L'Invité·e

Coup de Cœur de David Nissen : « Absentee » de la photographe Japonaise Sayuri Ichida

Temps de lecture estimé : 4mins

Pour sa quatrième et dernière carte blanche, notre invité de la semaine, David Nissen, co-fondateur de la Galerie L77,  partage avec nous l’un de ses derniers coups de cœur, il s’agit de la série « Absentee » de la photographe Japonaise Sayuri Ichida que l’on retrouve actuellement lors d’une exposition à la librairie – galerie Le Plac’Art Photo sous la houelle de Clément Kauter. Un travail d’une grande poésie et sensualité.

Parmi les oeuvres exposées on trouvera des impressions sur papiers japonais ainsi qu’un magnifique portfolio ou les oeuvres se répondent en pairs.

« Dans cette série, je me concentre sur la temporalité de notre existence. Centrée sur mon propre corps, juxtaposée à des objets quotidiens que nous négligeons habituellement, la frontière entre la figure et les objets artificiels disparaît et se mélange pour évoquer un état d’être en constante évolution. Cet ensemble d’œuvres est une représentation évocatrice d’un sentiment de détachement, d’une absence, de soi et de la réalité.

Après avoir perdu ma mère à la fin de mon adolescence, je me suis protégée des pensées liées à la mort. Cependant, 15 ans plus tard, l’impact psychologique de la pandémie mondiale a déclenché une période de chagrin et de deuil. La création de cette série m’a permis de surmonter des difficultés émotionnelles telles que l’incertitude et l’anxiété causées par le rappel de la mort. Les objets révèlent progressivement leur présence, faisant allusion à des états émotionnels variables. La dichotomie visuelle entre les courbes du corps et les lignes artificielles dures que l’on trouve dans les objets fabriqués par l’homme reflète la manière dont mon état émotionnel fluctue entre calme et anxiété.

Nous avons tendance à négliger notre propre mortalité. Nos tentatives pour échapper aux pensées sur la mort sont inévitablement remises en question, et nous sommes obligés de reconnaître notre propre fragilité. Une reconnaissance viscérale fait parfois surface, nous rappelant le caractère éphémère de la vie. »

Sayuri Ichida

« Absentee de Sayuri Ichida est un livre qui se ressent. Il fonctionne comme la somme de ses parties, construisant au fur et à mesure une atmosphère tendue. À bien des égards, il s’agit d’une collection de séances de photos distinctes et d’expériences de différentes manières d’aborder les idées que Ichida tente d’exprimer, réunies par une reliure qui rappelle The Map (1965) de Kikuji Kawada, avec de multiples dépliants qui abritent leurs propres séquences de quatre images.

La présentation de ses pages dépliantes ajoute un poids significatif à ce livre. La paire de photographies extérieures – celles que l’on voit avant l’ouverture du dépliant – est généralement constituée de doubles ou de formes très similaires ; l’image de la page de droite n’est souvent qu’une réimpression de celle de gauche, mais copiée, retournée ou pivotée. Ailleurs, notamment dans les quatre images qui constituent l’intérieur de ces pages dépliantes, ces portraits sont placés parmi des images hautement sculpturales de béton fissuré, de bâtiments anonymes, de nuages et de rideaux tirés. Le corps semble ici réduit à des formes, à des morceaux de chair brute et exposée (nous ne voyons aucun vêtement ; si jamais le corps devait être décrit comme « vulnérable », ce serait ici, où chaque instance est soit cachée soit obscurcie). Les scènes du monde extérieur, aussi brisées, décrépites et sans vie qu’elles soient, me semblent être un miroir du monde intérieur des modèles sans visage d’Absentee. »

Extrait de la chronique de Callum Beaney

INFORMATIONS PRATIQUES
Absentee
Sayuri Ichida
Exposition du 4 au 28 mars 2022
Plac’Art Photo
12 Rue de l’Éperon
75006 Paris
https://placartphoto.com

La Rédaction
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