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Les femmes s’exposent : un nouveau festival photographique sur la côte Normande

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La première édition d’un festival photographique s’est ouverte ce vendredi 8 juin, à Houlgate. Sa thématique et sa programmation sont entièrement consacrées aux femmes photographes Une quinzaine d’expositions, un ensemble hétéroclite et réjouissant de démarches photographiques, sélectionnées et portées par Béatrice Tupin, longtemps responsable photo à l’Obs.

Françoise Huguier, marraine de cette première édition est exposée dans l’unique salle d’exposition de l’ancienne gare. Un double regard porté sur le costume et les codes vestimentaires.  Ses photographies réalisés dans les coulisses et sur les podiums des défilés de haute couture, à Paris, dans les années 80 et 90, font échos avec de récents portraits d’adolescentes photographiés à Kuala Lumpur. Les  élégantes et subtiles transparences des voiles et  plissements d’étoffes, se confrontent avec de nouveaux codes vestimentaires, des portraits de jeunes malaysiennes aux perruques fluo portant des costumes bariolés, les transformant en  héroïnes de mangas. Prenant à cœur son rôle de marraine, Françoise Huguier invite aussi et révèle dans ce même espace, Kani Sissoko, jeune photographe malienne rencontrée à Bamako. Dans une mosaïque de photographies horizontales, la jeune artiste détourne des amulettes et des fétiches de marabouts. Fixés par elle sur des troncs d’arbres, ils se plaquent sur les sinuosités de l’écorce et les fentes du tronc. Par analogies visuelles, cette démarche photographique dénonce alors, en images allusives, les mutilations sexuelles infligées aux jeunes africaines.

Les treize autres expositions sont en plein air. Devant l’Office du Tourisme, le festival commémore, à sa manière, le 74e anniversaire du débarquement pour réveiller une série de photographies de Lee Miller réalisées en Normandie, en juin et juillet 1944. Un hommage historique et complice d’une femme reporter de guerre, rendu aux femmes du front. Des infirmières et des auxiliaires, qui elles aussi, se sont exposées, en  accompagnant les armées de libération. Un reportage méconnu, paru peu de temps après la libération dans l’édition anglaise de Vogue.

A proximité, dans un jardin public où rode le fantôme de Marcel Proust, Adeline Keil photographe et enseignante à l’Ecole d’Art de Caen – Cherbourg, propose une installation de plein air. Des photographies panoramiques, singulières, qui dans une veine plasticienne, illustrent sa perception voyageuse des « Petits désordres du monde ».

C’est au bord de la plage, que le festival concentre ses propositions et va à la rencontre du grand public. Un parcours de sept expositions déclinant en un même parcours autant d’univers et de sujets. On retiendra les portraits vérité, en couleurs et  formidablement mis en espace de Léa Crespi et les photographies sportives de Corinne Dubreuil qui recomposent des séquences de tennis ou de rugby, en de superbes compositions graphiques. On s’attardera aussi sur un reportage de Valérie Léonard, constat effrayant des dérèglements écologiques, présenté dans un cadre idyllique. On y découvre comment dans un village de l’Etat du Jharkhand, au nord-est de l’Inde, des mines de charbon à ciel ouvert ont remplacé la forêt. L’extraction du minerai a aussi détruit la faune et intoxique les populations par des rejets de dioxyde de carbone.

Ce festival a aussi trouvé deux points d’ancrage sur son territoire. Il propose deux démarches et deux regards qui associent et révèlent les habitants d’Houlgate. La photographe Florence Levillain est allée à la rencontre d’une dizaine d’entre eux. Elle les restitue en portraits, avec des superpositions qui  les replongent dans leurs univers et nous relate leurs parcours avec les mots qu’ils lui ont confiés. Une autre généreuse démarche valorise de jeunes adolescents d’un centre  d’accueil. En construction de leurs identités et en quête d’intégration, on leur a confié des appareils photos pour se raconter en une exposition de plein air et porter de nouveaux regards sur ceux qui les entourent.

Pour cette première édition Les femmes s’exposent a su fédérer nombre de soutiens nationaux, dont la fondation Picto ainsi que des soutiens institutionnels et locaux. Au premier rang desquels, la ville d’Houlgate et plusieurs associations qui se sont  emparées et investies dans la manifestation.

Un nouveau festival photographique vient de naitre en se donnant une mission. Il est porté par la passion et l’enthousiasme. Chaleureux et rassembleur, il sait, avant tout, transmettre et satisfaire le goût des images en entremêlant de réjouissants et singuliers parcours photographiques.  

Cette semaine nous reviendrons plus en détail sur l’événement, avec notamment, une série d’interviews réalisées par Pascal Therme.

INFOS PRATIQUES :
Les femmes s’exposent, festival dédié aux femmes photographes professionnelles, Première édition. Houlgate (14). 8 juin au 16 juillet 2018. (Entrée Libre).
http://www.lesfemmessexposent.com

 

Philippe Normand
Philippe Normand est Directeur artistique du festival Planche(s) contact depuis le printemps 2015, après en avoir assuré la coordination depuis sa création en 2010, et créé en 2012, Le Off de planche(s) Contact, en marge du festival in. Responsable du service culturel de la Ville de Deauville, il est en charge depuis 2006 de ses projets photographiques. On lui doit le commissariat d’expositions puisant dans la mémoire photographique de Deauville, en lien avec : la Donation Jacques Henri Lartigue, la BnF (fonds Seeberger), l'I.C.P. à New York, (Robert Capa, Deauville 1951), magnum photo, les archives de Yul Brynner, le festival Normandie Impressionnisme, … Auparavant de 1984 à 1993, aux côtés de Jean-Claude Gallotta, il a assuré et dirigé la communication du chorégraphe en réalisant l’editing des prises de vues des spectacles, et mis en œuvres une vingtaine de commandes photographiques (portraits, visuels d’affiches, reportages…)

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