modernes par l’usage de l’iconographie biblique « The Beatification » « An illuminating Path »(reprise pour l’affiche de l’expo).

Au milieu de tout ce cortège de références, ce continuum, certains artistes creusent la veine sociétale dans une approche raciale et post-coloniale dont l’icone elle-même se faisait le vecteur, même si certaines analyses demeurent trop caricaturales. Ce sont de loin les approches les plus intéressantes et abouties avec Isaac Julien (analyse sémiotique de l’identité masculine noire), Todd Gray son photographe attitré (idées préconçues et occultation culturelle), Susan Smith-Pinelo (le genre et l’hyper sexualisé ), Hank Willis Thomas (stéréotypes raciaux et consumérisme) ou Lorraine O’Grady avec le rapprochement de Baudelaire, « le premier et le dernier des modernistes ».

Si le public peut participer du bout des lèvres de concert à l’oeuvre de Candice Breitz (enregistrement de la bande son de Thriller par des fans recrutés sur petites annonces) il ne pourra que toucher du regard la veste couverte de petites fourchettes, couteaux et cuillères, « dinner jacket », signée du styliste Michael Lee Bush.

Le fin mot de l’histoire, ce néant que chacun cherche à défier sans jamais y parvenir, est condensé dans l’œuvre de David Hammons artiste adoubé afro-américain, qui à l’aide d’une vraie économique de moyens : 3 micros et quelques câbles métalliques lance « Which Mike do you want to be like? » suggérant le pouvoir de manipulation et de dédoublement de l’icone via le masque notamment. Mur de masques customisés du roumain Dan Mihaltianu jusqu’à l’épuisement. Ce visage qui à force de chirurgie et de violents traitements devait peu à peu devenir blanc. Schizophrénie et hochets de l’histoire post raciale américaine qui se fond sur ce corps jusqu’à l’embaumer.

Un fantôme qui flotte hors du temps, sans pourtant jamais s’incarner.

INFORMATIONS PRATIQUES

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Horaires d’ouverture :
lundi, jeudi et dimanche de 10h à 20h. Mercredi, vendredi et samedi de 10h à 22h.
Fermeture hebdomadaire le mardi
Tarif : plein : 13€
Réservez votre billet : www.grandpalais.fr

Marie-Elisabeth De La Fresnaye
Après une formation en littérature et histoire de l'art, Marie de la Fresnaye intègre le marché de l'art à Drouot et se lance dans l'événementiel. En parallèle à plusieurs années en entreprise dans le domaine de la communication éditoriale, elle créé son blog pour partager au plus grand nombre sa passion et expertise du monde de l'art contemporain et participe au lancement du magazine Artaïssime.

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