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Brancusi ou la sublimation de l’épure : Europalia 2019, les 50 ans ! (Bozar, Bruxelles)

Temps de lecture estimé : 5mins

Moment emblématique de la 27ème édition du festival Europalia qui fête ses 50 ans en 2019 et met le cap en Europe, ce qui est une nouveauté après des scènes plus lointaines, Brancusi est le le représentant le plus illustre de cette saison roumaine au BOZAR. Europalia coincide avec les 30 ans du coup d’État qui a mis fin au régime autoritaire communiste de Nicolae Ceausescu (1965-1989). Au total plus de 260 évènements dans toute la Belgique célèbrent cette nation qui a vu naitre de nombreux intellectuels et artistes et dont la ville de Timisoara est nommée capitale européenne de la culture en 2021, levant définitivement le voile du faux charnier du régime communiste.

« « Ce n’est pas la forme extérieure qui est réelle, mais l’essence des choses. Partant de cette vérité, il est impossible à quiconque d’exprimer quelque chose de réel en imitant la surface des choses » – Brancusi

Brancusi, la sublimation de la forme (BOZAR)

Si Doïna Lemny, la commissaire française et conservatrice au Centre Pomidou en charge de l’Atelier Brancusi, a choisi ce sous-titre c’est pour insister sur cette quête de l’essentiel qui animera l’artiste tout au long de sa vie. Arrivé de Bucarest (à prononcer Brancouch) à Paris en 1904 après un périple héroïque et mouvementé, il commence par se former auprès de Rodin dont il se détache peu à peu. Le « Baiser » le poursuit pendant 40 ans comme une quête résume t-elle et marque sa rupture avec Rodin.  « Il ne pousse rien à l’ombre des grands arbres » déclarera t-il. Cette fusion ultime de 2 personnes en une dans un esprit archaïque et premier d’obédience théosophique, l’accompagnera comme signe graphique sur de nombreux supports dont sa correspondance.

Son atelier devient vite un point de raliment pour de nombreux amis et artistes Tristan Tzara, Marcel Duchamp, Modigliani, Erik Satie, Picabia, Cendras, Léger, Cocteau..Passionné par le mouvement et la photographie, il documente ses œuvres seul et avec Man Ray, les positionnant comme de véritables installations, ce qui est très novateur à l’époque. On le voit vêtu de ses habits de paysan roumain avec ses amies chorégraphes également qui se mettent en scène au milieu de son studio. Doïna Lemmy insiste sur la place de la photographie dans ce cheminement artistique, comme en témoigne « l’Oiseau » qui réagit sous différents éclairages. Il place ses œuvres dans l’Atelier des œuvres nouvelles sous la catégories des « groupes mobiles ». L’atelier devient une œuvre à part entière comme le souligne la commissaire en charge de l’Atelier singé Renzo Piano au pied du Centre Pompidou suite à la donation du maitre à l’état français en 1956 sous réserve qu’il soit reconstitué à l’identique.

L’épisode du fameux procès avec la douane américaine de 1926 qui lui réclame des droits d’entrée sur « l’Oiseau dans l’espace », considéré entrant dans la catégorie des « ustensiles de cuisine et matériels hospitaliers ». Il va utiliser le film également pour documenter cette œuvre monumentale qu’il va construire entre 1937 et 1938 à Targu Jiu, village proche de son lieu de naissance : la Table du silence, la porte du baiser et la colonne sans fin, son testament spirituel qui rejoint le principe avant gardiste de la sérialité et de la perception de l’oeuvre monumentale dans l’espace.
Le parcours dans une scénographie sobre et élégante, met en valeur cette pureté avec le choix de socle transparents qui semblent flotter dans l’espace. Un pur moment de médiation.
A noter que pendant le festival, 7 performances et créations contemporaines d’artistes belges et roumains (Alexandra Croitoru & Vlad Basalici, Anne Teresa De Keersmaeker, Gaëtan Rusquet, Lia Perjovschi, Madalina Dan, Manuel Pelmus, Sergiu Matis) interagissent avec l’exposition.

Perspectives

L’exposition s’articule autour de deux pôles historiques: l’émergence d’une identité roumaine au 19e siècle, et la révolution, suivie de la chute de Ceausescu en 1989. Comment l’art se développe-t-il dans le contexte de cette histoire mouvementée? Et quel regard les artistes portent-ils sur ces événements ?
On y retrace l’émergence de l’identité roumaine jusqu’aux mouvements d’avant-garde : Isidor Isou et le lettrisme, des représentants du mouvement Dada roumain (le magazine Contimporanul), Ghérassim Luca et le groupe surréaliste roumain Infra Noir.. Après-guerre la figure de Geta Bratescu et sa revendication de l’Atelier comme espace d’autonomie ou Ion Grigorescu « In my beloved Bucharest » filmé clandestinement sont emblématiques des stratégies des artistes face à cette période de surveillance totalitaire.
L’importance de la télévision est soulignée pour le processus qui conduit à révolution de 1989 ouvrant à de nouveaux récits. Les artistes roumains peuvent désormais se confronter à la sphère internationale comme le bien connu en France, Mircea Cantor, lauréat du Prix Marcel Duchamp en 2011.

Autres expositions incontournables :
EUROPALIA CURATOR’S AWARD, HIT à KANAL
Dacia Felix, grandeurs de la Roumanie antique au musée Gallo Romain de Tongeren
Ciprian Mureşan au S.M.A.K de Gand

INFOS PRATIQUES :
BRANCUSI
PERSPECTIVES
Jusqu’au 12 janvier 2020
Bozar
Rue Ravenstein 23
1000 Bruxelles, Belgique
https://www.bozar.be/

Festival EUROPALIA
Jusqu’au 2 février 2020
Lisez le magazine EUROPALIA en ligne
EUROPALIA ROMANIA AGENDA
https://europalia.eu/fr

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Thalys, partenaire de votre voyage.

Marie-Elisabeth De La Fresnaye
Après une formation en littérature et histoire de l'art, Marie de la Fresnaye intègre le marché de l'art à Drouot et se lance dans l'événementiel. En parallèle à plusieurs années en entreprise dans le domaine de la communication éditoriale, elle créé son blog pour partager au plus grand nombre sa passion et expertise du monde de l'art contemporain et participe au lancement du magazine Artaïssime.

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